Chapitre 48

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Je l'ai évité. Son contact. Ses yeux. Sa personne. Tout. Je l'ai évité complètement et du mieux que je le pouvais. À chaque fois qu'il m'apparaissait devant, je faisais demi-tour où je m'enfermais dans une pièce jusqu'à ce qu'il se lasse et qu'il s'en aille. Je ne voulais pas le voir. Je ne voulais pas lui parler. Je ne voulais, pour l'instant, rien à faire avec lui.

Et ça me faisait un mal de chien.

Chaque jour qui passait semblait l'atteindre et sa mine semblait dépérir. Il était comme cette fleur posait là, sur la table, que l'on voyait faner à vue d'œil.

Et j'ai mal pour lui.

C'est idiot comme comportement. Comme pensée. Comme sentiment.

Je veux dire, je ne suis pas fautif et je suis même en colère contre lui. Du moins, je suis censé l'être, mais je ne peux m'empêcher de prendre un malin plaisir à le blesser de la sorte. En vérité, je voulais lui faire ce mal-là. Je voulais le blesser comme ça, car c'était ma seule façon de l'avoir. De l'atteindre.

Je punissais Julius plus que je ne punissais Nina pour ce que j'avais entendu alors que j'avais bien plus de raisons de me méfier d'elle que de lui, mais Nina n'était pas celle avec qui je m'envoyais en l'air. Nina n'était pas celle qui m'avait dit, un soir, qu'elle m'aimait. Nina n'était pas celle qui m'avait fait croire à un possible « demain ».

Nina n'était pas Julius.

Je ne l'aimais pas comme je l'aimais lui.

Et au fond, ça m'attristait plus qu'autre chose.

« - Tu te caches encore dans ma chambre ?

- Désolé. Si je te fais chier, je peux aller ailleurs hein.

- Tu peux rester...Ça m'amuse vos petits jeux. »

L'espace de ces quelques jours, j'avais néanmoins pu trouver un certain réconfort auprès de Viviane. Elle s'était déclarée « neutre » dans cette histoire et tant mieux pour moi, car elle me cachait aussi souvent qu'il était possible de le faire. Parfois dans son armoire entre deux manteaux, parfois sous son lit avec la poussière.

Nathan lui servait de tampon. Des fois il me bloquait afin de laisser à Julius une chance de me parler, des fois, il me laissait filer. Je pense que c'était en fonction de son humeur du jour. Un peu comme s'il avait ses règles constamment. Après tout, au vu de la situation présente, Nathan était peut-être celui qui avait le plus à y gagner. Il suffirait pour lui de jouer la bonne carte au bon moment.

Pourtant, jamais il n'en profita.

Je pense qu'il a compris.

« - Je vais sortir me chercher à manger. Tu me dis si tu le vois passer dans le couloir hein !

- Oui, oui. »

Je sors en prenant grand soin de vérifier chaque recoin du couloir.

Pas de Julius à l'horizon. Tant mieux.

J'espère qu'il est en boule sur son lit et qu'il réfléchit à deux fois à ce qu'il m'a fait.

Je descends les escaliers et au même moment, une main m'agrippe et m'attire dans le placard à balai, refermant la porte immédiatement après m'avoir mis la main dessus. Avant même que je n'eus le temps de crier ou de faire quoi que ce soit, une main se posant sur mes lèvres.

« - Maintenant, tu vas m'écouter. »

Sa poigne se resserre sur mon poignet et son torse m'oppresse et me coince complètement contre le mur.

Je suis foutu.

« - Ça fait des jours qu'on joue à ce petit jeu Antoine et ça suffit. J'en ai marre de jouer, tu m'entends ? Tu ne m'as même pas laissé le temps de m'expliquer alors s'il faut te coincer dans un placard à balai à peine assez grand pour nous deux, très bien. Faisons-le. Après tout, ces derniers temps t'as tendance à te réfugier dans les recoins sombres de la maison non ? »

Je ne relèverais pas.

