11 part 2 - VICTOR

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Un mercredi de décembre :

A quatorze heures, tandis que je rentre de ma matinée de travail au bar-tabac (ouais, le patron m'a embauché. Il faut dire que je lui ai fidélisé trois clients en un seul après-midi), j'appelle ma mère, parce que cette histoire de tutorat me fait chier. Elle répond assez rapidement et alors que je zappe pour la troisième fois cette semaine de faire mes exercices de respiration pour une bonne guérison de mes cotes, je porte mon portable à l'oreille.

— Victor, comment vas-tu ? demande-t-elle aussitôt. Est-ce qu'il y a un soucis ? Une douleur ? Tu veux que Nicolas vienne ?

Je suis obligé de la stopper dans son énumération de possibles catastrophes :

— T'en fais pas, je prends mes médicaments, je reste à l'appartement et je me repose.

OK, ce n'est pas bien de mentir. Mais si je dis à ma mère que je profite de mon exclusion et de ma pseudo-période de repos post-accident pour travailler, elle va péter un câble.

— Et tu appelles pour ? m'interroge-t-elle en contre-partie.

J'aurais préféré ne pas y aller aussi franc jeu, mais elle ne me donne pas le choix :

— Tu m'as dit que le cours de tutorat de monsieur Cénal était extérieur aux démarches habituelles, n'est-ce pas ?

Je l'entends soupirer à l'autre bout du fils. Apparemment, je n'ai pas été assez délicat.

— Oui je le paie, si telle est ta question. Je pioche sur mon compte épargne pour permettre à mon fils bagarreur de ne pas prendre e retard dans son nouveau lycée afin qu'il puisse obtenir son baccalauréat.

Eh merde.

— Maman, soupiré-je à mon tour. Tu ne crois pas que tu devrais garder ton argent pour toi ?

— Tu es mon fils, et c'est comme si l'argent m'était destiné. Alors tu ne vas pas me faire croire que tu veux que je garde mon argent pour moi parce que je sais que c'est uniquement une technique pour que j'annule le rendez-vous de cet après-midi.

Parfois elle m'énerve de me connaître aussi bien.

***

Lorsque j'arrive au petit café où monsieur Cénal compte me donner son cours de tutorat, je suis en retard de dix minutes. Mais pour ma défense, ce n'est pas ma faute.

En effet, le bus que j'ai dû prendre était à la bourre à cause d'un accident entre une vieille et un cycliste. Apparemment la mémé traversait et le vélo ne voulant pas s'arrêter, a dévié sur le côté et a foncé dans une voiture. Résultat, c'était le bordel sur la route car deux véhicules se sont rentrés dedans. Bref, la vie de la circulation quoi.

Tandis qu'une musique d'ambiance pourrie passe en arrière fond du commerce, je commence à chercher un crane dégarni lorsque mes yeux se posent sur une chevelure rousse. Tout en fronçant les sourcils, j'avance vers la seule personne que je connais dans ce café :

— Poil de carotte ? Qu'est-ce que tu fous là ?

La rouquine pose son regard sur moi et je la vois carrément soupirer.

— Je m'appelle Perle et pas poil de carotte ! lâche-t-elle en me regardant comme si je ne savais pas qu'un plus un ça fait deux.

Les lèvres pincées, elle jette ensuite un coup d'œil à une pile de bouquins et le doute s'installe subitement dans mon esprit.

— Monsieur Cénal a eu un empêchement et m'a demandé de le remplacer pour ce premier cours de tutorat.

Bonté divine, c'est une blague ?

Les écorchés - Tome 2 : Seconde chanceWhere stories live. Discover now