Chapitre 12: Visite impromptue

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Je mets deux jours avant de sortir de ma torpeur et de me décider à parler de Samuel à quelqu'un. J'ai beau expliquer vingt fois la soirée du gala, d'abord à Jim puis à Zora, ils ne semblent pas réellement comprendre ma réaction. Zora est celle qui est le plus malléable à la rigueur, elle veut bien le pister et découvrir ses habitudes. Essayer de découvrir qui j'étais, le faire répondre à mes questions.

Car, évidemment, je l'ai googlé et je n'ai rien appris sur lui, Jim a eu l'air de penser que j'étais idiote et m'a pris la tablette des mains pour chercher lui-même. Ça m'agace quand il fait cela ! Je me demande s'il faisait pareil avec sa femme et si comme moi, cela la rendait hystérique. Jim est spécialiste pour vérifier tout ce que l'on dit, même Jake l'a remarqué alors qu'il n'est pas rendu là tous les quatre matins. Là j'ai enfin un peu de repos car il s'est endormi sur l'un des transats de la véranda et m'a laissé seule avec la maudite tablette.

Je jette un coup d'œil à Mister Peanuts qui tient sa laisse dans sa gueule en manifestation évidente de ses envies et fais semblant de l'ignorer. J'ai beau essayer de me concentrer sur mes recherches je craque quand il pose sa tête sur mes genoux en me regardant avec ses yeux larmoyants. Ce chien est le meilleur négociateur au monde ! Je devrais dire à Sidney de l'embaucher.

— C'est ok, je t'emmène !

Jim émerge de sa sieste improvisée et sursaute.

— Tu pars où Emy ? ... Oh... excuse-moi, June.

Cela arrive souvent qu'il nous confonde, c'était déroutant au début mais avec le temps je ne relève plus. Aprés tout, malgré ce que pourrait en dire Ellis, mon psy, servir de rustine dans la vie de Jim est la meilleure chose qui me soit arrivée ces dernières années.

— J'emmène Mister Peanuts en balade.

— C'est lui qui me léchait les pieds ?

— Mais enfin qui d'autre veux-tu que ce soit ?

Il sourit et tapote le museau du chien qui bat instantanément de la queue en signe de satisfaction.

— J'étais en plein milieu d'un cauchemar, tu m'as sauvé.

J'affiche une moue contrite, il devait penser à l'incendie de leur maison secondaire, à la mort de sa femme et de sa fille. Cela arrive souvent, à chaque fois que nous approchons de la date anniversaire. Et les événements du Park Plazza ont dû raviver ses souvenirs.

— Je rêvais que j'étais obligé de manger une boîte entière de chocolat !

Ah ben non, on ne dirait pas.

Je rigole doucement, ils lui ont découvert du diabète il y a peu et pour lui voir une boîte de chocolat est un supplice de tantale.

Je remarque que ses joues ont pris des couleurs, je n'aurais peut-être pas dû le laisser faire sa sieste dans les transats, il va attraper un coup de chaud.
Ce n'est pas parce qu'il est en arrêt qu'il doit se relâcher. Une pauvre petite semaine de rien du tout et il sera de retour aux blocs.

Je prends en main la laisse du golden retriever et me dirige vers l'entrée.

— Sois raisonnable ! Je lance à Jim qui est déjà debout, la tête dans le réfrigérateur.

— Oui maman, je me sers un sprite zéro et je retourne agoniser dans le transat.

Quand je pense que ce transat m'a servi à moi de sas de décompression durant les longs mois de rééducations intenses, il est décidément témoin de nos mésaventures !

Mister Peanuts ne me laisse guère de temps pour réfléchir et sautille dès qu'il voit le portail s'ouvrir, je le laisse me guider comme il avait l'habitude de le faire avec Emy et ferme même les yeux cinq minutes pour appréhender le monde tel qu'elle devait le percevoir.
On se rend difficilement compte de la pénibilité de ce handicap je pense. Et encore, je suis en rase campagne, qu'est-ce que ce serait si j'étais dans Boston même !
Ça me fait penser que lorsqu'Ellis m'a donné son adresse, je me suis rendue compte que nous étions quasiment voisin, cela me semble opportun de lui souhaiter une bonne journée et pourquoi pas, lui raconter ce qu'il y a de nouveau ... non ?

Ps : je rentre bientôt (Terminé)Место, где живут истории. Откройте их для себя