- Chapitre 41 -

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Je ne pouvais attendre plus encore. J'avais attendu trois ans, et j'avais atteint ma limite en termes de patience. Je m'attablai donc derrière mon bureau, et sur du papier ivoire assez épais, je laissai mon stylo à encre noire en suspend. Je réfléchis de longues minutes à ce que je souhaitai écrire avant que je ne morde ma lèvre inférieure en traçant consciencieusement mes lettres :

« Par notre manière de penser et nos attitudes, nous construisons notre bonheur ou notre malheur. »

Je ne signai pas, exactement de la même manière que lui, et glissai ma feuille pliée en deux dans une enveloppe couleur crème sur laquelle je recopiai minutieusement son adresse pour la première fois. Je me levai en faisant grincer ma chaise sur le parquet noble et filai dans l'entrée pour attraper mon manteau et la laisse de Roquet. Celui-ci aboya depuis le salon et me rejoignit.

Dehors, la nuit tombait et le vent glacial mordait ma peau. J'avais ignoré les coups de téléphone de Rob pour mon anniversaire, ainsi que ceux de mes rares connaissances, des fans sur la boîte mail de Creat' The Begining ou encore ma voisine du premier qui m'avait déposé une boîte de chocolat devant la porte de mon appartement, malgré les années à me croiser sans que je ne daigne la saluer. Je crois qu'elle aimait beaucoup Noah, et qu'elle avait dû s'imaginer que si un charmant garçon comme lui s'était épris de moi, alors c'est que je devais valoir le coup. Voilà où en était ma vie. On jugeait de ma valeur sur l'attrait que les autres me portaient.

Je m'arrêtai au bureau de poste et achetai un carnet de timbres. Puis je léchai l'un d'eux avant de le coller sur l'enveloppe que je glissai dans la boîte en souriant. Mon avenir tenait à un fil, et pourtant je refusais de le voir se tarir. Noah avait ouvert une brèche. J'ignorais si c'était volontaire ou non, mais la chance ne m'ayant pas vraiment souri ces derniers temps, je m'y engouffrai avec tout l'espoir qui me portait encore sur mes jambes.

Je rentrai, Roquet à mes côtés trottinant gaiement. Lui aussi avait l'air d'avoir le cœur plus léger, il semblait presque sourire à travers tous ses poils.

J'avalai un plat industriel et me calai dans mon lit avec un livre, mon chien allongé à mes pieds. Lentement, mes paupières se firent plus lourdes, et je cédai au sommeil. Noah m'apparut dans un brouillard étouffant et opaque. Il était là, debout, dans mon salon, et me souriait. Je m'avançai vers lui et il glissa sa main contre ma joue.

Qu'est-ce qui te fait le plus peur ?

Que les autres me voient comme moi je les vois , répondis-je le souffle tremblant.

Ses lèvres s'étirèrent en un sourire et son regard fixa mes lèvres, avant qu'il se penche pour m'embrasser délicatement. Son baiser me donna la sensation des ailes d'un papillon qui m'effleuraient avec volupté. Sa peau était douce, sucrée. Je fermai les yeux et m'avançai vers lui pour en quémander un second, mais son index se posa sur ma bouche.

Ses yeux, qui sont les yeux d'un ange, savent pourtant sans y penser, éveiller le désir étrange, d'un immatériel baiser...

Une larme roula sur ma joue.

— Rimbaud... sanglotai-je.

— Tu m'as manqué.

— J'ai souffert de t'avoir laissé partir.

J'avais besoin d'apprendre... et avec toi, j'ai appris.

— N'ai-je plus aucune utilité à tes yeux que tu veuilles si promptement m'abandonner ? implorai-je en glissant mes mains sur sa taille.

— Tu n'as de valeur que celle que je veux te donner.

— Et quelle est-elle ?

— Tu es mon tout, mon éternel adoré.

L'Envol du PapillonTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang