Chapitre 32

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Elena



Le plat de mes chaussures à peine posé à l'accueil du grand bâtiment de recherche en astrophysique, qu'une sorte de puissance inconnue me fouette. L'odeur caractéristique de ce lieu chatouille mes narines. Un mélange de café, de vielle bâtisse, de matériaux en tout genre et d'une pointe de javel – dernier passage de la femme de ménage. J'inspire ce parfum en fermant les yeux. Une sensation familière m'étreint, un quelque chose d'authentique et de rassurant.

Lorsque je les rouvre, tous les détails se dessinent devant moi, mon regard accrochant chacun d'eux. Du modèle miniature de Mars Global Surveyor* – ou MGS pour les intimes –, aux géants poster des galaxies jumelles M81 et M82 appartenant à la constellation de la Grande Ourse. Puis celui d'Andromède, juste à côté. Quelques secondes de trop sur cette photo prise par Hubble provoquent une étincelle dans ma poitrine.

Boum

S'évanouissant aussitôt quand je cligne des yeux en m'approchant de l'agent de sécurité. Devant lui sont disposés les écrans qui surveillent chaque couloir du laboratoire, ainsi que des babioles en formes d'astronautes et une réplique exacte, en miniature, du rover Perseverance**.

Tiens, un nouvel agent ? Je ne l'avais jamais vu ici auparavant.

Il me salue d'un mouvement de tête, ni sourire, ni regard bienveillant. Il est froid et direct en s'adressant à moi.

— Bonjour. En quoi puis-je vous aider, mademoiselle ?

Non point déstabilisée par ce genre de comportement dont j'ai l'habitude, je serre la lanière de mon sac à dos de travail et dresse le menton.

— Bonjour. Premièrement, c'est madame. Je ne suis pas en détresse, merci. Deuxièmement, je travaille ici. Voici mon badge.

Je le lui tends sous son expression imperceptible. Quel gros arrogant. Il n'arrivera jamais à la cheville de Call.

Il vérifie ma carte de long en large. Comme si je ne ressemblais pas à ma photo ! Je hausse un sourcil, impatiente tandis qu'il me le redonne.

— Vous pouvez passer.

Je rêve ?

Je m'esclaffe en levant les yeux au ciel et pénètre le portique de sécurité qui ne bipe pas. Bien sûr qu'il ne bipe pas, c'est ma maison ici. Je suis chez moi.

N'est-ce pas ?

Je longe le long couloir du laboratoire, monte les escaliers jusqu'au premier étage, deux autres virages à droite. Il y a un étrange silence dans le bâtiment. Je glisse mes doigts sur les murs blancs, meublés de thèses diverses et variées accrochées. Mon regard caresse tous ces plot***, ces chiffres et ces courbes avec délice. Une certaine adrénaline s'empare de moi et mon sourire ne décroche plus de mon visage. Mes pas s'arrêtent devant la porte de notre salle de réunion. Mes joues s'échauffent et mon cœur tambourine lorsque je tombe sur l'écriteau juste à côté.

QuasarX.

Je n'ai jamais quitté mon job pendant presque... toute ma carrière ? Je crois n'avoir pris qu'une seule semaine de vacances en cinq de recherches au sein de la NASA. Ce fut même de force que j'ai dû les poser, car c'était à la suite du décès de mon grand-père. Ce satané Robinson.

Mais, ça y est. Je suis de retour.

La poitrine gonflée, je pousse sur les deux portes de la grande salle de réunion qu'on surnomme dans l'équipe « le carré noir » en référence au trou noir dont sont issu les quasars. La lumière m'éblouit d'abord avant qu'une dizaine de personnes se réunissent face à moi. Je reconnais immédiatement mon amie Angélique, ainsi que tous les autres chercheurs avec qui je bosse. Adam, Isaac, Pedro, Jasmine, Alex, Jason, Xiu et Nick. Tous se muent soudain dans un silence angoissant. Je remarque alors la banderole « Bon retour parmi les aliens, Elena ! ». Sous leur bouche bée et leur surprise, je devine qu'ils ne s'attendaient pas à me voir débarquer si tôt.

Les étoiles dans tes yeuxWhere stories live. Discover now