Chapitre 20 - Punie

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J'arrive à rejoindre Alaster sans croiser ce pervers de Fort'. Toutefois, je n'ai plus aucune envie de rester dans cet endroit. Et puisque la menace a été menée à bien et que je ne sers plus à rien... en dépit de mes doutes et de mes appréhensions au sujet de l'homme en question, je l'enlace par-derrière et tente de jouer les femmes enamourées. J'y mets nettement moins d'enthousiasme qu'à notre arrivée, mais j'entends quelques sifflements à l'endroit d'Alaster, qui se tourne avec l'air d'un homme qui ne croit pas en sa chance. Caressant sa nuque à découvert, je souffle contre sa bouche :

— Nous avons des affaires à régler, vous et moi. Maintenant. Dans la chambre.

Lorsque, surpris, il plonge un regard incrédule dans le mien, je pince les lèvres en espérant que Fort' ne tourne pas la tête; il verrait mon mécontentement et comprendrait forcément que je joue un rôle depuis le début.

— Messieurs, si vous n'avez plus besoin de moi, je vais me retirer avec cette charmante demoiselle.

Ricanements de la part de quelques hommes. Moues envieuses de la part des femmes, surtout celle qui accompagne le patron. Ce dernier sourit et balaie l'air de la main.

— Faites donc, Al. Je sais que je peux compter sur vous en cas de problème.

— Évidemment, Monsieur. Bonne nuit, répond Alaster, courbette à l'appui.

Les salutations faites, nous nous retirons d'un pas empressé. Alaster m'escorte avec la main sur mon postérieur. Irritée, je tolère ce geste uniquement pour l'acte final, et je rejette sa main dès que je suis convaincue que plus personne ne peut nous voir. Pourtant l'homme remet sa main et, d'un ton normal, commente en m'orientant dans les couloirs de l'hôtel :

— Ne pensez jamais que nous sommes à l'abri des regards tant que nous ne sommes pas entre quatre murs sécurisés, Lyvie.

Alors je tolère son petit jeu de couple jusqu'à la chambre, puis jusqu'à ce qu'il s'éloigne de moi volontairement et me fasse signe d'aborder la question qui me taraude.

— Qui êtes-vous, Alaster? Ou dois-je vous appeler Alan? Ou peut-être que votre vrai prénom, c'est Albert? Commence-t-il même par Al?

Mon introduction l'amuse.

— De tous les sujets possibles, c'est mon prénom qui vous a refroidie ce soir?

Je croise les bras, aux prises avec un désir mal placé prenant sa source dans sa mimique narquoise. Avoir goûté à ces lèvres ne n'en a pas dégoûtée, au contraire, et je suis convaincue qu'il le sait. J'essaie de ne pas les fixer pour conserver mes sens.

— Non, pas seulement! Figurez-vous que d'être utilisée pour menacer un collègue, c'était déjà très peu excitant, merci bien.

— Comptez-vous heureuse qu'il ait eu droit à un avertissement. D'autres n'auraient pas eu cette clémence.

Je repense à Fortuna, aux renseignements donnés par Thomas et à son désespoir.

— Il est prêt à se rendre de lui-même au Chuchoteur si cela peut le sortir de cette situation intenable.

Ma réponse semble réellement le surprendre. Il détache les boutons de son veston et glisse une main dans sa poche de pantalon.

— Oh? Et que vous a-t-il dit au sujet du Chuchoteur?

J'ai l'impression d'avoir fait une bourde, ou plutôt que Thomas en a fait une en abordant ce sujet.

— Il n'a pas été dans les détails.

Ce qui est vrai!

— Je l'espère pour lui. Il aura besoin d'une nouvelle carrière s'il ne sait pas tenir sa langue, répond Alaster, l'air dur.

Le fauve écarlateWhere stories live. Discover now