Chapitre 18 - Rappels à l'ordre

450 94 326
                                    

Des applaudissements résonnèrent de toutes parts, alors que les Dorémi Horizons achevaient leur dernier morceau. Le groupe de musique remercia chaleureusement les spectateurs, puis leur donna rendez-vous d'ici quelques jours. Un serveur annonça qu'une petite piste de danse serait aménagée, ce qui déclencha une horde d'acclamations enthousiastes.

Isabella et Duncan, qui étaient arrivés plus tôt que la dernière fois afin de se garantir une table bien placée, attendirent que la foule se disperse. Quand ils sortirent dans la ruelle, quelques badauds fredonnaient encore certains airs et tournaient sur eux-mêmes.

— Leurs compositions sont mille fois mieux que celles jouées au palais ! s'exclama la princesse. Je préfère largement les écouter plutôt que de supporter des heures d'opéra interminables...

Bien qu'il n'ait jamais assisté à un opéra de sa vie, le garde hocha la tête. La représentation avait réellement eu l'air de plaire à la princesse, ce qui suffisait à réchauffer son coeur. Lui aussi appréciait la musique, mais le vrai spectacle se jouait surtout dans les yeux océan d'Isabella, lorsque mille étoiles les éclairaient.

Au cours des jours précédents, il avait craint qu'elle ne change d'avis et annule leur sortie. Or dès que le soleil avait disparu derrière l'horizon, elle l'avait réveillé avec entrain, afin qu'ils puissent partir au plus vite.

— Et puis tous les cinq sont vraiment très beaux, ce qui ne gâche rien...

Il ne comprit pas immédiatement de qui elle parlait.

— Les musiciens, l'éclaira-t-elle comme il fronçait les sourcils. Vous ne trouvez pas qu'ils ont un joli minois ?

Duncan se rembrunit un peu et haussa les épaules.

— Je... Je n'ai pas vraiment d'avis, marmonna-t-il.

Elle éclata de rire et il comprit qu'elle n'avait cherché qu'à le taquiner.

— Il nous reste au moins deux heures avant de retrouver le cocher. Vous voulez faire quelque chose de particulier ? lui demanda-t-elle.

Face à son regard sceptique, elle s'empressa d'ajouter :

— Promis, je ne poignarderai personne. Si on nous attaque, je les laisse vous étriper.

Il jeta un coup d'oeil aux alentours, inquiet à l'idée que quelqu'un puisse les entendre. Heureusement, elle ne parlait pas très fort et personne ne prêtait attention à eux.

— Vous ne connaissez pas un endroit où aller ? l'interrogea-t-il.

C'était sa ville, après tout. Cela aurait plutôt dû être à elle de trouver des idées. Elle parut réfléchir un instant.

— Peut-être, mais je ne suis pas sûre que cela vous plaise.

Il la fixa avec insistance pour qu'elle précise, cependant elle se contenta d'afficher un air malicieux. Présageant le pire, il la laissa le guider à travers les rues, qui se faisaient de plus en plus sombres au fil des intersections. Il lui sembla qu'ils s'enfonçaient dans les bas quartiers, s'éloignant du fleuve aux eaux noires et des tavernes à peu près fréquentables.

Des corps presque desséchés jonchaient le sol, exactement comme à la Frontière. Les façades qu'ils longeaient étaient d'une rare saleté, et des pavés manquants rendaient les ruelles presque impraticables. Duncan manqua de trébucher plusieurs fois, tandis qu'Isabella évitait habilement les trous boueux et les flaques d'eau.

Histoires de l'OmbreWhere stories live. Discover now