Chapitre 18

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 Après quelques minutes de marche, nous étions enfin arrivés chez moi. Lui qui savait se montrer tactile faisait cette fois-ci attention de ne pas m'effleurer de quelque façon que ce soit. Face à ma porte d'entrée, je me dépêchai de trouver mes clés pour ouvrir la porte, le stress d'Evans étant de plus en plus palpable. Affolé, je ne réalisais pas la folle situation dans laquelle je me trouvais, n'osant à peine regarder mon professeur éméché qui s'apprêtait à passer la nuit à mes côtés après m'avoir embrassé.

La porte enfin déverrouillée, il avança timidement dans la pièce, scrutant du coin de l'œil chaque détail de l'appartement. Avec honte, je le suivis tout en observant à mon tour le désordre éparpillé ici et là.

— Je vais aller prendre une douche. Vous voulez y aller après moi ?

— Non merci, je vais dormir comme ça si ça te va. bredouilla-t-il les joues empourprées.

Une fois lavée, je sortis de la douche et me plaçai devant le miroir accroché au mur. Trempée, je restai immobile devant mon reflet, observant avec dépit l'image que ce dernier me renvoyait. Une mine affreuse s'entendait sur mon visage, ne m'offrant que des paupières gonflées encerclées de cernes rougeâtres. A quelques mètres de moi se trouvait l'homme qui hantait mes esprits et je n'avais rien d'autre à lui offrir que ce visage rongé par la fatigue. Titubante, j'attrapai quelques vêtements qui trainaient par terre avant de les enfiler. Cela faisait presque trente minutes que je m'étais absentée, il s'était peut-être endormi, ou bien était-il parti ? Discrètement, je sortis de la pièce, espérant de tout coeur qu'il soit toujours là.

Assis sur mon lit, il regardait avec intérêt ma collection de DVD accumulée dans un coin de ma bibliothèque.

— Excuse-moi, je me suis permis de regarder tes affaires, j'espère que je n'ai pas été trop indiscret.

L'ambiance qui habitait les lieux était glaciale, brisant toute connexion qui avait pu se créer par le passé. Je ne prenais aucun plaisir à le voir gêné de la sorte et j'étais prête à parier que c'était réciproque.

— Lequel est votre préféré parmi tous ceux-là ?

— J'adore « La mouche » de Cronenberg. Je vois même que tu possèdes la première version cassette sortie en France.

— Elle appartenait à mon père. C'était un film qu'il adorait, mais je n'ai jamais eu le courage de le commencer en vue du scénario. Je ne suis pas une grande fan de cinéma d'horreur.

— C'est pas vraiment de l'horreur mais davantage une histoire d'amour déchirante. Le film nous questionne sur notre rapport au corps et à l'autre. C'est bouleversant mais offre une vision assez fataliste de l'amour.

— Le genre d'histoire qui se termine mal ?

— On peut dire ça.

A peine eût-il terminé sa phrase qu'un second silence pesant gagna la pièce. Toutes nos interactions semblaient dramatiques, comme conscient d'une fatalité qu'il nous était impossible d'ignorer. Nous étions différents et tout nous le rappelait.

— Merci d'être venue avec moi ce soir.

Il souffla, les mains crispées.

— Tu sais, je me sens vraiment mal à l'aise. Je ne suis pas à ma place et j'ai peur de faire quelque chose qui pourrait te rendre malheureuse. Je m'en veux encore terriblement pour tout à l'heure, c'est pour ça que j'ai accepté de monter, pour que tu puisses me pardonner.

— Vous n'avez rien fait de mal, je vous le jure.

— Très bien. Alors allons dormir.

La pièce plongée dans le noir, je m'allongeais sur le lit, m'engouffrant avec hâte sous la couette. A son tour, il me rejoignit, se positionnant à la verticale pour être sûr de ne pas me toucher. Droit comme un I, ses yeux étaient fixés au plafond, laissant apparaître sur son visage un sentiment intense d'introspection. Malgré la chaleur qui s'emparait de mon corps en vue de la situation plus qu'inespérée, je ne pouvais lutter contre cette fatigue qui obstruait mes sens. Prête à sombrer, je remontai mes jambes pour me recroqueviller à ses côtés. Ayant parfaitement conscience de la situation délicate dans laquelle il se trouvait, je souhaitais ne rien tenter, rien exiger. Sa présence seule me calmait, détendait mon âme qui avait vécu un véritable enfer.

Alors que j'élevai mon genou le long de sa jambe, sa course se stoppa net quand un obstacle dur lui barra la route. À peine ai-je été en contact avec cette résistance que j'entendis Evans pousser un gémissement profond. Il se cacha immédiatement la bouche à l'aide de sa main, tentant de se relever dans la foulée.

— Je suis désolé, je m'en vais.

Avant même qu'il ne puisse bouger, je lui attrapais le bras pour le maintenir couché. J'avais très bien compris ce qu'il s'était passé et même en vue de mes désirs les plus fous le concernant, ce n'était pas absolument pas le bon moment.

— Je m'en fiche. Je veux juste m'endormir.

Mon genou retiré, je m'approchai simplement de lui avec lenteur. Je sentais son érection palpiter contre mon bas ventre, voulant se défaire de ce tissu qui l'emprisonnait. J'avais conscience de maintenir le malaise collé à lui de cette manière, mais je ne pouvais m'en défaire. Je voulais le sentir et penser, même naïvement, que son corps me réclamait autant que le mien. 

Aimer pour avancer (Professeur X Élève)Where stories live. Discover now