L'anonymat, ou des fois il vaut mieux éviter de se faire remarquer...

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Il se rinça tant bien que mal à l'eau de mer, se leva, passa par dessus le muret qui séparait le ponton de la ville et, désorienté, regarda autour de lui l'agitation de la vie quotidienne

On lui jetait des regards appuyés. Il avait oublié qu'il ne portait qu'un pantalon de lin, ce qui exposait sa musculature, ses tatouages et ses cicatrices à la vue de tous, le dénonçant immédiatement comme un paria. De plus, il marchait pieds nus.

Il serra les dents et regretta sa tenue de Capitaine. Elle aussi le désignait comme pirate, mais au moins elle lui octroyait un certain style.

En attendant, il avait intérêt à trouver un moyen pour ne pas se faire remarquer.

Sa mâchoire faillit se décrocher lorsqu'il découvrit plusieurs affiches placardées à la hâte, portant son visage souriant narquoisement, et son nom en grosses lettres, avec une promesse de récompense pour quiconque aurait une information utile à la capture du sanguinaire Capitaine Pirate.

Il grimaça : Il savait que sa tête avait été mise à prix, mais il n'était jamais tombé sur des affiches de lui-même.

Baissant la tête et enfouissant ses mains dans ses poches, il marcha sans se presser pour ne pas se faire suspecter et se glissa dans les ruelles en priant pour ne pas tomber sur des gardes en patrouille, jusqu'à ce qu'il atteigne une impasse déserte et sordide.

Il attendit une heure avant de trouver ce qu'il cherchait : un badaud habillé de manière passe-partout, désarmé, et qui sifflotait en flânant. Personne d'autre en vue en ce début de mâtinée.

D'un geste vif, James passa un bras autour de son cou et le fit rapidement reculer. L'homme essaya de crier mais le Capitaine Pirate raffermit sa prise sur sa gorge.

« Écoute, je suis pas d'humeur. J'ai besoin de fringues et de fric. Si tu coopères pas je les prends sur ta dépouille, c'est clair ? »

L'homme ne pouvait pas bouger, et James prit son silence comme un acquiescement.

« Bieeeeen... »

Il le poussa vers le mur de l'impasse, fit rouler ses épaules et laissa pointer un sourire plein de folie, en essayant de reproduire celui de l'affiche. Le badaud le regarda sans comprendre, paniqué et interdit devant sa grimace.

« - Grouille! » rugit Crow, perdant patience et agacé que son stratagème d'intimidation ait si peu de succès.

À chaque seconde qu'il perdait, il courait le risque d'être rattrapé.

L'homme entreprit fébrilement de se dévêtir, ne gardant que son dessous.

James pointa ce dernier en ricanant :

« T'as de la chance que je te laisse ça ! Allez, dégage où je te BOUFFE ! »

Sa pauvre victime sursauta, et, heureuse de s'en tirer à si bon compte, fila à toutes jambes.

James revêtit rapidement le gilet, le frac et la culotte en grimaçant, et retourna ses poches où il trouva quelques pièces, puis il rejoignit les quartiers plus fréquentés et se fondit dans la foule. Il puisa de l'eau dans un puit et se désaltéra longuement avant de chasser la crasse de ses cheveux et de son visage.

Il entra ensuite dans une taverne où il dépensa la majeur partie de ses pièces en nourriture dont il se délécta, puis il sortit, revigoré, et s'étira : désormais, il fallait retrouver Léonore, si elle avait réussi à s'enfuir.

Le tout était de ne pas se faire reconnaître, et avec ces affiches de lui partout, ça risquait d'être compliqué. Il se composa un air snob, acheta avec ce qui lui restait une canne bon marché et un couvre-chef et s'en fût d'un pas royal.

Il traîna un instant autour du château mais un garde le chassa, alors il parcourut la ville de long en large en espérant la croiser.

Se rendant à l'évidence après plusieurs heures de recherches en vain, il traîna le long du port en contemplant avec envie les navires qui y mouillaient.


C'est alors que son cœur fit un tripe salto arrière dans sa poitrine.

Blue WaveWhere stories live. Discover now