Chapitre 18

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Je reste figée face à la déclaration d'Astan.

Pourtant, elle me parait pas si surprenante que ça.

Lors de l'Assemblée, j'avais bien remarqué l'hostilité que manifestait Astan à l'égard de Damar, je comprenais maintenant pourquoi.

— Il le sait...? Je murmure.

— Oui.

Je déglutis.

Un silence un peu déroutant s'installe entre lui et moi, laissant place aux réflexions et aux pensées aussi douloureuses soient-elles

— Il se moque éperdument de moi. Il ne m'a jamais manifesté quelconque intérêt. Je suis une erreur de la nature pour lui: le fils que son père a eu avec une autre femme que sa mère. Damar déteste les Hauts Elfes, et par conséquent il n'a aucune estime pour moi, poursuit Astan.

— C'est horrible...

— Damar n'est pas une bonne personne. Oui, je le déteste pour son inconsidération, mais j'ai l'infime espoir qu'un jour qu'on puisse se confronter pour qu'il paie pour tout ce qu'il a commis.

— C'est pour ça que tu veux devenir numéro 2...Parce qu'un jour tu passeras numéro 1, si Elijah meure, et tu seras au même niveau que Damar...

Astan laisse échapper un petit rire.

— C'est bête hein? Mais, c'est la principale motivation qui me pousse aujourd'hui à me battre pour mes objectifs.

— Pas tant que ça quand on y pense, je lui souris.

— Je veux ce poste légitimement, pour mes qualités. Je ne veux ni être pistonné ni tricher pour l'obtenir. Je veux montrer à Damar que je suis capable d'arriver à son niveau de façon honnête. Et peut-être qu'un jour, il aura une certaine estime pour moi. Je ne veux plus d'affection de sa part, comme j'en ai voulu jusqu'à l'adolescence. Je veux qu'il souffre et qu'il se rende compte de l'erreur qu'il a commise en ne me reconnaissant pas comme son frère.

Je comprenais la douleur d'Astan à l'égard de sa propre situation. Il avait vécu avec l'absence d'un grand frère qu'il savait pourtant présent peu loin de lui. Sous ses apparences de garçon dur et virulent, subsistait l'âme d'un enfant dont la peur principale était d'être abandonné.

Abandonné par son père, puis par sa mère qui s'était suicidée, et enfin par son demi-frère qui avait décidé de nier son existence, il avait cependant trouvé en Rod le statut de grand frère dont il avait été finalement privé. Je comprenais enfin pourquoi son départ l'affectait autant. Il s'était encore une fois senti abandonné par une personne à qui il avait offert sa confiance et son estime.

J'étais touchée par son histoire.

Réellement.

Parce que moi aussi j'avais souffert du manque d'un père et l'absence de frère ou de sœur, et que je pouvais comprendre sa souffrance.

— Je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça...Lâche-t-il, en prenant sa tête dans sa main.

Moi non plus, en réalité, je ne savais pas pourquoi il avait décidé de se livrer, à moi.

Peut-être parce que j'étais finalement la personne la moins apte à le juger étant donné que je connaissais une situation similaire.

— Parfois, mettre des mots sur sa souffrance peut être libérateur...Je déclare.

Astan plante à nouveau ses yeux dans les miens.

— J'espère sincèrement que, quand tu trouveras ton frère ou ta sœur, cette personne te reconnaîtra pour la personne que tu es. Parce qu'il n'y a rien de pire qu'être transparent pour une personne qui partage le même sang que toi.

Les Peuples des OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant