Chapitre 9 Gratitude

32 10 22
                                    


Duncan

En ouvrant les yeux, j'eus l'impression de revivre une scène du passé. J'étais de nouveau allongé dans un lit, et Sieglinde était à mon chevet. En me voyant reprendre conscience, elle me sourit d'une façon inhabituelle pour elle, qui était si inexpressive. Là, elle semblait presque au bord des larmes.

- Je suis heureuse que vous soyez de nouveau parmi nous, Duncan, me dit-elle en posant ses mains sur mon bras, qui était totalement guéri.

Je pris quelques instants pour regarder mon bras. Il n'y avait aucune plaie ni cicatrice, pourtant, j'avais des souvenirs très clairs de la confrontation.

- Vous avez eu le privilège de bénéficier des soins des Alfs. Mon oncle a fait en sorte de faire venir les meilleurs guérisseurs de la région pour vous remercier. Grâce à vous, le loup n'est plus une menace pour le peuple des Alf. répondit elle a mon interrogation silencieuse.

- Grâce à nous, Dame Sieglinde. Sans votre aide, je n'aurais rien pu faire.

Sieglinde sembla très surprise lorsque j'eus fini ma phrase.

- J'insiste, Duncan. Vous avez tué la bête en lui plantant votre épée dans son cœur.

- Je ne comprends pas, Dame Sieglinde. Pourquoi voulez-vous diminuer votre contribution ? Si ce salopard a été vaincu, c'est uniquement grâce à notre collaboration. Sans vous, je ne serais pas allé bien loin, et sans moi, il en aurait été de même.

- Vous ne voulez pas qu'on vous attribue toute la gloire de cet acte ? Si le mérite vous revient à vous seul l'honneur et la réputation dont vous jouirez dépasserais même celui des 12 fauves du père de tout. Tous les Einherjar rêvent de cela.

- Je ne me bats pas pour de telles broutilles, déclarai-je avec fermeté.

-Oh... alors, voulez-vous que nous partagions le mérite de cet exploit? Vous êtes vraiment différent des autres Eiherjar, Duncan, répondit-elle, un léger sourire aux lèvres, visiblement émue par mes paroles.

-Oui, ce serait injuste que vous ne receviez aucun mérite. Après tout, vous avez versé votre sang, concédai-je, laissant transparaître un soupçon de familiarité en posant ma main sur son épaule. "Mes principes me dictent d'agir ainsi, Dame Sieglinde... Mais écoutez, je ressens une grande reconnaissance envers vous, après tout ce que nous avons vécu. J'aimerais mettre les choses à plat avec vous... Mais je peine à digérer ce que vous avez fait..."

Elle me fixa avec de grands yeux, semblant totalement déconcertée par mes paroles.

- En partageant des aspects de ma vie privée avec vous, je ne m'attendais pas à ce que vous en profitiez pour me retourner mes propres paroles contre moi, exprimai-je avec un soupçon d'amertume.

-Duncan, je ne comprends pas de quoi vous parlez, répondit-elle, visiblement surprise.

-Faut-il que je m'explique davantage ? Vous vous êtes confiée à ce Lokkju, le traitant de faible qui ne fait que pleurer pour sa femme et son enfant..., repris-je, laissant un voile de déception se glisser dans mes paroles.

Sieglinde écarquilla les yeux, semblant être prise au dépourvu par mes accusations. Elle attrapa ma main et me fixa intensément avec ses yeux bleus.

-Duncan, je peux vous jurer que je n'ai jamais évoqué votre passé sur Terre avec qui que ce soit, à l'exception de ma sœur Hilda. Mais je vous assure sur mon honneur qu'elle ne le répéterait jamais à quiconque d'autre.

- Alors comment Lokkju pouvait-il être au courant de tout cela ? demandai-je, perplexe.

-Lokkju ? Ce nom ne me dit rien. Est-il un Einherjar ?

-Non, il a prétendu être l'un des conseillers d'Odin... 

- Duncan, le père de tous n'a pas besoin de conseillers. Sa sagesse est incomparable, affirma-t-elle avec assurance.

Sieglinde semblait sincère. Regrettant ma méfiance injustifiée, je me rendais compte qu'elle avait été victime d'une machination orchestrée par cet individu. Pendant notre échange, Sieglinde écouta attentivement chaque détail que je lui fournissais sur Lokkju. Elle semblait déterminée à élucider cette énigme une fois de retour sur Asgard.

Après notre discussion, Sieglinde sembla abandonner son masque de femme froide et distante, suggérant tacitement que pendant quelques heures, nous pouvions mettre de côté le protocole. Elle exprima le désir de me faire visiter le village natal de sa mère. Étonnamment loquace, elle se mit à dévoiler des informations importantes.

Elle m'apprit que sa mère était une guérisseuse Alf, peut-être la plus brillante de son époque. Elle avait été remarquée par Odin au cours d'une campagne militaire contre des Jötnar renégats. Odin avait été admiratif de la bonté et de la gentillesse qu'elle avait manifestées envers les troupes, passant des heures voire des jours à les soigner après les combats. Finalement, le puissant Odin succomba au charme de la guérisseuse Alfe et en fit son amante. De leur union naquirent deux filles : Hilda et Sieglinde. Cependant, le destin fut cruel, leur mère périt lors d'une attaque de Dokkalfar. Par affection pour son ancienne amante, Odin accepta d'accueillir ses deux filles sur Asgard, les élevant pour en faire des Valkyries.

Lors de notre visite dans le village, Sieglinde partagea davantage d'anecdotes sur son enfance et sur la manière dont elle et sa sœur avaient été élevées sur Asgard. Alors que nous marchions dans le village, Sieglinde, semblaient imprégnées d'une aura mélancolique. Au fil de la visite, je ressentais un lien plus profond se tisser entre nous, transcendant les barrières du protocole et de la froideur initiale. La tragédie qui avait touché sa famille jetait une lumière différente sur la Valkyrie devant moi, ajoutant une nuance d'humanité à son image autrefois imposante.

- Duncan, je ressens une profonde tristesse pour vous, concernant votre femme et votre enfant. Vous n'avez pas eu l'occasion de leur dire au revoir, et je vois bien que cela vous pèse, exprima-t-elle avec empathie.

-Eh bien, avec le temps, je vais devenir tellement compétent que je pourrais même écrire "Comment Faire Son Deuil pour les Nuls" ! plaisantai-je, baissant les yeux pour cacher mes émotions.

-Duncan, vous êtes un homme de valeur. Je tiens à vous exprimer ma gratitude... Je vous ai sauvé la vie, mais vous avez également sauvé la mienne, continua-t-elle, sa voix empreinte de sincérité. "Duncan, voulez-vous que nous allions sur Midgard afin que vous puissiez dire un dernier adieu à votre femme et votre enfant ?


La proposition de Sieglinde me laissa d'abord sans voix, submergé par l'émotion à la simple idée de pouvoir revoir, ne serait-ce qu'une fois, ma femme et mon enfant. Mes yeux se remplirent de larmes, et dans un élan spontané, j'enlaçai Sieglinde dans mes bras, la remerciant pour cette offrande inestimable. L'idée de retrouver ma famille, même une dernière fois, était un baume pour mon cœur meurtri. L'offre généreuse de Sieglinde, empreinte de compassion, touchait une corde sensible en moi. Sa générosité dépassait mes attentes, et son empathie me bouleversait. C'était comme si elle avait compris la douleur silencieuse qui habitait mon âme depuis si longtemps.

Les amants du ValhallaWhere stories live. Discover now