Chapter 38

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J'ouvre mes yeux difficilement, j'ai l'impression que je me suis faite renverser une bonne vingtaine de fois. J'ai mal partout, et j'ai besoin de faire un effort surhumain pour respirer.

Mes paupières s'ouvrent peu à peu, mais cela ne change rien. Je suis dans une pièce très sombre, la fenêtre laisse passer un léger trait de lumière, comme s'ils y avaient des volets, mais qu'ils ne recouvraient pas toute la surface du verre.

J'ai l'impression d'avoir les yeux gonflés, ils me brulent. J'ai un torchon dans la bouche, mes mains et mes pieds sont attachés. Je suis assise par terre, sur un sol insalubre et je crois saigner au niveau du crâne.

Je ne sais pas si je suis chez les Cameron, mais si c'est le cas, je n'ai jamais vu cette pièce.

Cette salle est le contraire du mot chaleureux. Il fait froid et l'odeur prouve à quel point la poussière réside ici depuis beaucoup trop de temps.

Je tente de me détacher, mais en vain. Je tente de me lever, mais c'est encore pire.

Je suppose qu'il est aux alentours de midi, car le soleil paraît haut, au vu de la trajectoire qu'a le rayon à travers le carreau de la fenêtre.

Après de longues minutes, la porte s'ouvre délicatement en grinçant, et ma naïveté ne peut pas s'empêcher de croire que c'est un des Pogues qui vient me sauver, mais non, c'est Ward Cameron qui se tient devant moi, avec une chemise à carreau sale et un pantalon qui semble usé par le temps.

L'argent ne fait pas le style, visiblement.

Il m'apporte simplement un verre d'eau et un pauvre morceau de pain. Quelle ordure.

- Tu es réveillée. Ça me fait plaisir de te voir, dit-il en enlevant le torchon de ma bouche.
- Plaisir partagé, vous vous en doutez. Maintenant que je vous ai en face de moi, je sais que ma journée va être bonne.
- Tu n'en penses pas un mot, je le sais, et je m'en branle. Tu veux parler un peu ? Tu dois t'ennuyer seule ici, sans tes Pogues.
- Vous êtes trop mignon à vous soucier de moi comme ça, vous êtes un gentil dans le fond, j'en étais sûre.

Je ne sais pas pourquoi je me permets du lui parler de cette manière. Peut-être parce qu'à présent, je n'ai plus peur. Et tant mieux, cet homme se nourrit de la peur des gens, il serait bien trop heureux de voir qu'il m'effraie.

- Alors June, pose moi des questions.
- Mmmh, vous m'avez kidnappé pourquoi au juste ? Les raisons me sont un peu floues.
- Vois-tu, tu as embarqué mes trois gamins dans tes affaires de Pogues. Tu ruines la vie de ta mère alors que je l'apprécie grandement. Et puis, tu m'as mal parlé à la soirée, encore là tu me parles mal, j'aime qu'on me respecte.
- Pour ça ? Faut consulter.
- Ton petit numéro ne va pas durer bien longtemps crois moi. J'ai hâte de t'entendre hurler mon nom pour me supplier d'arrêter de te torturer. Mais là, j'ai plus important à faire, tu m'excuses.
- Oh non, je suis tellement déçue que vous ne restiez pas un peu plus avec moi, j'aime tant votre compagnie.

Il me fit un sourire mesquin, qui signifie « ne t'inquiète pas, j'aurais le dernier mot, et au fond de toi tu le sais ».

Je le sais, mais j'ai promis que je n'abandonnerais pas.

Je veux revoir mes amis.
Je veux revoir Rafe.

Il quitta la salle sans aucun regard, et claqua violemment la porte, ce qui fit tomber encore un peu de poussière.

J'aimerais tant savoir où je suis.

Je mange un peu de pain qu'il y a sur le plateau, puis bois l'eau du verre. Ma bouche était tellement pâteuse à cause de ce foutu torchon.

Je galère vraiment, mes mains sont encore attachées et elles me serrent énormément, tellement je commence à ressentir des fourmis dans les mains ainsi que dans les jambes.

Je ne veux pas lâcher, on est une équipe Rafe.

Nous deux contre le monde.

***

Les jours passèrent, je n'avais aucun repère du temps. Rien du tout. Ward venait me déposer à manger et à boire, le stricte minimum, puis repartait. C'était ça une fois par jour.

Mes articulations me font excessivement mal, je me sens compressée et j'ai la terrible impression que je deviens folle seule dans cette salle pourrie. Je m'occupe en comptant les toiles d'araignées ou a m'imaginer ce que je pourrais faire dehors, si je l'étais.

Je serais sûrement entrain de rigoler avec mes amis, ou bien entrain d'embrasser le garçon que j'aime.

Mais non, je suis entrain de scruter le plafond, ou le sol, comme si creuser un tunnel était une solution.

Les mains et les pieds attachés, tu en as d'autres des idées comme ça June ?

J'avais l'impression que mon cerveau allait exploser, j'en pouvais plus. J'avais affreusement faim et soif, et ce putain de verre d'eau était vide. Sous la colère je le pris et le jeta contre le mur à ma gauche. Le verre se brisa en mille morceaux, et cela ne va rien arranger à mon état de santé.

Bravo June, tu te mets des bâtons dans les roues toute seule comme une gran-.

Le verre.
Ces morceaux de verre.

Pendant un instant je me sens tellement stupide de ne pas y avoir pensé avant. J'essayai donc de ramper tant bien que mal vers le premier morceau de verre que je croise, puis le pris dans ma main droite et tentai de rompre ce fil qui sert de lien entre mes deux mains.

Une fois celles-ci séparaient l'une de l'autre, je poursuis avec mes pieds.

Ward Cameron est passé aujourd'hui déjà, et il ne passe jamais deux fois dans la journée, ce qui m'enlève du stress, j'ai moins peur qu'il me voit.

Lorsque mes pieds furent détachés à leur tour, je me levai et manquai de tomber par terre. Ces jours au sol avaient vraiment eu un impact sur mon équilibre et même sur ma manière de marcher, de me sentir.

Je m'approchai de la fenêtre et tentai de regarder dans le trou du volet pour me localiser, avoir une idée de l'endroit dans lequel je suis coincée depuis un bon moment déjà.

Mais je ne connaissais pas du tout cet endroit, je ne savais donc pas si, si j'arrivais à sortir, il faudrait que je cours 300 mètres ou trois kilomètres. Même si j'imagine davantage la deuxième option. Ward ne prendrait pas le risque de me mettre à côté de mes amis.

Le temps se fait si long, même si à présent je suis détachée, je ne sais quand même pas quoi faire. Je tente d'ouvrir la porte mais cette dernière est fermée à clé.

Il faut donc que j'attende que Cameron arrive, et que je parte en courant. Je prie intérieurement pour que ce séjour ici ne m'ait rien enlevé à mes capacités à courir très vite.

Bordel Rafe, sans tes mots d'encouragement j'y arrive beaucoup moins bien.

Rivaux // Rafe CameronWhere stories live. Discover now