Chapitre XV - Aïmar

27 5 9
                                    

Village des Hautes-Forges,

Contrée Libre

Lorsqu'ils arrivèrent dans la vallée des Hautes-Forges, le village n'était pas encore tout à fait éveillé. Seules quelques rares maisons avaient leurs volets ouverts. Lysandre, Fenril et Gabriel prirent les rênes des chevaux pour les libérer dans les pâturages avant d'attirer des regards trop curieux. Aïmar et les autres en profitèrent pour se faufiler à travers les ruelles en prenant soin d'éviter la rue principale et la place du village. Aïmar et Noël faisaient le guet et ouvraient la voix aux deux eledarses.

Arrivés non loin du cabinet d'infirmerie, Noël prit l'initiative d'y entrer le premier pour aller parler seul à seul à Lauria, l'unique personne qui avait eu le courage d'affirmer ce qu'elle pensait du traité et de la guerre. Fenril avait suggéré d'aller la trouver. Elle seule pourrait et accepterait de les aider sans les trahir.

Noël réapparut dehors quelques minutes après y être entré. Il siffla en direction de ses amis, cachés dans un coin sombre, pour qu'ils le rejoignent à l'intérieur. La porte fermée à clé derrière eux, Lauria les accueillit à bras ouverts sans poser de questions, bien qu'elle doive en avoir de nombreuses en tête. Aïmar parierait gros que l'infirmière irait bassiner les oreilles de Fenril d'ici la fin de la journée.

— Nous avons pensé que tes connaissances en herboristerie pourraient nous être utiles, évoqua Aïmar une fois les embrassades terminées. Certains villageois ont vu leur visage et ce n'est pas bon si on veut qu'ils se fondent parmi nous. Tu aurais quelques artifices en tête ?

— Je pense savoir quoi faire, dit-elle en les observant. Pour commencer, je vais teindre vos cheveux et les raccourcir. On vous prendra pour des nordistes ainsi, et vous passerez plus inaperçus avec ce teint pâle. Ensuite, je m'occuperai de vous coudre des vêtements suffisamment épais pour cacher les lueurs de vos pierres. Il faudra que l'on songe à une solution pour mieux les camoufler. L'hiver, les pulls ne vous dérangeront pas, mais l'été...

Joon et Saraeh échangèrent un regard stupéfait en la voyant préparer une mixture étrange faite à base de plantes réduites en poudre fine et d'eau. Une fois celle-ci prête, elle leur tendit de vieux linges tâchés de mille et unes couleurs pour qu'ils s'enroulent dedans et que la coloration ne vienne pas laisser des tâches sur leur peau immaculée.

Saraeh défit sa longue chevelure pour la peigner de ses doigts. Puis elle enleva le pull qu'on lui avait donné aux Pics tandis qu'Aïmar et Noël se détournèrent d'elle pour lui laisser de l'intimité. Noël avait le feu aux joues et baissait la tête en se raclant la gorge. Aïmar se pinça les lèvres, peinant à contenir son rire. Sa bonne humeur disparut subitement en remarquant Joon à côté de lui, retirant lui aussi son haut, un bandage autour de chacun de ses poignets.

— Qu'est-ce qui t'es arrivé ? s'inquiéta Aïmar.

Joon fit une grimace.

— Un souvenir des bracelets d'orphin qu'on a porté pendant trois jours. Il faudra encore quelques temps avant que ça ne guérisse complètement.

Aïmar observa longuement ses pansements avant de croiser ses iris émeraude. Un autre battement irrégulier souleva sa poitrine et lui coupa la respiration. Mal à l'aise, il se détourna pour proposer à son ami de toujours d'aller faire un tour le temps que Lauria en finisse avec eux. Ensemble, ils sortirent dehors pour se diriger vers la place.

Dehors, Aïmar respira de nouveau.

***

Plus tard, chargés de diverses gourmandises données par Robs, les garçons retournèrent à l'infirmerie. Gabriel venait tout juste d'annoncer aux habitants des Hautes-Forges la venue de deux jeunes arrivants, tous deux orphelins de Brinadean, et avait désigné Aïmar et Noël comme tuteurs temporaires pour les intégrer dans le village. Aucun n'avait bronché, au contraire tous semblaient heureux d'accueillir de nouvelles têtes aux Hautes-Forges. Cela faisait bien longtemps que personne n'était venu emménager par ici.

Lumarave I [Fantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant