6. Délivrance

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Un homme entré plus tôt arriva à mon niveau et demanda à acheter un paquet de clope qui se trouvait sur l'étagère derrière moi.

- Non pas celui-là bordel, le paquet jaune à côté je vous ai dit, me lança-t-il d'un ton énervé.

Son haleine portait une odeur distincte de drogue, amer et entêtant qui trahissait sa consommation excessive. Sa démarche était instable, et ses mouvements légèrement désynchronisés.

Je tentai de garder mon calme comme à mon habitude, et affichai mon plus beau sourire hypocrite pour ne pas aggraver la tension déjà présente. Depuis quelques heures déjà, un mal-être me prenait aux tripes. Une envie de vomir. Une vision trouble. Un mal de crâne pas possible. Il fallait que je me prenne quelque chose à grignoter. 

- Excusez-moi, lui répondis-je alors tout simplement.

Sauf que ma faible tolérance le faisait sûrement se sentir dominant puisque son visage se marqua par une expression de défi, ses sourcils froncèrent et ses yeux exprimèrent comme la volonté de créer un conflit avec moi.

Lorsque je crûs qu'il partirait sans faire de problème, ce dernier me cracha au visage avant de tourner les talons. C'était si soudain que je fûs prise de court, et restai un instant là, immobile, choquée par cet acte barbare.

- Enfoiré, lâchai-je finalement dans un murmure tandis que je m'essuyais le visage à l'aide d'un mouchoir que je sortis de l'arrière de ma poche.

C'était plus fort que moi et je suppose que ma patience n'était plus au goût du jour, faute de me contenir chaque fois face aux même personnes de son genre. C'en devenait exaspérant.

Il se retourna brusquement, laissant entendre qu'il avait capté mes paroles.

- Répète un peu pour voir gamine ? lança-t-il d'un ton provocateur.

Ce toxicomane semblait totalement dépourvu de bon sens, et il était inutile de perdre mon souffle à débattre avec lui. Autant parler à un mur dans ces circonstances. Quelqu'un l'interpella de l'extérieur tandis qu'il allait poursuivre son monologue.

- Franck tu fous quoi bon-sang, dépêches-toi !

Il me lança un dernier regard, hésitant à rester, avant de céder à l'impatience de ses amis.

- On se reverra, m'adressa-t-il simplement avant de tourner les talons et de disparaître.

Je détournai le regard, signifiant par là que ses paroles ne m'atteignaient pas, et pris plutôt un nouveau mouchoir pour essuyer son crachat, frottant avec force comme pour effacer cette insulte de ma peau.  

En jetant le mouchoir, mes yeux ses posèrent sur la carte de visite qu'Anne m'avait donné la fois dernière, et ce serait mentir si je disais que je n'y avais plus pensé depuis.

°°°

Je glissai ma clé dans la serrure, mais quelque chose bloquait l'ouverture de la porte. Bizarre.

Je continuais de pousser mais rien n'y fait. Isaac aurait mis quelque chose devant la porte ?

Je poussais encore, mais cette fois je n'y allai pas de main morte. Et cette fois, je réussis à apercevoir quelque chose.

Des jambes.

Ne me dites pas que- 

La panique me saisit, mais je parvins finalement à forcer la porte. Elle se referma aussitôt que je la lâchai, le poids du corps assis derrière elle l'empêchant de s'ouvrir totalement.

- Merde, Isaac !

Il est... mort ? Je me baissai près de lui et pris son pouls. Son coeur battait toujours. Ma pression redescendit alors  d'un cran et je lâchai un souffle de soulagement. Loin de moi l'envie de retrouver un putain de cadavre chez moi.

RENAISSANCEWhere stories live. Discover now