Chapitre 30

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Lina avait juste envie de se frapper : comment avait-elle pu faire ça ? Comment avait-elle pu faire ça à Jessy ? D'accord elle était soûle à un point assez violent, comme elle ne l'avait encore jamais été auparavant, mais cela ne l'excusait pas, pour sûr. Et avec Aaron en plus ? Avait-elle pensé ne serait-ce qu'un instant à Jessy dans tout ça ? Parce que oui elle avait un copain en plus. « Avait » bien sûr car quel garçon, aussi gentil qu'il soit, resterait avec sa copine qui vient d'avoir deux bébés, et en plus d'un autre ? La jeune fille se dégoûtait.

Lina commença alors à jeter ses oreillers au sol, se défoulant sur tout ce qui se trouvait sous sa main dont sa brosse à cheveux, un thermomètre et une tasse pleine d'eau qui partit directement se fracasser contre le mur qui lui faisait face dans un grand bruit d'éclats.

Alertée par le bruit, une infirmière débarqua presque aussitôt dans la chambre de la jeune maman. Celle-ci fit rapidement le point des dégâts, l'air peu surprise par cet accès de colère soudain, avant de partir chercher l'aide du docteur chargé de la patiente.

Liam arriva peu après, abasourdi. La scène qui se déroulait devant lui n'avait rien de réjouissant. Au contraire, la tragédie lui présentait comme décor des débris de vaisselle, un désordre peu habituel et une actrice principale repliée sur elle-même, la tête dans ses genoux.

Il intima à l'infirmière de s'en aller et s'approcha de la jeune fille :

-Lina ?

Celle-ci garda ostensiblement la tête baissée, ignorant totalement le médecin.

-As-tu envie d'en parler ?

Toujours pas de réponse.

Voyant la cause perdue d'avance, le docteur Bris se leva et s'apprêtait à partir quand il entendit d'une toute petite voix :

-Tout est de ma faute.

Le médecin se retourna vers Lina qui avait enfin levé les yeux pour les fixer à présent sur le mur face à elle. Il semblait encore porter les marques de son accès de colère quelques minutes auparavant, comme si ses cris résonnaient indéfiniment entre les quatre murs blancs de la chambre.

Alors qu'il prenait le parti de la laisser seule, Liam Brice eut tout juste le temps d'entendre sa dernière phrase, prononcée comme une accusation dont la sentence serait irrévocable. Peut-être l'était-elle après tout...

-Je ne suis qu'une petite idiote.

***


Lina resta encore quelques temps à l'hôpital avant qu'elle ne soit finalement autorisée à sortir, ainsi que les jumeaux.

La première fois qu'elle put les tenir dans ses bras fut assez éprouvante pour la jeune fille mais elle sut aussi dès lors qu'elle avait pris la bonne décision. Même si ces petites choses ne pouvaient l'effrayer plus, Lina les aimait. Si seulement cela pouvait être suffisant...

Durant son séjour à l'hôpital, Lina apprit, à l'aide d'une aide-soignante, à s'occuper d'eux, à les habiller, leur donner le bain, les nourrir etc... Tout était nouveau pour la jeune maman.

La tête tournée vers les paysages qui défilaient depuis la vitre de la voiture de ses parents, Lina repensait à Aaron. Elle n'avait rien dit à personne, se refermant sur elle-même comme une huître sur sa perle. Elle ne l'aimait point, et se doutait bien que c'était réciproque. Alors à quoi bon le lui dire ? Elle devait assumer seule, elle n'avait pas besoin de lui. Mais combien de temps pourrait-elle tenir ainsi ?

La jeune maman jeta un coup d'oeil aux deux sièges bébés que Véronique avait pu récupérer de ses neveux ; Lindsey et Louis dormaient paisiblement, indifférents aux bruits de la radio et du moteur. C'était une chance ; Lina ne pouvait que profiter de ces moments de calmes devenus si rares à présent.

Après s'être garé sur le parking, Grégoire descendit de la voiture, sortit du coffre le sac de sa fille ainsi que les quelques affaires que l'infirmière avait gentiment données et partit ouvrir la maison. Lina suivait son père de près, Lindsey dans les bras alors que Véronique s'occupait de Louis.

A peine arrivée, l'adolescente sentit les larmes lui monter aux yeux. Toutes les émotions accumulées au cours de ces quelques temps lui revenaient en masse, se mélangeant avec cette matinée où elle était partie de cet endroit même, comme tous les matins, pour revenir aujourd'hui avec ses deux bébés...

« Lina ? L'interpella Grégoire. On a une surprise pour toi. Suis-nous.»

La jeune fille le suivit docilement, serrant Lindsey un peu plus contre elle tandis qu'elle montait les escaliers, suivie de sa mère.

Son père ouvrit la porte de la chambre d'ami située à côté de celle de Lina, impatient de lui montrer son travail, et s'effaça pour la laisser entrer.

«Oh mon dieu...souffla simplement la jeune fille, complètement sous le choc devant ce qu'elle découvrit dans l'ancienne chambre d'ami.

En effet, Véronique et Grégoire n'avaient pas chômé pendant ces derniers jours : la chambre avait été transformée en parfaite chambre d'enfant. Les anciens meubles avaient été remplacés par une table à langer blanche, se repliant pour former une commode lorsque l'on ne l'utilise pas. Un fauteuil blanc se trouvant avant dans le séjour et 2 petits berceaux étaient posés côte à côte près de la fenêtre : l'un bleu, l'autre rose.

-Mais...Mais comment avez-vous fait tout ça ? Murmura Lina en entrant dans la pièce, admirant les quelques peluches que ses parents avaient rajoutées près des berceaux. Je...enfin vous... enfin ce n'était pas prévu, rajouta-t-elle en baissant les yeux.

Véronique la prit par les épaules, confiant Louis à son mari :

-On s'est arrangé tu vois. Ça te plaît ? On a récupéré la table à langer et l'ancien berceau de ton cousin. On a aussi pu trouver quelques vêtements mais il va vite falloir aller en acheter d'autres, expliqua-t-elle en ouvrant les portes des armoires où jonchaient quelques pyjamas. On a monté le fauteuil ici et voilà... Et dehors, on a rangé la belle poussette double qu'on a acheté hier avec papa, ajouta-t-elle en souriant. Ce n'est pas grand chose pour l'instant mais on va vite améliorer ça.

Véronique se tourna alors vers sa fille.

Elle aussi est maman à présent, pensa-t-elle.

-Tu sais Lina, il va rapidement falloir trouver une solution pour les garder, expliqua-t-elle tendrement. Avec le lycée, tu ne pourras pas t'en occuper la journée donc il faudra trouver des solutions d'accord ? »

La jeune fille hocha la tête ; elle ne savait plus quoi dire. Elle ne pouvait pas encore penser à son retour au lycée pour l'instant. Elle ne put qu'étreindre ses parents de son bras libre en les remerciant avec effusion, même si elle manquait de mots.

Ils étaient vraiment gentils.

J'ai de la chance de les avoir, se dit Lina pour elle-même en souriant lorsqu'ils la laissèrent seule avec ses jumeaux dans leur nouvelle chambre. Je ne sais pas ce que je ferai sans eux...

Après avoir fait le tour des affaires que ses parents avaient récupérées, Lina laissa ses bébés dans leurs berceaux, se posa à côté d'eux sur le fauteuil et appela la seule personne qu'elle avait envie de voir en ce moment :

« Oui El, c'est Lina... » 

LinaDonde viven las historias. Descúbrelo ahora