Je ne me sens pas à l'aise quand il me regarde ainsi. Je ne sais jamais à quoi il pense, ni même ce qu'il imagine. Il se contente de me regarder, de me fixer avec une telle intensité, que l'on croirait apercevoir les flammes de l'enfer au fond de ses yeux sombre. On aurait dit un incendie se déchaînant et ne demandant qu'à être éteint.

« - Ça me rend fou...Tu me rends fou. Tu crois vraiment que je vais lever la main sur toi ? Tu crois vraiment que je vais oser te faire ce genre de chose ? Tu crois que je vais obéir à Balthazar ? Au diable Balthazar et ses souhaits ! J'ai promis et j'ai déclaré que je te protégerais...Je le ferais. Je m'en fous du reste ! Tu te rends compte à quel point tu es précieux ? À quel point tu m'es précieux ? Est-ce que tu le sais ça ? Je suis devenu un bien mauvais sorcier et un médiocre petit soldat à cause de toi, mais je m'en fou, car je t'aime et ça...ça vaut toutes les engueulades, les réprimandes, les tortures et les morts du monde. Je m'en moque si je dois mourir pour toi, je le ferais. Je m'en moque s'il faut que je me sacrifie pour toi, je le ferais. Je ferais tout pour que tu vives, c'est compris ? Et s'il faut mentir pour te protéger, alors je le ferais sans hésiter. »

Et tandis que sa main se dégageait et que tout son corps et sa chaleur me quittaient, je me suis surpris à l'attraper violemment par le col de son tee-shirt, l'attirant à moi. L'attirant jusqu'à mes lèvres.

J'aurai envie de me faire pardonner. J'aurai envie de lui dire que je suis un idiot. Un abruti. Que je ne prends jamais le temps pour réfléchir et que beaucoup de choses me font défaut. Je suis impulsif, je le sais. J'aurais envie de lui dire que je l'aime et que ces derniers jours sans lui m'ont paru longs. Interminables. J'aurais envie de lui dire que je n'ai plus envie de revivre ce genre de chose. J'aurais envie de lui dire que la prochaine fois...

Que la prochaine fois, elle n'existera pas.

Je veux lui dire confiance.

Je dois lui faire confiance.

Je n'ai seulement pas encore l'habitude que quelqu'un s'occupe ainsi de moi.

« - Wow...C'était quoi ce baiser ?

- Un baiser d'excuse ?

- Ça c'était un « baiser d'excuse » ? Putain, on devrait se brouiller plus souvent alors !

- Hé ! »

Il éclate de rire tandis que ses mains viennent se faufiler sous ma chemise. Ses mains sont froides alors que tout son corps semble m'irradier tellement il est chaud.

« - Je ne vais pas te mentir, j'ai toujours rêvé de le faire dans un placard à balai.

- Sérieusement ?

- Un fantasme est un fantasme hein...

- D'accord. »

Il sourit et brusquement la porte du placard s'ouvre, nous dévoilant le visage contrarié de Viviane.

« - Ah non hein ! Depuis tout à l'heure je tiens tout le monde à distance de ce placard, mais si c'est pour vous envoyer en l'air...C'est dans la chambre. Oust ! Sortez de là, bande de cochons ! »

On se regarde à la fois terriblement gênés d'avoir été ainsi pris sur le fait, mais également morts de rire de par la situation, puis on finit par s'enfuit dans les étages supérieurs vers la chambre de Julius.

« - Je veux un autre baiser d'excuse »

Dit-il en me poussant contre le lit.

« - Je n'en fais qu'une fois.

- Dans ce cas...Je veux quelque chose d'autre pour t'excuser de ton ignoble et ingrat comportement.

- Qui a dit que tu le méritais ?

- Oh, mais je mérite tout...Je te mérite surtout toi. »

Il y a des phrases qui ne tombent jamais dans l'oreille d'un sourd.

Graal (BxB)Where stories live. Discover now