Réflexion

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Pdv Samuel

Cinq jours après notre dernière compétition, la liste des qualifiés aux mondiaux de notre pays a été dévoilée sur le site officiel de la fédération d'équitation. Aidan et moi faisons bel et bien partie des participants.

Nous devons nous rendre à Surigar fin août. Une fois là-bas, nous aurons encore deux semaines pour prendre nos marques sur la piste. Ce qui nous laisse globalement deux mois pour nous préparer. J'ai déjà commencé à réfléchir à mon programme. Je dois impressionner le jury. Je sais que j'ai peu de chances de l'emporter, mais je veux marquer les esprits, trouver quelque chose, une combinaison qui restera d'une manière ou d'une autre, les gens doivent se souvenir de moi lors de mon tout premier mondial.

Assis dans le salon, j'ai les pieds qui prennent appuient sur la chaise d'en face. Je gribouille des schémas, mais je n'ai pas assez d'expérience pour composer un programme de A à Z seul. Je ne connais pas assez le système de notation, et je ne risque pas de demander l'aide d'Aidan.

Cet idiot a décidé de devenir muet comme une carpe. Il passe son temps dans la chambre à dormir, je ne le vois sortir que pour se doucher ou grignoter. Il a même refusé que je m'occupe de sa main.

Je pensais qu'après le délai d'une semaine imposé par Jerry, il se serait précipité au haras pour s'entrainer comme un acharné, mais ce n'est pas le cas. Je me sens seul... Nous vivons ensemble, nous partageons le même lit, mais il s'éloigne un peu plus chaque jour. Ses parents m'appellent quotidiennement pour prendre de ses nouvelles, il ne leur répond pas quand ils essayent de le joindre directement.

J'ai d'abord cru que c'était son comportement habituel devant la dernière ligne droite de la saison, mais son père m'a assuré qu'il n'agissait jamais ainsi. Je repose mon calepin sur la table, et décide d'aller me rafraichir sous la douche. La chaleur de l'été rend l'air étouffant.

Le jet d'eau froide m'électrise la peau, alors que je sens les larmes monter. Je ne sais même pas pourquoi ?! Il ne s'est rien passé, je vais devenir fou à ce rythme. Je frappe une fois, deux fois, trois fois contre le mur carrelé de la douche. Le son résonne, la douleur se répand, mais rien ne calme celle qu'abrite mon cœur. J'ai envie de crier, d'hurler de toutes mes forces.

Je déteste cette situation, mais je me déteste encore plus de ne pas avoir le courage de demander ce qui ne va pas. J'ai si peur de connaître la réponse, la véritable, celle qui se cache derrière son sourire de façade et ses heures d'insomnies.

Je coupe l'eau, et, sans grande conviction, sors de la cabine pour me sécher et retourne dans la pièce à vivre. J'ai la surprise d'y trouver Aidan, qui consulte mon calepin que j'avais laissé sur la table. Il lève son regard concentré sur moi, et me désigne le cahier de la main.

- Quel est ton objectif, exactement ?

Je m'approche de lui, silencieux, et prends une chaise pour m'assoir à califourchon. Je me méfie de lui, de cet état.

- J'ai cru que tu avais perdu ta langue ces derniers jours.

- Tu n'as pas répondu à ma question, rétorque-t-il en ignorant ma remarque.

Je souffle un bon coup, et récupère mon gribouillage de ses mains.

- Ce que je veux, dis-je en levant la feuille devant lui, avant de la jeter à l'autre bout de la pièce. C'est que tu me parles, Aidan !

Mon compagnon suit des yeux le papier traverser le salon, et tomber au sol. Puis ses iris reviennent sur moi. Il se frotte les paupières en fronçant les sourcils.

Un Amour InattenduWhere stories live. Discover now