Chapitre 22 - S'envoler

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— Est-ce que... je peux te demander un service ?

Duncan venait de frapper à la porte de Daniel. Il était resté immobile de longues secondes devant le battant, prêt à faire demi-tour. Une idée lui était venue la veille, et il ignorait si elle était vraiment bonne.

— Bien sûr, répondit le garde. De quoi s'agit-il ?

Sa chambre était deux fois plus grande que celle de Duncan. Il se tenait derrière un bureau mal rangé, où s'entassaient mille documents cornés.

— Je... Euh... Tu sais écrire, n'est-ce pas ?

Il se maudit aussitôt pour sa question stupide. Évidemment qu'il sait écrire, puisqu'il tient actuellement une plume, crétin.

— En effet, confirma Daniel en fronçant les sourcils. Tu as besoin que j'envoie quelque chose pour toi ?

L'ancien loup lui fut infiniment reconnaissant d'avoir deviné sa requête.

— J'aimerais bien, oui, acquiesça-t-il, un peu gêné.

Il n'était jamais évident d'avouer qu'il était quasiment illettré...

— Il y a une amie dont je voudrais avoir des nouvelles. Tu pourrais lui écrire une lettre de ma part, s'il te plaît ?

Il se sentait tel un petit enfant demandant une faveur à un adulte. Cela lui coûtait de quémander une chose pareille au soldat, mais il voulait encore moins s'adresser à Isabella. Depuis quelques jours, lui et la princesse dormaient dans le même lit, toutefois... Il n'aurait pas pu s'empêcher de se sentir honteux. Daniel était de plus en plus agréable avec lui, le cherchant souvent pour discuter ou boire un verre. Ces marques d'amitié touchaient Duncan, qui avait pensé à son amie Lorna, dont il ignorait comment avoir des nouvelles.

— Avec plaisir. Tu n'as qu'à me faire la dictée et je vais écrire.

Il s'empara d'une feuille de papier vierge et le voleur se confondit en remerciements. D'une voix un peu bégayante, il lui confia presque tout ce qu'il voulait dire à la Neutre. Bien sûr, il ne pouvait pas lui parler ouvertement de la princesse, alors il se contenta de lui assurer que tout allait bien et se déroulait à merveille. Lorna ne savait pas lire non plus, mais elle réussirait sûrement à trouver quelqu'un pour l'aider à déchiffrer la lettre. Peut-être même que cette personne l'aiderait à y répondre.

— Et voilà, fit Daniel en scellant le courrier avec de la cire rouge. Quelle adresse dois-je renseigner ?

Duncan espéra que son amie n'avait pas changé de lieu de travail.

— L'hôtel Friseal. À Fearghasdan, sur la Terre de l'Émeraude.

— Les loups de l'Émeraude ne se facilitent jamais la vie pour leurs noms ! s'exclama le garde avec un petit rictus.

Il hésita plusieurs secondes sur l'orthographe des deux lieux. Soudain, ses yeux se plissèrent et il perdit son regard dans le vague.

— En fait, ce nom de ville impossible à prononcer me dit quelque chose...

Le jeune vampire se figea et voulut se jeter par la fenêtre. Comment avait-il pu oublier que Daniel faisait partie des gardes qui avaient accompagné Isabella sur la Terre de l'Émeraude ? Il avait séjourné à Fearghasdan, et avait même suivi la princesse dans l'hôtel où elle était entrée... Ce même hôtel où Duncan avait croisé la route des deux gardes, qui l'avaient toisé de la tête aux pieds.

C'était déjà un miracle que Daniel ne l'ait pas reconnu à son arrivée au palais. Or voilà que le voleur tentait le diable et risquait d'être démasqué.

Histoires de l'OmbreWhere stories live. Discover now