XXXIV. Sauver le damoiseau en détresse

3.1K 310 9
                                    

La vie n'est jamais aussi simple qu'elle n'y paraît. Il faut toujours qu'à un moment donné, il y ait quelque chose, un incident ou autre, qui vienne forcément tout gâcher ou qui vous amène à revoir votre façon de penser.

En fréquentant Nick, je savais d'avance, comme si c'était écrit dans une sorte de destinée, que rien ne serait « normal ». Ma petite routine n'allait être qu'un enchaînement de catastrophes et de choses incompréhensibles. Je veux dire, tout son monde m'est inconnu et étrange. Pourtant, j'ai l'impression de m'y sentir comme un poisson dans l'eau. Je ne sais pas si c'est Nick qui me facilite grandement les choses en m'épargnant toutes sortes de détails et le récit de sa vie ou pas, mais je me sens comme... en sécurité.

Ce qui visiblement n'est pas son cas en soirée. Rien qu'à voir son visage se décomposer à chaque fois qu'une demoiselle l'approche.

« C'est une conversation que l'on reprendra Élisabeth. Je veux en savoir plus.

— Où est-ce que tu vas ?

— Sauver un damoiseau en détresse ! »

Parce qu'il me fait pitié à être dans son petit coin, complètement acculé, dos au mur et bras en l'air.

« Excusez-moi mesdemoiselles, mais je crains fort que ce jeune homme soit déjà pris.

— Quoi ? Oh non ! »

J'attrape le bras de Nick et l'attire plus loin, sur une terrasse extérieure loin des regards indiscrets et des oreilles tendues tandis qu'il s'assoit sur les quelques marches menant à la salle.

« Tu viens de me sauver la vie.

— Je sais. Mais ne pense pas que je viens de le faire par pure bonté. Ça sera cher payé.

— Oh ? Et on parle de quels genres de rémunérations au juste ? Carte bleue ? Chèque ? Espèce ?

— Plutôt nature.

— Ahaha ! Tobias tu es un monstre.

— La faute à qui ? »

Il y a quelques mois de ça, si on m'avait dit que je me rapprocherais de Nick, je ne l'aurai pas cru. Il était sans doute la dernière personne sur Terre à qui j'aurai voulu avoir à faire. Sa réputation le précède et c'est toujours le cas.

« Je devrais y retourner. Ta sœur doit m'attendre.

— Tu vas vraiment jouer à son petit jeu ?

— Pourquoi pas ? Tu m'as formé pour ces choses-là, non ?

— Entre autres... ça et d'autre, mais là, tu vois, j'aimerais que tu passes plus de temps avec moi.

— Désolé ! Mais j'ai été chaudement recommandé pour m'occuper d'une demoiselle. Et puis vous savez mon brave, par les temps qui courent, si vous voulez emprunter de mon temps... il faut me payer d'avance. Le temps, c'est de l'argent !

— Ta requête ne tombe pas dans les oreilles d'un sourd Tobias. »

Il attrape alors ma chemise, m'attire à sa hauteur et m'embrasse avec une passion dévorante qui réveillerait mes démons intérieurs.

« Je doute que ma chère sœur sache faire ça aussi bien que moi.

— Ah oui ? Je pourrais tenter le diable juste pour avoir un élément de comparaison.

— Tu n'oserais pas !

— Que tu crois ! »

Je l'abandonne alors avec sa mine interloquée en le laissant imaginer que je pourrais embrasser sa sœur. Bien sûr que non, c'est d'une évidence même ! Il n'y a que Nick qui peut allumer un feu en moi. Il n'y a que les mots de Nick qui peuvent me faire sentir bien. Mon monde ne tourne qu'avec son monde comme deux pièces d'engrenages dépendantes l'une de l'autre.

Mais je ne cache pas que ça m'amuse. Le voir ainsi surpris m'amuse. Beaucoup trop.

C'est pour cela que je dois savoir le fin mot de cette histoire. Je dois savoir ce qu'il en est et pourquoi un enfant comme lui est ainsi haï. Il n'est rien ni personne et pourtant, il mérite tout.

Je retrouve donc Élisabeth dans la salle, poings sur les hanches, joues gonflées et regard noir.

« Je peux savoir où est-ce que tu étais ?

— Faire ma bonne action du jour.

— Tu me rends ridicule en m'abandonnant de la sorte. Ton comportement m'humilie devant beaucoup de gens.

— Vas-tu me faire un caprice ? J'ai accepté de venir parce que nous avions un accord.

— Et cet accord ne tient qu'à moi. Si tu ne respectes pas ta part du marché en restant avec moi, alors je ne vois pas pourquoi j'annulerais le contrat. Encore moins si c'est pour aller batifoler avec Nick.

— Serais-tu jalouse par hasard ? Parce qu'il a quelqu'un qui l'aime pour qui il est...

— Jalouse de Nick ? Et puis quoi encore ? »

Ça sent la jalousie à plein nez pour moi.

Parce que justement Nick, même seul, ne l'a jamais vraiment été. Il a eu Rachel et puis certainement d'autres l'entourant aussi. Il est plutôt populaire le petit, d'ailleurs, je devrais m'en méfier de cette « popularité », car je ne me donne pas autant de mal pour qu'on vienne me le piquer sous mon nez.

« Parle-moi de ta mère Élisabeth. Pourquoi elle n'aime pas Nick ?

— Tu sais que nous ne sommes pas liés par le sang ? On n'est pas vraiment "frères et sœurs".

— Ça, je sais.

— Nick est le vrai fils de papa, pas nous. S'il devait se passer quoique ce soit, c'est Nick qui hériterait de tout... Zack et Marley n'auraient rien du tout.

— Et toi ?

— Je fais qu'écouter aux portes et faire ce que l'on me dit de faire. »

J'appelle ça faire l'autruche moi.

« Donc c'est juste une stupide guerre d'héritage.

— Stupide pour toi, mais on parle d'une fortune considérable et de plusieurs biens. Je ne sais pas si Nick est intéressé par tout ça, mais le jour où maman comprendra que la course est lancée... Alors les choses ne feront que se compliquer. Pour tout le monde. Elle a déjà réussi à chasser la mère de Nick.

— Comment ça ?

— Il y a des choses que tu ne sais pas encore Tobias. Des choses que personne ne sait, sauf cette famille. Mais tu sais, il y a des secrets qui ne méritent pas d'être dévoilés. Ils feront alors plus de mal qu'autre chose. Je suis fatiguée maintenant, rentrons. »

Il y a tout un tas de choses que je ne sais pas et que j'ignore totalement. Je débarque comme un cheveu sur la soupe dans cet univers de dingues ou se lie folie, complot et course à l'héritage comme dans un mauvais roman policier, mais s'il y a bien une chose que j'ai retenue ce soir, c'est que j'ai enfin trouvé qui est la source du problème.

Et quand on sait ça, on sait ce qu'il nous reste à faire : l'éliminer.

Je me rappelle qu'un de mes profs à l'école avait pour phrase fétiche : « Il n'y a pas de problèmes, mais que des solutions ! ». Je ne sais pas à qui il a piqué ça, mais je vais lui piquer à mon tour.

Maintenant, il ne me reste plus qu'à trouver la solution.

The Other Side (BxB) - Tome 1Where stories live. Discover now