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Paris, France, automne 2176.

Axel Denoël fixait avec intensité l'orage s'abattant sur Paris. La danse de la pluie et le clapotis de l'eau avaient toujours un effet apaisant sur lui. Toutefois, en observant sa main, il constata qu'elle tremblait, cela annonçait l'imminence d'une crise.

La peur permanente dans laquelle il vivait depuis deux ans se manifestait de bien des manières. Le plus souvent, elle n'était qu'une ombre, une sorte de léger malaise ayant fait perdre toute saveur à la vie mais avec lequel il avait appris à composer. Cependant, elle pouvait certains jours exploser en violentes bouffées d'angoisses, capables de le terrasser des heures entières. Parfois, il se contentait d'attendre et de laisser passer la crise ; d'autres fois – comme aujourd'hui – il ne pouvait se le permettre

Pas question de s'effondrer devant son fils.

Avec toute la volonté dont il était capable, il alla jeter un coup d'œil dans la pièce adjacente. Lucas regardait des dessins animés sur l'écran holographique géant. Apercevant son père, le gamin lui fit un sourire. Denoël sourit en retour, avant de retourner dans la cuisine.

Dès le début de ses troubles, il avait été évident qu'il ne pourrait consulter un psychologue. Si cela s'ébruitait, il risquait d'être relevé de ses fonctions d'inspecteur de police, ce qui était hors de question. Il gérait donc lui-même sa maladie en se prescrivant sa propre pharmacopée à base de téquila.

Il sortit une bouteille du placard et se servit un shot qu'il avala d'un trait. Il recommença l'opération deux fois. L'apaisement éthylique immédiat lui permit de souffler un peu.

Les vacances ne lui réussissaient guère. Au boulot, au moins, il pouvait oublier sa terreur en focalisant son esprit sur le travail ; mais là...

Pour la plupart des gens, les congés servaient à se retrouver, quand lui ne cherchait qu'à se fuir.

S'il avait pu, il aurait bossé 365 jours par an ; mais, à huit ans, Lucas avait régulièrement besoin de vacances et de quitter New York pour visiter sa famille en France.

Denoël retourna à la fenêtre et tenta de se concentrer sur les gouttes d'eau. En vain. L'oisiveté, en le privant d'échappatoire mentale, l'obligeait à revenir malgré lui à l'affaire Kosloff, qui avait changé sa vie de manière irrémédiable.

Plongeant dans un songe éveillé, il vit les toits gris de la vieille capitale française se transformer pour devenir l'immense astroport de Séréna.

SÉRÉNA - WATTY AWARD 2019 WINNEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant