- Chapitre 32 -

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 Je portai la valise de Rob jusqu'à l'étage, et Timothy la sienne. Il me suivit dans le long corridor, et j'ouvris les portes des différentes chambres en lui présentant celles qui étaient disponibles.

Tout à coup, il posa son bagage en cuir marron sur le tapis qui bordait le couloir et attrapa mon poignet pour m'obliger à lui faire face.

— Est-ce que tout va bien ? Tu ne me regardes pas dans les yeux...

J'observai mes chaussures qui laissaient des traces mouillées sur le sol, et dans lesquelles j'étais mal à l'aise.

— Oui, tout va bien. Viens ! Par ici, il y a une chambre pour deux, tu peux t'y installer avec Rob si tu préfères ne pas être seul...

Je déposai la valise de Rob près de la porte, et son bras s'enroula autour de ma taille, tandis que ses lèvres effleuraient ma gorge. Je réprimai un frisson.

— Je préférerais être avec toi...

— Je sais. Moi aussi, mais on va se faire remarquer... personne ne sait que nous sommes en couple, enfin... se serait plus plausible que tu restes seul, ou avec Rob.

Son bras lâcha ma taille et retomba le long de son corps.

— Comme tu voudras.

Il ne chercha pas à tergiverser et entra dans la première pièce libre, puis déposa sa valise sur le lit à baldaquin. Je tournai les talons et m'enfonçai dans le couloir jusqu'à ma propre chambre, et quand j'ouvris la porte, j'entendis ses pas me succéder.

J'avais le cœur lourd. Lourd de la moquerie qu'Andrew avait laissée s'abattre sur moi depuis la veille. Lourd de constater que notre amitié avait trop changé pour que nous puissions retrouver un semblant d'équilibre.

Je sentis ma lèvre inférieure trembler alors que mon regard se perdait par-delà la fenêtre, au-dessus des montagnes. Je baissai la tête sur le parquet vieilli et le bras de Timothy s'enroula de nouveau autour de ma taille.

— Parle-moi...

Je ravalai un sanglot et reniflai bruyamment. C'en était trop pour moi, pour mon hypersensibilité et mon cœur fragile.

Timothy me fit pivoter et je me jetai à son cou pour y nicher mon visage, honteux de céder ainsi à une émotivité adolescente. Ses mains caressèrent mon dos puis se posèrent sur mes hanches alors qu'il s'efforçait à me faire reculer afin de me regarder dans les yeux.

— Noah, qu'y a-t-il ?

Je reniflai faiblement.

— Je ne suis que l'objet de leurs railleries depuis que nous sommes arrivés...

— Comment ça ? Viens, raconte-moi...

Il m'entraîna jusqu'au lit ou nous nous installâmes côte à côte. Puis je me livrai avec beaucoup de passion et d'animosité. Je lui rapportai les reproches d'Harvey durant le trajet, leur plaisanterie lorsqu'ils s'étaient tous cachés pour m'effrayer hier soir, puis mes prises de bec avec Andrew, ma tentative d'éclaircir les choses, et mon plongeon dans l'eau glacée.

Ici, j'avais moins froid qu'à l'extérieur, mais mes lèvres étaient toujours bleues, et je frissonnai sous mes vêtements trempés. Ses traits suivirent mon récit avec attention, se froissant de temps à autre. Si jusqu'ici il avait su marquer la distance et rester impassible, je vis la colère voiler son visage. Lorsque j'eus terminé, il prit ma main dans la sienne et caressa ma joue du bout des doigts.

— Je vais te poser une question... réponds-moi avec sincérité, d'accord ?

— Oui...

— Est-ce que tu veux t'en aller ? Nous pouvons partir, là, tout de suite. Rien ne te retient ici, si ce n'est une amitié écorchée. Tu n'es pas contraint de subir tout ça... je peux te ramener. Nous pouvons quitter ce manoir, cette vaste blague, et rentrer à New York. Tu ne dois rien à personne, mon ange.

L'Envol du PapillonWhere stories live. Discover now