Chapitre 33

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Je n'ai pas dormi de la nuit. Je n'ai fait que ressasser, ressasser et ressasser encore et toujours la même histoire. De temps en temps, j'essayais de capter un bruit provenant de la chambre d'à côté, mais rien. Je présume que Julius a réussi à dormir lui.

Aux premiers rayons du soleil et dès que j'ai entendu le chant du coq, je me suis relevé et je suis parti me promener dans le village.

Si les lieux me rappelaient tous quelque chose, il en allait de même pour les odeurs : L'odeur du pain frais émanant de la boulangerie ou encore cette odeur fleurie provenant des étals de fleurs sur les trottoirs...Il n'y avait pas tout ça en ville, j'avais oublié.

J'ai quitté le village, pour m'asseoir plus loin, dans un pré donnant sur une rivière voisine.

Je me suis assis là, dans l'herbe, arrachant les petites touffes une par une, comme par réflex et quand j'en eus marre des touffes d'herbe, je m'amusais à souffler sur tous les pissenlits croisant mon regard.

« - La nature ne t'a rien fait à ce que je sache. »

Julius, fervent défenseur des droits des pissenlits en danger.

« - Comment tu m'as retrouvé ? Tu m'as suivi ?

- On peut dire ça...Je peux ? »

Avant même que je ne l'autorise, il prend ses aises et s'assoit à mes côtés se plongeant dans un silence « Juliusien », parce que oui, ce genre de silence là, il n'y avait que lui qui en avait la maîtrise.

« -Tu sais, ça me stresse un peu.

- De quoi ?

- Le fait que tu viennes là et que tu ne dises pas un mot.

- Ah ? Pardon. Je pensais juste que tu voulais être dans le calme. »

Je le voulais, c'est bien pour ça que j'ai quitté la maison. Pour n'avoir ni l'un, ni l'autre dans les pattes aujourd'hui.

« - Tu n'as pas fait tout ce chemin juste pour me regarder décoiffer des pissenlits, non ?

- Non c'est vrai...

- Eh bien accouche alors. »

Il me fait les gros yeux comme pour me signifier que je le brusquais, mais je m'en foutais. Être ici, tout seul avec lui, ça me stressait. Ça me mettait mal à l'aise.

« - Je t'ai entendu hier soir avec Nathan...Et j'aimerais savoir ce qu'il y avait entre vous. »

J'y crois pas. Il a fait tout ce chemin, il m'a suivi et m'a stalké jusqu'ici pour avoir ce genre d'information ? Me ferait-il une crise de jalousie à sa façon ?

Je regarde le ciel pour essayer de trouver l'inspiration de la réponse, mais rien ne me vient. Moi-même je ne sais pas quelle est la nature exacte et profonde de ma relation avec Nathan. Je sais seulement qu'il avait raison...Nous ne sommes pas amis. Nous sommes bien plus que ça et dire « amants » serait abusé sur le terme, car nous ne le sommes pas non plus. C'est tellement plus compliqué que ça.

« - Disons seulement que malgré son caractère de ver de terre, Nathan est une personne qui m'ait précieuse. Je ne pourrais pas te donner une définition précise de notre relation, mais c'est vrai oui...Il y en a une.

- Ah... »

Il paraît presque déçu.

Je ne reconnais pas ce Julius là. Je ne le reconnais plus.

Au tout début, il semblait plein de charme, plein de confiance et d'assurance. Il semblait être de ceux qui n'abandonnent jamais et qui font tout, allant jusqu'à piquer les copains de leurs ex, juste pour les faire chier.

Au final, je me suis complètement gouré sur sa personne.

« - Tu fais une de ces têtes. T'es déçu ?

- Non, non...Ça me donne juste des idées. »

Là c'est moi qui le regarde avec un air interloqué et surpris. Des idées ? Quelles idées ?

« - Si c'est pour faire des cochonneries à trois, je passe mon tour. C'est trop pour moi.

- Qu'est-ce que t'en sais ? T'as déjà essayé ? Tu sais avant de porter un jugement sur quelque chose, il faut savoir si l'on aime ou pas. L'amour c'est comme les épinards Antoine, faut goûter !

- Ouais enfin tu fais une comparaison inappropriée de deux choses qui n'ont aucun rapport ensemble et je suis bien assez grand pour savoir ce que j'aime ou pas et je n'aime pas cette lueur qui brille dans tes yeux à l'idée que...Que...Toi...Moi et...Lui...Nous...Enfin...Voilà... »

Pourquoi perdais-je ainsi mes moyens ? Pourquoi une simple image de ce simple moment intime me met dans tous mes états ? Ce n'est que quand je l'entends éclater de rire que je comprends réellement le but de sa manœuvre.

Il se paie ma tête en fait.

« - J'ai pas marché, j'ai couru c'est ça ?

- C'est ça...Nathan pourra bien dire ce qu'il veut, on sait très bien que pour l'instant, la balle est dans mon camp. »

Là je reconnais son égo et sa confiance inébranlable. Il n'a donc pas froid aux yeux ?

« - Tu m'as l'air bien confiant sur le sujet, qu'est-ce que t'en sais ?

- J'ai la chambre d'à côté non ? »

Souffle-t-il dans un léger sourire amusé.

Je me recul brusquement de lui en essayant de me dire que ce n'est pas pour ce genre de chose que je lui ai laissé la chambre d'à côté, c'était surtout et principalement, car Nathan s'est jeté sur le canapé le premier. Qu'il soit à côté ou non, ça m'importait peu...Si vraiment j'étais si intéressé que ça...J'aurais franchi la première porte que j'aurai trouvée devant moi.

C'est tout.

« - Ah...Vous commencez à m'épuiser tous les deux dans votre concours de "c'est moi qui ai la plus grosse..."

- Parce que tu penses que ce n'est que ça ? Qu'un concours d'égo mal placé ?

- Tu vas me faire croire que ce n'est pas le cas ?

- Non...

- Alors, c'est pour quoi ? »

Il me dévisage comme totalement surpris que je ne sache pas déjà la réponse et je dois avouer que leur « haine » légendaire pour l'un comme l'autre a toujours été la source d'innombrables questions existentielles pour moi.

Alors il s'approche et me dit :

« - C'est pour toi que l'on se bat Antoine, tout simplement. »

Je l'ai déjà entendu quelque part celle-là étrangement.

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