Double A.

44.

Paranoïaque.

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• Point de vu omniscient.

Les mois qui ont suivi étaient pas des crèmes du tout, clairement Ahmed avait presque vécu un enfer. Aminata pensait réellement qu'il pouvait l'abandonner, la laisser et ça n'importe quand alors pour remédier à ça, elle lui envoyait des messages tout le temps. Tout le temps. Et si jamais il n'y répondait pas elle l'appelait.. Et si encore là il n'y répondait pas il avait le droit à un interrogatoire. Pour elle, il était hors de question qu'il l'oublie, interdiction qu'elle quitte son esprit ne serait-ce qu'une seconde. Ahmed, lui, se disait que c'était sa faute, que s'il avait moins fait le con ça ne serait sûrement pas comme ça à l'heure d'aujourd'hui. Alors qu'est-ce que vous voulez qu'il fasse ? Il subissait en silence et j'avais mal pour lui en vérité. Elle n'avait aucune pitié, rien. Pour tout vous dire, je ne savais même pas si elle se rendait compte de ce qu'elle faisait. On aurait dit qu'elle agissait purement méchamment et sans aucun autre but.. Comme un monstre.

Un après-midi, un jeudi pour être dans la précision, les deux amoureux travaillaient comme chaque jour de la semaine. Mais par malheur ce jour là, Ahmed n'avait pas répondu au message de sa belle.. En vérité il n'avait pas vu, mais bon, vous vous imaginez sans doute qu'Aminata l'appela sans plus attendre dans l'optique de l'incendier.

- Ouais, soupira-t-il.
- Pourquoi tu réponds plus ?
- Je bosse Am' j'ai pas que ça à foutre sérieux tu te crois au collège ou quoi ?
- Bah et alors tu bosses ? Genre t'as pas deux secondes à répondre ? T'as pas le temps pour moi c'est ça en fait ? vociféra-t-elle.
- Est-ce que j'ai dit ça ? dit-t-il.

Un long silence plus ou moins gênant s'installa, jusqu'à ce qu'Aminata prenne la parole.

- Bref. Tu fais quoi ce soir ? Parce que j'tai envoyé un message t'as fait genre tu vesqui, dit-elle un peu agacée.
- *souffle* Je vais dormir tôt ce soir.
- Avec qui ?
- Avec mon lit putain tu veux que j'dorme avec qui ?!

- Je t'ai énervé là genre ?
- C'est tout t'as fini là ?
- Tu fais le nerveux avec moi là Ahmed ?
- Eh tu crois tu menaces qui là au juste toi ? demanda Ahmed les nerfs à bloc.
- Déjà jte menace pas donc reste tranquille avec ta bouche t'es fou toi.
- Aminata commence pas à faire la chaude au téléphone, arrête de prendre la confiance bêtement parce que j'suis gentil avec toi, lui dit-il sur les nerfs, tu crois j'suis ton pigeon ou quoi ? Ça y est stop tes crises toutes les cinq minutes redescend et reste tranquille crois pas j'suis ton chien aussi.
- Bah si t'es pas content fallait pas revenir moi j't'ai pas forcé, j'suis bien sans toi.
- Ah ouais ? demanda-t-il énervé.
- ...
- Bah souviens toi bien de c'que tu chantes là moi j'te le dit, lâcha Ahmed avant de raccrocher.

Machinalement, Ahmed ouvrit le tiroir à sa droite et en sorti un paquet de cigarettes déjà entamé. Rares étaient les fois où Ahmed fumait, mais quand c'était le cas c'est qu'il n'arrivait vraiment pas à décompresser. Là en l'occurrence c'était cette tension et cette pression quotidienne qui l'étouffait au plus haut point. Alors c'est étrange venant de lui, mais ces temps-ci il fumait presque tous les jours. Pourtant, la dernière fois qu'il y avait touché avant ça remontait à la mort de Sabri..

- Elle m'a pris pour son ptit pd ou quoi ?! Va t'faire foutre sur ma vie elle fait câbler celle-là, dit-il la cigarette en bouche.

De son côté Aminata avait repris son travail comme si de rien était, comme s'il ne c'était rien passé. Puis lorsqu'elle fut chez elle, accompagnée de ses copines, elle leur raconta ce qui se passait en s'attendant à ce qu'elles soient de son côté. Ce qui n'était absolument pas le cas du tout.. Mais alors vraiment pas.

