Chapitre 3

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Disloqué

      La ruelle était calme ; malgré tout Thomas ne parvenait pas à dormir. Il avait froid, était mal installé et, comme il était éveillé, son cerveau ruminait. Les idées, les pensées négatives, il ressassait les évènements de ces dernières heures, se disant que personne ne le comprenait. C'était comme si chacun voulait le rabaisser, le piétiner. Pourquoi ? Quel était leur but ? Juste par pur plaisir ? Pour le voir échouer car tout semblait lui réussir... par jalousie ! Il avait bossé dur pour en arriver là où il était, il s'était sacrifié. Certes, ses parents l'aidaient à payer ses études, mais ses diplômes ! Il les avait décrochés à force de travail... Argh ! Les gens enviaient sans comprendre. Jamais il n'aurait cru cela possible de la part de ses proches.

       Un frisson le parcourut. L'habitacle était humide de buée et Thomas avait du mal à se réchauffer. Il mit le contact, poussa le chauffage à fond et laissa tourner le moteur un instant. La soufflerie répandit une douce chaleur. Ce qui ne résolvait pas le problème de la condensation. Il tourna la manivelle pour ouvrir un peu la fenêtre, et la buée se dissipa. Une fois le moteur coupé, il se contorsionna sur le siège passager, un bras tendu en arrière à la recherche d'un pull, rangé à la va-vite avec ses autres vêtements dans l'un des sacs de sport empilés à l'arrière, et en extirpa un sweat qu'il enfila. Aussitôt, un cocon réconfortant l'enveloppa. Ainsi emmitouflé, il ferma les paupières et réussit à somnoler quelques heures. 6h30 ! Jusqu'à ce que la rue s'anime. Les éboueurs s'agitaient, les gens partaient travailler. La ville s'éveillait. Il était peut-être temps pour lui de déguerpir. De toute façon, il ne réussirait plus à fermer l'œil.

      Il ouvrit la portière, sortit et s'étira. Bras au ciel, nuque endolorie dénouée par des petits mouvements circulaires, il bâilla et fit le tour de la voiture pour s'installer à la place du conducteur. Un tour de clé, et le moteur ronronna ; il embraya, pied sur la pédale de l'accélérateur et le véhicule s'élança vers la rue adjacente.

      Garé devant l'immeuble où se trouvait l'appartement qu'il avait occupé avec Manon, Tom réfléchissait, dressant une liste mentale de ce qu'il devait prendre et laisser. Pour le reste, il s'en moquait. Manon pouvait bien dire ou faire ce qu'elle voulait, il récupérerait ses affaires et se barrerait ensuite. Point !

        Il sortit de la voiture, trottina jusqu'à l'entrée et tapa le code sur le boîtier métallique. Dans un 'clic' électronique, la porte s'ouvrit et Thomas pénétra dans le hall. Les étages gr avis au pas de course, il s'arrêta au quatrième. Sur la droite, leur appartement. Il introduisit la clé dans la serrure et entreprit de la tourner... Rien à faire ! Sa jumelle devait se trouver de leur côté, dans le barillet. Impossible d'ouvrir de l'extérieur. Il était condamné à appeler Manon pour qu'elle lui ouvre. Les muscles de ses mâchoires se contractèrent et une bouffée de chaleur l'embrasa. L'appeler revenait à se placer en position de faiblesse et admettre qu'il avait besoin d'elle. La rage l'emporta. Son poing s'abattit contre la porte blindée. Encore, encore et encore.

     — Manon ! Ouvre, bordel !

      Un cliquetis métallique. Et la porte s'ouvrit brusquement sur Manon. Furieuse. Elle le fusillait du regard :

     — T'es complément cinglé !

     Le timbre de sa voix irrita Tom et la simple vision de sa silhouette dans l'embrasure l'énerva. Sans un bonjour, il fit irruption dans l'appartement, bousculant la jeune femme au passage d'un coup d'épaule.

    — Hé ! Tu pourrais t'excuser...

     Thomas ne répondit pas. Occupé à fouiller dans les tiroirs, il ne se souciait pas de Manon qui, les bras croisés, fulminait.

L'Amour, Par-delà le Temps (en cours de réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant