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Séréna avait tout de suite présenté un intérêt majeur pour l'humanité, car elle était immédiatement habitable. Pour s'y installer, inutile de construire de coûteux dômes de protection à l'atmosphère contrôlée ou de financer de ruineux plans de terraformation.

La colonisation du nouveau monde avait donc été extrêmement rapide, comparée à celles de Mars ou Titan, et avait donné naissance à une vraie métropole, pourvue de tout le confort moderne, tranchant de façon radicale avec les autres stations hors-Terre – sans parler des colonies scientifiques et minières de la Lune et de Pluton.

Les terres émergées étaient couvertes à 99 % d'une forêt tropicale, et seules quelques plaines demeuraient comme des exceptions écologiques. C'était sur l'une d'entre elles, située en bord de mer, qu'on avait bâti Séréna Ville en un temps record. La cité couvrait approximativement trois mille kilomètres carrés et abritait dix millions d'habitants.

Une agglomération moyenne selon les standards terrestres, mais extraordinaire pour un site interstellaire.

L'urbanisme s'était développé en partant de la zone côtière, où la première mission d'exploration avait installé sa base. Depuis ce point baptisé First place, les principales avenues se déployaient dans toutes les directions, reliées entre elles par de multiples rues parallèles.

Vue du ciel, la ville ressemblait à une toile d'araignée accrochée à la mer.

Séréna avait officiellement le statut de colonie spatiale, placée sous le contrôle de l'ONU, et se trouvait sous l'autorité d'un administrateur général nommé par les Nations Unies. Il était le garant de la sécurité et de l'intégrité de la planète, il contrôlait les forces armées stationnées sur place et veillait au respect de la loi.

La gestion courante de la municipalité était, quant à elle, dévolue à un maire élu.

Finalement, ce monde, pourtant fort lointain de la Terre, lui ressemblait beaucoup ; et lorsqu'Axel Denoël sortit par la porte arrière de l'hôtel pour se retrouver dans la ruelle où avait eu lieu l'assassinat, il se dit qu'il aurait aussi bien pu être à Manhattan.

Pour sa visite de la scène de crime, Denoël était accompagné de Lula, du commissaire principal Lewis Miller de la police de Séréna et de son adjoint à l'allure de grand dadais, un certain Alexis Lavoie.

De part et d'autre, on avait placé des rubans jaunes interdisant l'accès, et des sondes automatiques de surveillance de la taille d'une canette de bière survolaient la zone pour en garantir l'intégrité.

Denoël avança vers l'endroit où deux policiers en uniformes montaient la garde. Baissant la tête, il vit le pourtour d'un corps dessiné au sol à l'aide d'une bande autocollante verte. Puis, il observa alternativement le bitume et les immeubles alentour. La rue était longue et étroite, coincée entre deux buildings empêchant la lumière de pénétrer.

Personne ne devait jamais passer dans cette coursive isolée.

L'endroit idéal pour commettre un meurtre, songea l'inspecteur.

— C'est donc ici, commença l'inspecteur, que le propriétaire de l'hôtel a retrouvé le corps, alors qu'il sortait les poubelles de l'établissement, autour de 21H00. C'est bien cela ?

— Z'avez pas lu le dossier ? lui balança le commissaire avec animosité.

Eh bien, ça promet... pensa Denoël, sans se démonter pour autant.

— Je l'ai lu, en effet. Disons que je souhaite vérifier que ma mémoire ne me joue pas de tours.

Son interlocuteur grogna, avant de reprendre en maugréant :

SÉRÉNA - WATTY AWARD 2019 WINNERWhere stories live. Discover now