Lumarave I [Fantasy]

Chapitre XIII - Aïmar

Village des Hautes-Forges,

Contrée Libre

Vers minuit le lendemain, Fenril et Gabriel rejoignirent discrètement Aïmar et Noël au point de rendez-vous convenu. La lune était pleine et éclairait comme en plein jour, ce qui les arrangeait car aucun ne voulait sortir une lampe de peur d'attirer l'attention. Chacun grimpa sur un cheval pour bientôt cavaler entre les arbres calcinés de la forêt des Hautes-Forges.

Les Pics Brumeux désignaient trois volcans à l'origine de l'île que formait la Contrée Libre avant que les éruptions conséquentes ne fassent fusionner la partie sud aux Terres Sauvages. A présent, des milliers d'années plus tard, ces géants au cœur brûlant étaient éteints et ne représentaient plus une menace. Si l'on rajoutait à la végétation dense le terrain quasiment impraticable de la région dû aux multiples petites collines entourant les pics, on comprenait pourquoi personne ne s'y aventurait de son plein gré. Même pour atteindre la ville d'Aerilon, de l'autre côté du territoire et proche de la frontière avec les Terres Sauvages, il était plus prudent et rapide de s'y rendre par la mer, en prenant un bateau à Miewart.

Un endroit parfait finalement pour cacher une organisation secrète contre l'Imperium, finalement...

A l'approche des pics, la végétation disparut quelque peu pour laisser place à des paysages rocheux et sombres. Ils ralentirent l'allure, craignant que leurs chevaux ne se blessent les pattes sur le sol inégal et rocailleux. Les volcans étaient là, devant eux, trônant tels des monstres de pierre menaçants et dont les sommets semblaient frôler les nuages. L'endroit était un vrai labyrinthe et les jeunes hommes se seraient à coup sûr perdus si leurs aînés ne les accompagnaient pas. Combien de fois avaient-ils fait ce voyage pour connaître si bien la topographie des lieux ?

Ils tournèrent plusieurs fois pour s'enfoncer toujours plus dans ces méandres rocailleux. Enfin, ils tombèrent sur une forteresse, creusée à l'intérieur même d'une montagne. Presque invisible dans l'obscurité extérieure sans les quelques lumières artificielles dont les lueurs s'échappaient des meurtrières.

Deux hommes sortirent des ombres à leur approche et prirent les rênes des chevaux pour aller les porter à un tout petit ruisseau sortant du flanc de la montagne. Le silence extrême des lieux amplifiait le son du moindre caillou soulevé en marchant et se répercutait en échos interminables. Aïmar observa longuement cette forteresse qui les surplombait. Elle lui rappelait étrangement Clair-Reflets, le château de la famille royale de Heathaven. Face à elle, il se sentait comme lorsqu'il était aux pieds des remparts royaux...

Ecrasé.

***

Une femme les guida à travers couloirs et escaliers de pierres, taillés à même la roche, jusqu'à arriver dans une grande salle, où de nombreuses meurtrières laissaient penser que les rayons du soleil de la journée devaient l'inonder de lumière. Une grande table la parcourait et des personnes s'y trouvaient déjà assises à leur arrivée.

Aïmar aperçut les eledarses. En entrant dans la forteresse, il avait pressenti qu'il les retrouverait ici. Il n'avait cependant pas anticipé que Saraeh se précipiterait dans ses bras en l'apercevant, incontrôlée et bouleversée.

— Par les dieux, s'exclama-t-elle, je suis tellement contente de vous revoir, bande d'idiots !

Les joues du jeune homme, abasourdi, s'empourprèrent en la prenant lui aussi dans ses bras. Cette affection spontanée laissa bouche bée leur entourage, en particulier Joon et Noël qui se contentèrent seulement de se serrer mutuellement la main en les observant en silence se séparer. Curieusement, Ransyl sourit avant de saluer les arrivants à son tour.