Safouah - Et t'es fière de toi genre ?
Salouah - Franchement Amy t'abuses.
Assa - La vie d'ma mère c'est c'que j'allais dire, rajouta-t-elle.
Safouah - Eh mais j'ai pas les mots, il est gentil, il bronche pas ni rien et toi t'es comme ça ?
- Mais vous avez vu comment il m'parle aussi ? demanda-t-elle, choquée.
Assa - Estime toi heureuse qu'il te parle déjà.
Safouah - J'ai juré.
Salouah - Tu m'étonne qu'il s'énerve sur toi t'as vu comment t'es avec lui ?
Assa - En plus c'est toi qui a chauffé en première normal il réplique.
- Donc en gros là, j'ai été trop loin ?
Assa - Demain il te dit pareil que toi, en mode ouais j'ai pas besoin d'toi gneugneugneu en gros dégage, tu vas dire quoi ?
Safouah - Elle va dire ouais j'avais raison il est parti wesh.
Salouah - Alors que c'est elle-même qui l'a fait partir.
Assa - C'est ça que tu veux en fait ? Qu'il s'en aille ? Parce que c'est soit t'es avec tu pardonne soit tu lui fait vivre l'enfer mais vous êtes libre quoi..
Salouah - Assa c'est toi qui dit ça ? La go qui a rabâché pendant x temps à son mec qu'il l'avait trompé ?
Assa - Mais j'ai regretté ! Il était grave mal à cause de ça ! T'es fou toi quand tu vois la personne que t'aime aller mal ça tue !
- Nan c'est pas c'que j'veux mais aussi..
Safouah - Mais aussi quoi Amy ? Sérieux regarde c'que tu lui fais, tu trouves ça normal ?
Salouah - C'est vrai il a déconné mais moi je perds ma sœur j'serais capable de divorcer tellement j'serais au bout d'ma vie..
Safouah - Grave, toi c'est la même avec Assa, nie pas non plus. T'as vu la complicité de malade qu'ils avaient ? Puis vu son histoire aussi..
Assa - Trouvez-vous un mari déjà, la seule qui peut parler divorce ici c'est moi, dit-elle en montrant son alliance avec fierté.
- Tchip.
Safouah - Tchip.
Salouah - Tchip.
Assa - Vous avez pas d'âme. Sombres connasses que vous êtes.

Aminata passa la soirée avec ses amies, à rire, parler, se raconter des histoires.. Cependant son esprit était ailleurs. Oui en effet elle était préoccupée, les filles l'avaient remarqué, mais c'était pour son bien.. Il fallait qu'elle se remette en question. Comme l'avait dit Assa, soit on pardonne on en parle plus et dans ce cas là, l'étiquette de couple est envisageable, soit on oubli rien et on le fait savoir toute sa vie, et ça, en couple c'est juste impossible. À quoi bon s'empoisonner l'existence ? On ne vit qu'une fois et en un rien de temps tout est tellement possible qu'il est probable que l'un d'eux meurt. Tout de suite, dans une seconde, dans une minute, dans une heure, dans une semaine, dans un mois, dans un an.. Ou peut-être même demain.

Franchement, qui sait ?

Tout ce qui est mauvais durci le cœur et attise la haine, s'en suit la vengeance et tout son tintouin.. Tout ça n'est qu'une stupide perte de temps si vivre la seconde d'après n'est pas certain. Alors à quoi bon avoir le cœur noir ? Vouloir faire souffrir untel pour lui rendre la monnaie de sa pièce ? De toute façon rendre le mal par le mal n'a jamais servi à personne.. Si t'as fait du mal il te sera rendu. Autant de fois que t'en fera d'ailleurs parce que tout se paye et tout le monde le sait. Mais ici bas tout se perpétue, on en voit plus vraiment la fin.. Tout recommence comme un manège qu'on connaît par cœur. Mais est-ce que ce serait pas à nous de faire en sorte qu'il soit différent ? Parce que peut-être qu'être acteur de sa vie c'est faire en sorte qu'elle nous plaise par tous les moyens..

On dit que dans la vie rien est impossible si on s'en donne les moyens. Le faible abandonne, le fort tente. Le faible pense que c'est impossible, qu'il n'y arrivera pas alors que le fort y croira, coûte que coûte il essaiera.. De toute façon, sans se casser la gueule on apprendra jamais rien. Dans la vie c'est très simple, tout est question de choix. T'avances ou tu bloques, tu décides ou tu subis. D'ailleurs il suffit d'un seul mauvais choix et ça change toute la donne. Mais on dira que c'est rien, que tout est relatif et qu'on finira par s'y faire. Alors il y a ceux qui ne cessent d'abandonner et ceux qui ne cessent d'essayer, ceux qui finiront par essayer et ceux qui à force d'essayer, finiront par abandonner..