Chapitre 7

29 3 0
                                    

Hélios

Voir le visage d'Effy dès le réveil m'a mis de bonne humeur et ça m'a donné envie de traîner au lit. Son pseudo WhatsApp m'a offert l'accès à ses réseaux sociaux et notamment son profil Instagram qui par chance est en public. Toujours allongé sous ma couette je fais défiler le feed en me délectant de ce visage si agréable à regarder. Elle n'est pas le genre de fille à accumuler les selfies chargés de filtre. Il n'y a aucune photo où elle est seule en réalité. En revanche les clichés d'elle et d'Omar dans des tas de festivals inondent son profil. L'un d'entre eux montre un homme d'une vingtaine d'année qui a son bras enroulé autour des épaules d'Effy. Je n'aime pas ce type, il a une tête de connard.

Je continue de faire défiler les photos et tombe sur l'une d'entre elles où Effy est beaucoup plus jeune. Elle est accompagnée d'un homme et d'une femme qui d'après la ressemblance semble être ses parents. La date en dessous indique que la publication remonte de quatre ans en arrière. Á cette époque-là elle n'avait pas encore d'anneau dans le nez et son style sortait beaucoup moins de l'ordinaire. Dolorès met fin à ma séance de stalking en entrant dans ma chambre sans que je ne l'entende toquer.

-Votre Altesse le reste de la famille royale vous attend pour le déjeuner.

-De quelle humeur est mon père ? je demande en me levant.

Elle détourne les yeux, gênée face à ma nudité et ça me fait rire. J'enfile un caleçon mais elle n'ose toujours pas me faire face.

-Il... il n'a pas apprécié de ne pas vous voir au petit déjeuner, bredouille-t-elle.

-Il s'en remettra.

Je finis de m'habiller et sors de ma chambre avant que le Roi ne s'impatiente et fasse venir la cavalerie. Mais avant de quitter les lieux je prends le temps de déposer un baiser sur la joue de Dolorès qui se met à rougir .Cette femme m'appelle « Votre Altesse » comme si elle avait oublié l'époque où c'était elle qui me faisait faire mes devoirs et qui me préparait de bons gâteaux pour le goûter. Moi je ne l'ai pas oublié. Si ils veulent tous faire des courbettes et des révérences c'est leur problème. Je considère ces gens comme ma famille et ce ne sont pas les convenances qui m'empêcheront de les traiter comme tel.

*

En mettant les pieds dans le grand salon je découvre que tout le monde est déjà installé. Mon père en bout de table, ma mère à sa gauche, mon frère et sa femme à sa droite, et ma sœur à côté du siège vide qui m'attend entre elle et ma mère. J'embrasse cette dernière sur la joue tandis que Felipe me fusille du regard et que Fernando s'en délecte.

-Ça va mon chéri, tu as bien dormi ? me demande ma mère.

-Tu aurais pu nous faire l'honneur de ta présence au petit déjeuner, intervient Felipe avant que je ne puisse lui répondre.

-Hélios est très dévoué à la gente féminine du pays père. Son sacrifice lui cause une grande fatigue qui le pousse à rester de longues heures au lit.

Mais quel lèche-cul !

- Tu devrais essayer, l'une d'entre elles parviendrait peut-être à t'enlever le balai que tu as coincé dans le cul.

- Hélios ! me sermonne ma mère.

Je pique Fernando malgré le risque d'énerver davantage mon père. Mais voir le front de mon frère devenir rouge de colère n'a pas de prix. Sa femme fait mine d'être offusquée et Felipe ne me fusille plus seulement du regard, il vient d'activer le lance flamme. Heureusement ma petite sœur Éléonore a toujours le mot pour détendre l'atmosphère.

- Ça doit faire mal un balai dans les fesses, commente-t-elle innocemment.

Si mon père, Fernando et Diane reste impassible je remarque que ma mère se retient de rire. Rien de tel que le tact légendaire des enfants pour apaiser les tensions. Tout le monde reprend son calme lorsque le personnel entre dans la salle pour nous servir la multitude de plats qui ont été préparés uniquement pour nous six. Mon père récite le bénédicité et après avoir répondu « Amen » en chœur nous pouvons enfin commencer à manger.

-Est-ce que tu as prévu de nous faire l'honneur de ta présence ce soir Hélios ? m'interroge Felipe après avoir bu une gorgée de vin. La réception de ce soir est très importante, c'est elle qui donnera le ton des festivités de cet été. Il est indispensable de renvoyer l'image d'une famille unie, surtout en ce moment.

J'ai envie de lui répondre que plutôt que d'essayer d'en renvoyer l'image ce serait une bonne chose de faire en sorte d'en être une, mais je ne fais rien. Si je veux avoir une chance de revoir Effy sans qu'il ne me mette des bâtons dans les roues j'ai plutôt intérêt à lui faire plaisir.

- Oui je serai là, je réponds en croquant dans une pomme de terre.



La main de ma mère se pose discrètement sur ma jambe et lorsque je relève la tête je découvre qu'elle est en train de me sourire. Si la couronne a fait des hommes de Borbón des êtres froids et dénués de toutes émotions, heureusement pour moi la gente féminine semble avoir été épargnée.

Nos âmes tourmentéesWhere stories live. Discover now