Chapitre 22

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— Attention, ils arrivent ! Cache-toi vite ou tu vas mourir Aaron !

Un soupir de désespoir discret se fit entendre à ma droite. Comme à chaque réplique bas de gamme, il ne pouvait contenir son mécontentement. Il était plus qu'évident que les films d'horreur n'étaient pas son genre de prédilection. Assis côte à côte dans l'obscurité, je ne pouvais me concentrer sur le film tant l'ambiance qui planait dans la salle était anxiogène. "La mouche" n'étant finalement pas diffusée dans le petit cinéma de quartier que j'avais sélectionné, nous avions été contraints de regarder le dernier film d'horreur à la mode. Je préférais cela à une comédie romantique, mais est-ce que les tripes et les effusions de sang étaient la meilleure idée ?

De la voiture jusqu'à l'entrée dans la salle, il ne m'avait pas adressé un seul mot. Un comportement des plus étranges pour un rendez-vous qu'il avait lui-même accepté.

Dirigeant discrètement mon regard dans sa direction, je pouvais voir son visage consumé par l'ennui. Du bout des dents, il mordillait sa lèvre inférieure alors qu'un de ses doigts entortillait en boucle la même mèche de cheveux. Un spectacle bien plus plaisant que le film projeté.

— Laissez-moi tranquille ! Par pitié !

La violence graphique du film me ramena rapidement à la réalité, m'obligeant à fermer les yeux pour fuir cette vision d'horreur.

— Est-ce que ça va ? me chuchota Evans, les lèvres presque collées à mon oreille.

Une odeur de café vint immédiatement m'enivrer, stimulant avec rapidité chaque partie de mon corps.

— Je ne suis pas vraiment fan des films d'horreur. J'ai du mal avec toute cette violence.

— Tu veux qu'on s'en aille ? Si tu n'aimes pas, on n'est pas obligé de rester.

— Ça va aller. rétorquais-je dans l'instant, décidé à ne surtout pas écourter ce moment d'une rareté folle.

Silencieusement, il se repositionna dans son siège, me laissant complètement déboussolé à la suite de ce moment de proximité.

— Non pas les yeux, par pitié !

De nouveau témoin d'un acte de barbarie, mes paupières s'abaissent dans la seconde. Le spectacle étant éprouvant mais la possibilité de partir plus tôt l'était encore plus. Peu importe le film diffusé, je resterai à ses côtés le plus longtemps possible.

Les yeux toujours clos, je sentis une pression s'emparer de mes doigts. A l'aide de sa paume, il recouvrit ma main avec tendresse. Je me retins de geindre tant la surprise étant grande. Le dos collé contre le siège, je prenais garde à ne pas me mouvoir, ne voulant pas mettre un terme à ce geste inespéré. Une action qui s'inscrivait, comme toutes les autres, dans une démarche déconcertante. Il m'était impossible de prévoir ses actions, slalomant depuis des mois entre ignorance et attention. Je ne savais pas ce qu'il voulait, mais avait-il seulement lui même la réponse ?

Je ne pus me souvenir de la fin du film tant mon esprit ne s'intéressait qu'au contact de sa peau contre la mienne. A plusieurs reprises, son pouce vint délicatement effleurer le sommet de ma main, nous emmenant dans une dimension ou la tendresse devenait notre langage.

Le film terminé et les lumières de la salle allumées, sa main quitta la mienne, me ramenant à une réalité que je cherchais à fuir. Ce moment partagé avait été comme tous les autres, doux, mais fugace.

En direction du parking, je ne trouvais pas le courage de prononcer ne serait-ce qu'un seul mot. Je le savais, la fin était proche, et je n'avais aucune idée pour déjouer cette fatalité.

Aimer pour avancer (Professeur X Élève)Where stories live. Discover now