CHAPITRE 3

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- On a pas le choix, on doit accepter.

Les murmures de mes colocataires me parvinrent difficilement. Allongée dans mon lit, brûlante de fièvre et dans un état général plus qu'inquiétant, je tentais d'écouter leur conversation. Je ne savais plus où j'avais mal, tant mon corps tout entier avait l'air de brûler vif au dessus d'un bûcher. Mes membres étaient engourdis, et je ne me levais que pour les choses nécessaires : toilettes, douche, vomir. J'avais déjà perdu du poids alors que je n'avais pas mangé que depuis deux jours seulement, incapable d'ingérer quoique ce soit puisque de toute manière j'étais sûre de le rejeter l'instant d'après. Une toux affreuse s'était invitée, m'étouffant presque à chaque fois qu'elle me prenait et qu'elle m'empêchait de reprendre ma respiration. Je mourrais lentement, de plus en plus fatiguée, de moins en moins capable de sortir de ce fichu lit.

- Et si la mission était un échec, s'énerva Isabel, et qu'on ne pouvait pas revenir ici pour la récupérer ? T'y as pensé à ça ?

Un gros boum me fit sursauter. Livaï s'était sûrement énervé contre quelque chose. Il était le seul à agir ainsi lorsqu'il n'arrivait plus à gérer ses émotions négatives.

- Alors quoi ? On refuse et on la regarder mourir ? C'est ça que tu proposes ? Rétorqua mon époux, en essayant de maîtriser le volume de sa voix.
- Livaï, nous on te fais confiance. Si tu es certain de pouvoir rassembler l'argent nécessaire pour la soigner, alors on viendra avec toi, ajouta Furlan, bien plus calme que les deux autres.

Furlan avait ce tempérament doux et concilient, le cocktail parfait qui contrebalançait celui de Livaï, impulsif et sanguin. Il arrivait toujours à l'apaiser, à le conseiller avant qu'il ne prenne des décisions trop hâtives et il était certainement le seul que le noiraud écoutait attentivement avant chaque mission. Livaï avait beau être le meneur, malgré lui, il avait besoin de Furlan et de sa sagesse pour se canaliser. Même si ça ne fonctionnait pas à toujours, il plaçait en lui une confiance infaillible.

- Bien, on part dans une heure.

Je m'appuyais sur mon coude pour m'aider à me relever et m'assoir contre la tête de lit. Je fis une grimace lorsque la douleur qui irradiait mes muscles se raviva. Je n'arrivais pas bien à comprendre le sens de leur conversation. Où allaient-ils aller ? Ils parlaient comme s'ils devaient partir loin et me laisser seule alors qu'ils n'avaient jamais découchés pour les besoins d'une mission.

Livaï entra dans la chambre, et son regard empli de tristesse et d'inquiétude qu'il revêtait depuis deux jours déjà, se posa sur moi. Il referma la porte derrière son passage et prit place sur le bord du lit. Doucement, il enlaça ma main dans la sienne, là caressant du bout de son pouce.

- Belle... commença-t-il, j'ai trouvé le moyen de me faire pas mal d'argent.

Je souriais faiblement, épuisée par la maladie qui gagnait du terrain et acquiesçais silencieusement. Ses yeux se remplirent de larmes, et brillèrent sous les éclats de la lampe à huile qui éclairait les lieux.

- Je dois partir pour la capitale. Là bas je suis certain de pouvoir trouver un médecin qui viendra te soigner.

Je ne répondis pas tout de suite, abasourdie par la nouvelle. Une larme roula le long de ma joue, puis une autre et rapidement, une pluie d'eau salée recouvrit mes joues. Je ne voulais pas rester seule, j'étais effrayée à l'idée de mourir sans lui, sans eux.

- Non... murmurais-je, reste. C'est trop tard.

Son emprise autour de ma main se resserra et il enfouit sa tête contre ma poitrine. Malgré ma faiblesse, malgré la douleur que ce petit geste allait engendrer, je posais ma main sur sa tête et entremêla mes doigts avec ses cheveux.

BROKEN HEARTS Where stories live. Discover now