Chapitre 1 - partie 4/5

9.5K 869 57
                                    

On délogea rapidement Carmella de sa chambre pour la laisser à Cheryl, qui avait fait une de ses crises mémorables pour que Sir Edward la lui cédât. Bien évidemment, Cheryl avait fait cela dans le seul but d'embêter sa cousine.

Sa tante, quant à elle, lui avait rapidement fait comprendre qu'elle serait ici tout juste tolérée et qu'elle devrait mériter chaque repas qu'on lui servirait. En fait de repas, Carmella l'avait rapidement compris, ce n'était que les restes qu'on lui servait, et ceci dans la cuisine, cela allait de soi.

Elle se vit notamment dans l'obligation de remplir mainte tâche, reléguée au rang de servantes dans sa propre maison. Bien sûr, les domestiques s'étaient offensés du comportement de leurs nouveaux maîtres. Mais Carmella les avait toujours empêchés de montrer ouvertement leur désapprobation, sachant pertinemment que son oncle aurait immanquablement saisi cette occasion pour renvoyer ceux qui auraient tenté de prendre sa défense. Aussi, la plupart des domestiques tournaient leur langue sept fois dans leur bouche avant de prendre la parole face au comte.

Certains, hélas, n'avaient pas pu supporter la situation et la manière dont la jeune fille - qu'ils avaient vu grandir - se voyait traiter. Il va sans dire que tous avaient été mis à la porte sans référence, si ce n'est un mot que leur faisait Carmella en cachette, espérant que cela pourrait les aider, bien qu'elle en doutât.

Le premier avait été le jeune palefrenier de dix-neuf ans. Cela s'était produit lorsque le comte avait, pour la première fois, porté des coups à la jeune fille. Cela avait soulevé toute la maison.

Ce jour-là, Carmella avait eu le dos battu par une cravache. La cause en était simple : elle s'était opposée à son oncle, erreur à ne pas commettre. Mais la jeune fille n'avait pas pu faire autrement...

Son oncle avait décidé de monter un jeune cheval qui était à peine débourré, malgré les mises en garde d'un de ses palefreniers. Le comte n'avait d'ailleurs pas manqué de le morigéner pour avoir osé contredire ses ordres.

Bien entendu, le cheval, totalement apeuré, l'avait rapidement envoyé valser, se ruant de tout côté pour se débarrasser de l'individu qui s'était installé sur son dos, éperons en fer aux pieds et dont la cravache s'était, à plusieurs reprises, abattue sur sa croupe. Les éperons s'étaient enfoncés sans retenue dans ses flancs, faisant redoubler ses ruades.

Le cheval avait eu tôt fait d'envoyer son cavalier avec violence sur le sol. Le comte s'était alors relevé, le visage congestionné par la fureur, ce que n'avait pas arrangé ses deux verres de porto pris le matin. Alors, s'emparant des rênes, il avait abattu sa cravache sur le flanc de l'animal avec une violence terrifiante, faisant hennir le cheval qui avait tenté, en vain, de se dégager.

Le jeune palefrenier n'avait pas pu supporter cela et avait donc tenté de séparer le cheval de son maître. La seule chose qu'il avait réussi à obtenir fut un coup de cravache sur la joue volontaire de la part du comte. Sir Edward lui avait alors ordonné de reculer et de se mêler de ses affaires.

Le palefrenier avait regardé avec horreur son maître quand Carmella était arrivée en courant, hurlant à son oncle de cesser ses coups. La fureur du comte avait décuplé et, sans se soucier de sa nièce, il avait continué à battre le pauvre cheval.

Aussi avait-il été surpris quand il avait senti Carmella le pousser avec violence de tout son poids, ce qui l'envoya au sol, lui qui ne s'attendait certes pas à ça de la part de sa nièce.

Comment ? Elle osait le pousser ? Eh bien, elle en payerait le prix !

Il s'était relevé, l'avait regardé avec un regard sombre, le regard du diable. Puis, il avait déclaré d'une voix qui avait fait claquer chaque mot comme un nouveau coup de cravache :

Ce destin qui nous lieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant