III - Les Noces Pourpres

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Réécrit. 

Il y avait ceux qui voyaient le mariage comme une union d'un amour éternel. La possibilité d'étendre et de sceller leur amour, de se rassurer pour l'avenir et s'assurer que le reste de leur vie, serait à deux et jamais seuls. Puis il y avait ceux pour qui le mariage était une punition, ceux qui se mariaient sans même connaître leur promis, ceux qui se mariaient par déni et non par envie. Qu'est-ce qu'un mariage ? Etait-ce primordial pour unir deux personnes ? Deux âmes amoureuses ne se quitteront jamais, coucher ses voeux sur du papier et s'offrir un bijou ne changerait rien au fait que si l'un devait être infidèle, il le serait, marié ou non. Cependant, les moeurs étaient ainsi et le mariage était vu comme un accomplissement avant de donner vie à un enfant, un héritier et fonder une famille.

Aeria faisait partie de ceux qui se voyaient punis en se mariant. Elle laissa les domestiques s'affairer autour d'elle, à la vêtir d'une sublime robe de mariée tandis qu'elle subissait simplement cette journée. On lui tirait les cheveux pour la coiffer d'un sublime chignon structuré décoré de perles blanches, laçait son corset avec ferveur ce qui martelait ses côtes, la maquillait pour lui donner bonne mine. Depuis une semaine, Aeria n'avait pas revu Natanaël. Elle n'avait même jamais entretenu une réelle conversation avec lui.

— Trounez la tête sur la gauche afin que nous puissions terminer de vous coiffer, Mademoiselle Belestel, demanda une domestique de sa douce voix.

Aeria tourna docilement la tête sur la droite, sans un mot, sans un sourire, éteinte. Elle fixa la cheminée sans braises, sans flammes, comme son coeur. Elle ne l'avait pas rallumée depuis ce soir là et ne comprenait toujours pas comment elle avait pu se retrouver sans cicatrices. Peut-être perdait-elle la tête, peut-être en avait-elle tout simplement rêvé.

— Et voilà, Mademoiselle, vous êtes fin prête pour épouser le roi des Landes. Je ne devrais pas vous demander cela mais... comment vous sentez-vous à cette idée ?

Aeria se regarda à travers le miroir, lequel était entouré d'un métal parfaitement travaillé. Elle passa ses mains sur la robe blanche décorée d'une dentelle brodée avec minutie formant de petites fleurs et autres arabesques fantaisies. Elle pencha la têt sur le côté, cet air triste ne quittant plus son visage angélique.

— Je...

Elle cligna plusieurs fois des paupières puis se força à étirer ses lèvres peintes d'un rouge pourpre en un sourire qu'elle voulait chaleureux mais peu radieux.

— Je suis très heureuse...

La domestique l'observa un instant, peu convaincue par ce sourire forcé.

— Bien... je vous laisse prendre du temps pour vous, souffla-t-elle emphatique.

Elle quitta les lieux bien rapidement. Aeria resta un long moment debout face au miroir puis s'occupa de caresser Flocon lorsque ce dernier vint se frotter à elle. Elle était obligée de le garder enfermé dans cette chambre, la demeure étant trop vaste, elle craignait de le perdre. Elle fut rejointe par sa mère rapidement, cette dernière s'émerveilla devant sa tenue hors de prix que le roi avait acheté pour elle. Aeria s'efforça de paraître enjouée, de sourire à sa mère et de partager sa joie, même si cela cachait en réalité, une profonde détresse. 

Elle n'avait jamais apprécié offrir son corps à tous ces hommes, elle n'avait jamais apprécié le fait de se faire violenter, de devoir assouvir leurs moindres désir même les plus obscurs, au point d'en vomir parfois, tant elle se sentait salie. Néanmoins, si elle s'infligeait tout cela, c'était pour ses parents, pour conserver leur amour. Elle avait toujours été seule, à partir du moment où elle n'eut plus le droit d'aller jouer avec ses amis. Que devait-elle faire ? Elle n'osait pas s'opposer à leur autorité, elle craignait de perdre leur amour, leur gratitude... c'était pourquoi, en ce jour de noces, elle se convainc que c'était le bon choix. Ainsi, elle ne serait plus soumise à tous ces hommes pervers et ses parents seraient forcés de l'aimer jusque'à la fin de leurs jours, puisque grâce à elle, ils seraient fortunés sans efforts.

L'Armure du dernier Dragon [INTÉGRALE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant