1 - VICTOR

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Un mardi de fin novembre :

Comme depuis toujours, j'avais tout calculé.

J'avais calculé combien de jours il me restait avant d'être libéré de ce fichu lycée de merde ainsi que le nombre de nanas que je me taperai. J'avais bûché sur la somme à laquelle me reviendrait ma petite affaire ainsi que le nombre de billets que j'alignerai pour payer le loyer de notre appartement minable à ma mère et moi.

Ouais j'avais tout calculé. Il faut reconnaître que c'était assez simple, il ne s'agissait que de vulgaires calculs et de pourcentages approximatifs, obtenus à partir de données que j'avais moi-même cherchées ou qui tout simplement étaient évidentes.

Bref, comme toujours, je gérais ! J'avais la situation bien en main.

Tout était calme. Malgré une stupide guerre amenée par les populaires contre notre groupe, Gabriel était occupé à roucouler avec Charline comme le plus grand des craignos au monde (un peu d'honnêteté ne tue pas). Cassie faisait la ronde des « je vais te casser la gueule » et Tom était l'élève de première le plus cool qu'aucune classe n'ait jamais connue (évidemment, il était shooté la plupart du temps).

Enfin... Dison que c'est ainsi que la fin de l'année aurait dû se passer. Du moins que c'était ainsi que je l'avais imaginée. Sauf que ce que je n'avais pas prévu, c'est qu'un petit connard de footballeur blessé dans son ego me dénonce au directeur du bahut. Ouais, je parle bien de Sohan Fontane alias l'ex débile de la barbie dérangée qui sert de copine à mon meilleur ami.

Parce que si à cela, mon super plan ne l'était plus et j'étais dans la bouse.

Je ne vous raconte même pas la galère lorsque je suis rentré chez moi et que ma mère, invalide depuis plus de cinq ans, m'a crié dessus en me disant que le directeur l'avait contactée pour un entretien me concernant. Tout de suite, malgré ma tentative de désamorçage de bombe, elle a commencé à dire qu'elle espérait que ce n'était pas encore une de mes conneries. Ouais parce qu'en ce qui concerne le trafic de drogue à petite échelle que j'entretiens au lycée, elle est au courant. Après tout, c'est ça qui paie notre loyer...

Bref, elle comme moi, on l'a compris dès l'appel du proviseur : c'était la merde.

Pourquoi ? Car mon salaud de père qui s'est cassé après avoir engrossé ma mère ne se montrerait pas plus que le jour où je suis né, ou bien le jour où ma mère s'est retrouvée paralysée. Alors évidemment que si ma petite affaire était découverte, c'était la catastrophe. Plus de revenu veut dire plus de logement. Et plus de logement veut dire une femme en fauteuil roulant à la rue.

Les petits bourges ne sont que des chieurs qui se plaignent la bouche pleine pendant que des clébards comme moi se trouent le cul à dénicher de l'argent pour ne pas avoir à récurer les poubelles pour bouffer.

Bon, bien évidemment, je n'avais pas décidé de dire cela au directeur. J'avais ma dignité tout de même...

Victor est un élève perturbateur madame Hark. C'est un élève provocateur qui joue avec les nerfs de nos professeurs, mais vous le savez déjà n'est-ce pas ? Et nous ne sommes pas ici pour parler de cela. Bien.

Je sens mon portable vibrer sous mes doigts. Ça doit être Gabriel qui, même s'il est en cours, me demande comment ça se passe. Ce matin, lorsqu'il est venu saluer ma mère, il a compris que je n'étais pas bien et même si j'ai tenté de le cacher, je me doute qu'il a compris que c'était la putain de merde...

Ma mère, dans son fauteuil roulant ne me regarde pas. Je sais à quel point ça la pèse d'être ici. Je sais à quel point elle a envie de me faire la morale, mais devant un proviseur, ça ne se fait pas. Et je dois reconnaître que pour une fois, je suis content d'être dans son bureau, ça repousse la tornade.

Les écorchés - Tome 2 : Seconde chanceWhere stories live. Discover now