4 - PERLE

77 19 5
                                    

Un lundi de décembre :

Le froid de l'hiver est là depuis un certain temps mais je sens que les vacances qui arrivent dans deux semaines seront pires encore. Je ne sais pas pourquoi, c'est comme si mon sixième sens parlait.

Je sais également que mes parents sont déçus depuis que Cédric Velázquez ne m'a pas fait auditionner. Ils voyaient tous deux un entretien dans ce dîner qui finalement n'était qu'amical. Déception et soulagement m'ont habitée cependant.

C'était un week-end presque comme tous les autres... J'ai travaillé le morceau de Bach, ce qui a bien failli faire perdre la tête à ma mère. Entendre ce morceau une journée toute entière doit être prenant, je le reconnais. J'ai travaillé ma danse durant des heures. J'ai fait ma dissertation de littérature à l'avance. Et le dimanche, je me suis ennuyée car je n'avais plus rien à faire, jusqu'à ce que l'on m'appelle dans l'après-midi pour me demander de donner des cours à un collégien.

J'ai d'abord songé à des cours élémentaires, puis lorsque j'ai réfléchi au fait que ce soit Hugues (mon professeur du conservatoire) qui me parle au téléphone, j'ai compris qu'il s'agissait plutôt de cours de violon. C'est ainsi que j'ai rajouté « donner des cours de violons à Matthieu » dans mon emploi du temps déjà largement rempli.

Ce qui est non négligeable, c'est que j'aurais cet élève pour le reste de l'année. Ça va me permettre de gagner en expérience. Je n'ai encore jamais donné de cours et je me doute que cela doit être un peu déstabilisant d'être le maître pour une fois.

Allez Perle, songé-je intérieurement, le week-end est fini alors on se concentre sur cette nouvelle semaine. Parce que le second trimestre débute dès aujourd'hui.

Le sac dans le dos, je trace en direction de mon bâtiment. Les couloirs sont bondés et je soupire en sachant que je vais me faire bousculer de partout. On n'a beau être dans un lycée privé, ça ne veut pas dire que les gens sont bien élevés pour autant.

J'arrive devant la porte du cours sans trop de bleus et découvre Anna. Mon amie est plongée dans son livre, les lunettes étant prêtes à déserter le bout de son nez. Je souris et me dirige vers elle. Anna ne remarque pas tout de suite ma présence puis elle lève soudainement la tête. Ses grands yeux bleu marine s'agrandissent un peu plus en me voyant et elle sourit. Elle referme son livre et je lève un sourcil en voyant le titre.

C'est le fameux roman de Tammara Webber : Easy. Je dis "fameux", car Anna m'en a parlé durant une éternité avant que ses parents acceptent de le lui acheter. Ce bouquin, je ne l'ai jamais lu. Mais j'en ai entendu parler car c'est un roman qui parle de viol.

Néanmoins, soyons honnête, ce livre se résume à un prénom dans la bouche des filles : Lucas. Comment pouvons-nous essayer de donner une autre image à ce roman que celle qu'elle a véritablement ? Jamais je ne lirai un truc pareil ! Je pourrais trouver plein d'écrits sur le viol sans pour autant devoir me formaliser d'un personnage « bad boy ».

Ce genre de personne, c'est comme les gothiques : mieux vaut les éviter ! On évite de nombreux ennuis ainsi.

Tu devrais vraiment le lire Perle, c'est super. Ils sont supers tous les deux.

Le regard d'Anna pétille et je lève les yeux au ciel. La voilà déjà sous le charme de ce Lucas. Pourquoi fallait-il que le roman soit traduit en français ? Cela aurait évité de nombreux cerveaux ramollis. Déjà, ça aurait limité le nombre de fans hystériques, puis ça leur aurait appris l'anglais à ces feignantes.

Je me cale contre le mur et regarde ma montre. Anna attrape son sac pour ranger son livre et je remarque une petite barrette avec strasse dans sa chevelure blonde. Je ne peux pas m'empêcher de trouver cela ringard. Pour ma part, un élastique fait l'affaire. Je ne m'embête pas avec tous ces trucs voyants.

Les écorchés - Tome 2 : Seconde chanceWhere stories live. Discover now