Un rendez-vous à l'aube

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Caedmon observe la jeune Sorcière se débattre contre l'eau gelée. Il ne bouge pas, vérifiant qu'elle ne meure pas. Il aurait beaucoup d'ennuis si elle succombait au froid, aux brûlures ou à la panique. Quand il la voit émerger, il plonge derrière un arbre, au loin, là où les rayons argentés de la lune ne peuvent trahir sa présence. Elle rampe hors de l'eau, jetant des regards effrayés derrière elle. Sûrement aux créatures étranges du fleuve. Il note qu'elle utilise tout de suite sa magie. Elle est sortie de là en moins de cinq minutes. Il s'attendait à ce qu'elle perde connaissance et qu'il doive l'extirper de la couche de glace, mais non, ce n'est pas nécessaire. 

Pas de temps à gaspiller pour lui. Il en a fini ici et il doit atteindre sa véritable destination avant que son rendez-vous ne soit annulé. Dans son dos, il entend soudainement un hurlement qui déchire l'arbre et fendrait les troncs des sapins de la forêt. De toute évidence, Nox n'est pas contente du tout. Un instant, son sang se glace. Il en frémit. Et puis, un sourire diverti s'installe sur ses lèvres mesquines. Les prochains jours s'annoncent intéressants si elle décide de se venger. Néanmoins, il espérerait qu'elle abandonne suite à cette nuit. Il a tout fait pour anéantir ses ardeurs, jusqu'à tenter effectivement de la tuer. En apparence. Dans l'idéal, Adaline arrêtera de se pencher sur son cas et aura trop peur pour l'espionner plus longtemps. C'est ce qu'il désire. C'est la raison pour laquelle il l'a poussée dans le fleuve. Mais, la brave et l'intrépide déléguée ne laissera pas tomber aussi facilement. Il en est exténué rien qu'en y pensant. 

Caedmon parcourt la forêt de bout en bout, repassant devant l'entrée principale. Les lourds battants sont toujours fermés, la terrasse est vide. Il lui reste deux heures environ avant que la sonnerie ne réveille tous les élèves. Son rendez-vous ne pouvait pas se libérer plus tôt, ou plus tard, et ils n'avaient pas d'autres choix que de se rencontrer à cette heure délicate. Il afficherait des cernes monstrueuses demain et ne cesserait de bâiller face aux cours ennuyeux de ses professeurs, mais le jeu en vaut la chandelle. Il file entre les arbres et s'assure que ses traces de pas s'effacent à son passage. Adaline ne pourra plus le suivre. Il arrive au lieu préétabli. Une silhouette mystérieuse l'attend, adossée à un tronc, un capuchon enfoncé sur sa tête. 

— Vous êtes en retard.

Cette voix...grinçante, plus glaciale que le lac, et pourtant un feu y brûle tout le temps. La silhouette n'ôte pas son capuchon et il ne cherche pas à s'approcher.

— J'ai failli partir. Ou craindre qu'un malheureux incident soit advenu.

— L'incident s'appelle Adaline Nox. Cette plaie me met des bâtons dans les roues depuis les premiers jours à Yezajia. Toujours à jouer aux plus intelligentes, à la plus maline. Elle a essayé de me pister ces deux dernières nuits. Je me suis dit que je lui donnerais une petite leçon.

— Qu'entendez-vous par là ?

— Je l'ai pratiquement noyée dans le fleuve. Ne vous inquiétez pas, elle ne me dénoncera pas. Elle ne détient aucune preuve et j'ai couvert mes traces. Steros n'apprendra jamais ce qu'il s'est produit cette nuit, ni les autres, et elle ne saura pas pour nos rendez-vous secrets. Je vous l'ai promis, après tout. 

La silhouette acquiesce lentement.

— Pourquoi vous pister ? 

— Elle est convaincue que j'ai décroché le clocher de l'école et que j'ai permis à Mabel d'ouvrir un portail au cœur de Yezajia, le soir de la bataille. Bien sûr qu'elle a compris... Compris que l'attaque a débuté de l'intérieur, que des forces travaillent activement pour aider Mabel. Elle recherche les suspects potentiels. Apparemment, elle aurait entendu de Steros que la chute du clocher résulte d'une volonté d'effrayer les élèves. Je la ferai taire.

La Dame de la MortDonde viven las historias. Descúbrelo ahora