Chapitre 10

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Stacy.

La sonnerie retentit, avertissant que nos deux heures de torture sont enfin terminées. Les chaises glissent en même temps au sol donnant naissance à un horrible bruit de grincement, et les élèves ne se font pas prier pour déguerpir aussi vite qu'ils le peuvent. Je fais de même et soupire un grand coup une fois dehors. Putain, je viens littéralement de perdre deux heures de ma vie ! Deux heures durant lesquelles j'aurais pu faire un tas de choses merde ! Tu sais quoi ça t'apprendra Stacy, la prochaine fois tu regarderas où tu mettras les pieds. Et puis tu ne forceras pas un mec que tu ne connais même pas à changer de tee shirt ! Non mais sérieux qu'est ce qui m'a pris ? Pour être honnête je n'en sais rien. Parfois j'agis sans réfléchir et c'est seulement avec le recul et après mûre réflexion que je me rends compte que ce que j'ai fait était vraiment inutile. De toute façon je n'ai plus de raison d'en parler, tout est désormais derrière moi. J'ai merdé, j'ai été punie. Point. Cette histoire appartient au passé à présent.

Je n'aime pas m'éterniser sur les choses. J'aime penser que ce qui est fait ne peut être changé, et que le plus important appartient à l'avenir. C'est plus facile à dire qu'à faire n'est-ce pas ? Je l'avoue, j'ai fais un tas de conneries durant ces dix-sept années d'existence. Certaines plus graves que d'autres, certaines plus difficiles à oublier...Le fait est qu'elles se sont toutes gravées sous ma peau. Certaines m'ont permis de devenir une meilleure version de moi-même, d'autres m'ont complètement anéantie. Si bien que parfois je n'ai plus l'impression de savoir qui je suis réellement. Elles m'ont fait douter, m'ont perturbée, m'ont chamboulée. Pire, elles m'ont ravagée.

Mais je continue de me dire que tout peut changer, qu'après la tempête peut naître un soleil éblouissant. Et à cet instant j'ai l'impression d'avoir trouvé ce soleil, en ma nouvelle bande d'amis. Pouvoir me dire que le pire est derrière moi, et qu'à présent un nouveau départ m'est offert. Cette sensation d'avoir toutes les cartes en main est l'une des plus belles. Aujourd'hui je suis heureuse. Et ce malgré cet incident d'hier matin qui je dois l'avouer m'a fait peur. J'ai vraiment cru avoir encore une fois tout gâché. Mais désormais je le sais, je le sens. Je viens de clôturer cette mauvaise période de ma vie, ce passé qui m'a hanté tant de fois mais qui est désormais derrière moi. Ce qui compte à présent c'est ce que je vais faire et de quelle manière surtout. J'espère juste ne pas commettre à nouveau ces innombrables erreurs qui pourraient m'être fatales.

Joyeuse, je sors mes écouteurs de mon sac, et ne ronchonne même pas en les voyant remplis de nœuds. Je prends le temps qu'il faut pour les démêler, assise sur un des escaliers qui mènent à la pelouse, et lorsque je relève le visage, je le vois. Quelques lycéens sont encore présents autour du bâtiment, mais c'est sur son corps que mes yeux sont rivés. Non il n'a pas la même démarche charismatique que Jack, et il n'a pas non plus la même carrure athlétique que Max et Gavin. Pourtant il détient cette allure intrigante et inhabituelle n'appartenant qu'à lui. Cette façon de marcher, la tête baissée, le dos courbé et les mains dans les poches. Ce manque d'expression sur son visage qui me laisse penser qu'il est mal dans sa peau ou probablement dépressif, sont des choses qui attisent ma curiosité. Peut-être car j'ai l'impression de me retrouver en lui, de retrouver cette Stacy brisée, anéantie par les aléas de la vie et par les erreurs qu'elle a commise. Je continue de le regarder s'éloigner et ne quitte à aucun moment son dos qui semble rétrécir de plus en plus, au fil des mètres qu'il parcourt. Peut-être que ce garçon est une version de moi, sans ce masque que je porte chaque jour. Une version de moi, dans laquelle le passé n'est pas quelque chose de révolu. Mais plutôt quelque chose d'omniprésent.

Durant le trajet qui mène jusqu'à chez moi, je m'amuse à marcher au rythme de la musique qui résonne dans mes oreilles. Je fais également bouger ma longue chevelure de chaque côté de mes épaules et n'hésite pas à tourner sur moi-même lorsque le refrain de Chasing fire par Lauv, se fait entendre pour la dixième fois. Le temps est beau aujourd'hui, le soleil éblouissant et peu commun à ce mois hivernal, est en adéquation au bonheur présent sur mon visage.

Insensible (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant