Chapitre 15 - Humiliée

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Lorsque ce Maximilien arrive pour me détacher, des heures plus tard, ce moment de honte est loin d'être fini. Un ricanement se fait entendre entre deux pas lourds. Le genre de rire émit par les petites frappes du secondaire. Hautain et graveleux.

— Vous devez avoir été très vilaine... pour qu'il décide de vous menotter comme ça.

J'ai envie de l'injurier pour qu'il transmette le message à son patron, mais le bâillon dans ma bouche m'empêche heureusement de faire une telle bêtise. Quand je suis furieuse, et je peux prononcer des paroles inconsidérées. J'évite de regarder autre part que son trench ou ses immenses bottes pendant qu'il me détache. Je n'ai pas envie de voir la moquerie que je sens jusque dans l'air qu'il respire. Les menottes s'ouvrent dans un cliquetis, relâchant ma chair meurtrie, et je grimace quand la pression se relâche sur mes bras, que je ramène à leur position normale, le long de mon corps.

Je retire ensuite le bâillon de fortune, qui laisse un sillon humide sur son passage en raison de toute cette salive et toutes ces larmes versées, et le jette sur le sol, dégoûtée. J'ai mal à la mâchoire, aux poignets, aux épaules... et à ma fierté. Maximilien donne un nouveau coup à cette dernière en me tendant les menottes qu'il vient de retirer. Il agite les sourcils.

— Vous voulez les ravoir? Ce sont les vôtres, après tout.

Je le regarde, éberluée. L'incrédulité me coupe le sifflet net. Maximilien ramène l'objet clinquant vers lui et le laisse pendre mollement de façon à mettre l'accent sur le caractère ironique de sa déclaration. Il a l'air de vraiment s'amuser de mon désarroi.

— Non? Je peux les garder alors?

Je ne sais pas pourquoi je le fais, mais je lui arrache les entraves d'un geste rageur.

— Est-ce que c'est une blague?

— Regardez par vous-mêmes si vous ne me croyez pas, déclare-t-il en haussant les épaules.

Après un examen rapide, il devient évident que ce ne sont pas de vraies menottes : il y a un loquet minuscule qui permet de les déverrouiller soi-même. Je sens le regard moqueur de l'homme de main alimenter ma fureur. Je serre l'objet encore tiède de ma propre chaleur comme si je pouvais les faire fondre.

Alaster s'est introduit chez moi, a pris mes propres menottes... inoffensives... pour me faire croire que je ne pouvais pas me détacher! J'aurais pu me libérer des heures auparavant si je n'étais pas partie du principe qu'elles étaient vraies! Dupée. Ce... goujat... m'a dupée! De l'autre main, je masse la peau sensible du poignet qu'il a malmené juste avant.

Maximilien voit sûrement le brasier dans mes yeux; il se détourne avec un sourire narquois.

— Tenez, déclare-t-il en ouvrant un tiroir et en sortant une pile de vêtements, qu'il me tend. Habillez-vous, et rentrez chez vous. Al communiquera avec vous dans les prochains jours. Il a votre numéro.

Avec un sentiment grandissant de colère, je saisis les vêtements, que je reconnais comme les miens — le comble, il avait prémédité cette mise en scène! —, et me hâte vers la salle de bain. Ma vessie hurle plus fort que ma fureur, que je n'aurais pas l'audace de déverser sur quiconque... parce que je ne me fais pas d'idées... même si Alaster a usé d'une illusion pour me séquestrer, rien ne me dit qu'il n'est pas passé chez moi. Ou sinon, rien ne dit qu'il ne compte pas le faire.

Non. Je crois dur comme fer que la vie de mes enfants est menacée tant que je n'aurai pas accepté de l'aider.

Je me dépêche de me vêtir en étranglant ma colère. Il n'y a rien que je puisse faire sans risquer de subir des représailles, et cette situation me donne la nausée. Lorsque je sors de la salle de bain, les menottes toujours en main, Maximilien n'est plus là. Dommage, j'aurais bien vomi sur ses chaussures. Un simple accident après une telle mésaventure, ce serait crédible!

Le fauve écarlateWhere stories live. Discover now