E2 | Défi N-1 ● Coup de Coeur ●

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Le texte de -enami- a été le coup de coeur du jury ! Nous vous le laissons par ici, et bien évidemment, Wattpad ne permet pas de préserver la mise en forme originale mais voilà. 

Bonne lecture :) 


*** 


ROMÉO: Juliette, oh, ma Juliette, le soleil se lève déjà. Pourquoi inondes-tu le monde de ta lumière, astre de feu ? 

JULIETTE: Le verger se réveille, mon Roméo, et les pommes sont des bouts de mon coeur qui saigne. Le chemin qui serpente, l'allée qui s'éloigne et que tu fouleras dans trop peu de temps me paraissent des cicatrices que le temps ne peut effacer. Poussière, poussière, soulève-toi et masque-moi cet avertissement qui me rappelle que Roméo doit me quitter ! 

ROMÉO: Les branches, elles, semblent des bras qui s'étendent avec malice, mon amour, alors que leur pâleur qui ne fait que s'accentuer me rappelle que je dois te laisser. Lumière, ne pourrais-tu pas décliner ? Soleil, ne pourrais-tu pas te rendormir et laisser dans les ténèbres ce paysage de douleur ? 

JULIETTE: La nature est partout, Roméo, dans le vent qui joue avec les rideaux, dans l'odeur de matin et de rosée, dans la douceur des couleurs qui éclosent. Personne ne peut l'ignorer, comme personne ne peut arrêter l'astre qui signe la fin de ma vie en m'enlevant mon amour. La lumière se reflète sur les flaques et m'éblouit. 

ROMÉO: Quel paysage pourrait mieux représenter la douleur qui m'accable ? Son innocence n'est qu'illusion sous cette lumière de trahison, et je vois les ombres sous les arbres. Elles s'étendent comme s'étend mon chagrin. 

JULIETTE: Et comme s'étend le mien ! Si tu es une de ces branches qui bougent, Roméo, je dois rester dans ma chambre, statue de sel et de chagrin. Oui, je suis plus à l'image de ces pierres que l'on aperçoit bordant l'allée, j'attends pour l'éternité un miracle qui ne viendra pas. Car jamais les pierres ne frémissent, mon Roméo, et l'on distingue d'ici les ronces qui, les envahissant, deviennent les témoins de leur impuissance. 

ROMÉO: Le soleil est maintenant au-dessus de l'horizon, Juliette, et les bras des branches s'étirent, comme sortant du sommeil. Tu ne seras bientôt plus devant moi, étoile que le feu du soleil a tuée. Au revoir, Juliette, oh, ma Juliette, au revoir ! 

JULIETTE: Que j'aimerais voir l'allée, le verger, les pierres disparaître ! Que j'aimerais voir ce paysage de douleur retomber dans la nuit ! Il faut pourtant se résigner, mon Roméo, et je dois te regarder disparaître au milieu de la brume. Je pense un instant qu'en plissant les yeux, je pourrais te distinguer à nouveau mais ta silhouette se trouble et les rayons s'épaississent. Tu t'es fait avaler par la lumière. 

Recueil de Textes {Livre Annexe du Recueil de Défis}Where stories live. Discover now