- Chapitre 24 -

87 10 5
                                    


Je ne me sentais pas moi-même et je commençais à croire que tout ceci était une mauvaise idée. Je m'étais attaché les cheveux en une demi-queue de cheval, l'été les avait laissé pousser et je n'avais pas vraiment eu le temps de m'en occuper. Je portais un jean noir moulant, ma taille était soulignée par une ceinture, et j'avais rentré un t-shirt blanc dans mon pantalon. Par-dessus, le détail qui, selon mon meilleur ami, faisait toute la différence : une veste de cuir.

Andy m'avait assuré que ça m'allait comme un gant, sauf que je savais pertinemment que cet accoutrement, ce n'était pas moi. Je ne portais jamais ce type de vêtements beaucoup trop élaborés et sexy. Je préférai les choses simples, et si WillAnn avait les mêmes goûts que moi, j'essuierais un échec cuisant.

Je me mordis la lèvre en arrivant devant chez Rob et avant que je ne frappe, Andrew demanda :

— C'est toujours... petit Indien à oiseau de proie, ça pue du cul, fuyons ?

— Andy ! Tu ne crois pas que nous avons dépassé ce stade ?

— Salut !

Rob ouvrit la porte, certainement alerté par la discrétion légendaire d'Andy.

— Salut...

— Vous êtes en retard.

— Désolé, c'est ma faute... j'avais quelques petites choses à boucler avant de venir, m'excusai-je platement.

— Rien d'important, j'espère ?

La voix de Timothy me provoqua une ribambelle de frissons sur la colonne vertébrale. Je l'observai me foudroyer du regard.

— Non... rien d'important.

— Salut Andy ! s'exclama Rob. Alors, ce concours ?

— Oh m'en parle pas ! Je crois que je ne pourrais plus avaler de chocolat, après ça !

— Quand est-ce que ça aura lieu ?

— C'est ce week-end dans une grande salle réquisitionnée pour l'occasion. Il y aura des pâtissiers de tout le pays !

— Et y'a moyen de venir t'encourager ?

— Non, c'est un concours privé...

— Oh, c'est dommage.

Rob et Andrew continuèrent de s'échanger des banalités, alors que Timothy ne me lâchait pas des yeux. Je tentais d'emmagasiner le plus de souvenirs de lui. Mon cerveau photographiait chaque détail, comme ce grain de beauté près de son œil ou celui au bout de son nez. Mon attention fut happée par les anneaux d'argent autour de ses doigts délicats. Je voulais l'entendre parler pour graver en moi sa voix si rauque. Pour ne jamais l'oublier.

Je rêvais d'une soirée rien que tous les deux, à discuter de livres. J'aurais espéré qu'il m'ouvre à nouveau sa grande bibliothèque et que nous nous y enfermions pour le reste de notre vie, avec des coussins, des plaids et du café. J'aurais pu lire, la tête posée contre son épaule, dans un silence apaisant et le bruit de sa respiration rassurante. Je me serais senti comme dans un cocon, à l'abri et protégé. Je l'aurais écouté me raconter comment il avait donné naissance à Mark, de quelle manière il s'organisait pour écrire, et par quel procédé miraculeux les idées fleurissaient dans son esprit avant de s'échouer sur le papier. J'aurais également pu l'observer travailler durant des heures sur un fond de jazz, parce que sa seule présence suffisait à ce que je sois complet.

— Et toi, Noah ? Tu reprends les cours lundi ?

— Euh, oui !

— Tu as pu finir ton mémoire ?

L'Envol du PapillonWhere stories live. Discover now