Chapitre 30

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Revanche

La condensation se dissipait sur le miroir, laissant une fine pellicule d'eau qui déformait le reflet de Thomas. Son visage ressemblait à présent à un masque de clown triste, une traînée liquide ruisselant au coin de l'œil. À l'image de ce double, la tristesse avait gagné le cœur de Tom. Il se sentait abandonné de tous. Les personnes qu'il aimait n'étaient plus que des ombres. Des silhouettes lointaines. Insignifiantes. Ne restait plus que des voix sur répondeur, des mots virulents sur un écran, balancés dans des texto, immatériels, virtuels. Inexistantes. Identiques à ce mot évanescent, maintenant disparu du miroir.

Il essuya la gouttelette sur la glace d'un geste rageur. Puis, s'habilla et regagna sa chambre.

Le crépuscule avait envahi la pièce, et maintenant, dans le jour déclinant et à la lumière crue du plafonnier, sa chambre lui paraissait minuscule, lugubre et inhospitalière, telle une prison se refermant sur lui.

Une boîte.

D'une impulsion du pied, il repoussa la porte, donna un coup de clé pour verrouiller la serrure et se tourna face au lit. Une lueur bleue clignotait entre le mur blanc et le matelas, créant une fissure lumineuse et étrange, comme sortie d'un film de la Pop culture.

Son portable était coincé derrière le lit.

Tom fit un pas et le parquet craqua sous son poids. Le bruit, pourtant anodin et léger, enfla, décuplé par le silence pesant qui régnait dans la maison vide. Il se sentit soudain perdu. Envahi une profonde solitude.

Nouveau coup au cœur !

Une fois arrivé près du lit, il s'y allongea sur le ventre, tendit une main jusqu'au coude pour récupérer son téléphone, puis bascula sur le dos et tint son mobile à bout de bras pour observer cet objet, inoffensif et inerte, endormi entre ses doigts. Il fut tenté d'appuyer sur le bouton pour sortir l'appareil de son sommeil et ainsi dévoiler les SMS qu'il dissimulait, mais à quoi bon se faire du mal puisqu'il en devinait le contenu insidieux. Il avait souffert des messages qu'il avait lus et, pourtant, il ne regrettait pas son geste. Ce coup de poing libérateur ! De toute façon, s'il voulait réussir et avancer, il devait faire des choix, des compromis et des coupes franches, même si cela signifiait s'isoler du monde. Ah ! Cette solitude adorée. Tout faire pour obtenir ce qu'il voulait car, s'il n'allait pas jusqu'au bout, il aurait l'impression de se renier. Travail et sacrifice. N'était-ce pas là le revers du succès ?

Réussir était la meilleure des revanches.

Ce jour viendrait.

Il s'étira pour poser le mobile sur la table de chevet et resta allongé, le regard flou, à contempler le plafond. La lumière émanant du lustre dessinait un gros soleil irradiant dans son champ de vision. Il cligna des paupières, les mains posées sur son abdomen qui montait et descendait au rythme de sa respiration. Fatigué, il cilla à nouveau des paupières et une larme s'échappa d'un de ses yeux irrités, charriée par le battement de cils. Il soupira. Putain ! Il était épuisé et n'arrivait même pas à trouver la force de se lever pour éteindre la lumière.

Un effort, bon sang...

Le sommier grinça alors qu'il se levait, et le bruit retomba. Le silence l'assomma. Sa gorge se serra et l'immense vide de la pièce fit écho en lui. Il glissa vers l'interrupteur, tentant de faire le moins de bruit possible dans ses déplacements sur le sol, dans l'espoir de ne pas faire grincer les lattes du parquet. Puis, chemin inverse, et il se rallongea, immobile, les yeux ouverts sur la nuit noire.

Que le temps était long, monotone. Presque figé. Il avait l'impression de faire du sur-place, de stagner. Pire de s'enfoncer dans la platitude et la médiocrité.

Ça n'allait pas assez vite !

Demain, il ferait en sorte que cela change !

Demain, il reprendrait les choses en mains et accélérer le court du temps.

L'excitation envahit son corps et l'impatience lui tordit le ventre. Il était pressé d'être à demain. 

L'Amour, Par-delà le Temps (en cours de réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant