36. Petite fête

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- Aïe ! m'exclamai-je.

Suzan venait de me brûler l'oreille avec sa brosse soufflante.

- Isabella, tu bouges beaucoup trop ! me dit-elle en me tenant fermement les épaules pour me remettre à ma place.

- Je pense que c'est bien comme ça ! m'écriai-je à travers le bruit et les propulsions d'airs chauds.

Lorsqu'elle éteignit la machine, l'absence de bruit fit presque écho dans la salle de bain.

- Tes cheveux sont si longs ! Je suis essoufflée.

Elle se pencha ensuite pour saisir la laque posée sur le rebord du lavabo, puis d'une main sûre, elle la vaporisa, fixant les derniers détails de ma coiffure.

- Bon, le maquillage et le brushing sont faits, il ne te reste plus qu'à enfiler ta robe.

- Merci Suzan, lui dis-je en me levant de ma chaise. Le résultat est magnifique comme à chaque fois.

- J'étais peut-être maquilleuse et coiffeuse dans une autre vie qui sait.

Son dos me faisait désormais face, et je la regardai, absorbée par ses gestes tandis qu'elle faisait des retouches à sa propre coiffure. La nuance de tristesse, ou peut-être de regret, dans sa voix m'envahissait, laissant flotter dans l'air une question sans réponse. Un frisson de curiosité me submergea. Quelles histoires cachait-elle derrière cette façade de légèreté ? Peut-être avait-elle l'habitude de faire ce genre de choses avec sa soeur défunte ? Celle qu'elle n'avait plus jamais évoquée avec moi.

Ou peut-être pas, peut-être que la tristesse dans sa voix reflétait simplement la vocation qu'elle n'avait pas pu choisir. Comment a-t-elle finie par faire partie de ce sombre monde ?

Balayant délicatement ces pensées pour ne pas gâcher la soirée, je remis à plus tard l'envie de plonger dans les profondeurs de nos histoires non dites.

Lorsque mon amie se retourna vers moi, ayant achevé sa propre préparation, je fus saisie par l'éclat de sa beauté. Elle avait sculpté sa propre apparence en une œuvre d'art vivante. Ses cheveux châtains foncés tombaient en cascades ordonnées comme des vagues légères, encadrant son visage où sa touche de maquillage mettait en valeur ses yeux noisettes et ses lèvres roses.

- Tu es si belle, dis-je en continuant d'admirer sa robe rose pâle qui se mariait à la perfection avec son teint pâle.

L'admiration dans ma voix n'était pas feinte, c'était l'expression pure de mon émerveillement.

Elle esquissa un sourire, et je pus voir une étincelle de fierté dans son regard, une lueur qui, je l'espérais, éclairait aussi l'ombre de sa peine.

- Câlin, m'invita-t-elle en ouvrant ses bras en grand pour m'accueillir.

Nous nous avançâmes l'une vers l'autre pour cet échange, et comme d'habitude, ses bras étaient pour moi comme un refuge, un espace de sérénité apaisante. Elle m'inspirait la même tranquillité que les vagues douces d'un lac calme au crépuscule.

C'était son caractère calme et doux qui émanait tout simplement de ses gestes.

- Tes cheveux sentent la vanille, murmura-t-elle.

En se séparant lentement, un sourire naquit sur nos lèvres, reflet de notre complicité.

- Tu me l'avais déjà dit.

- À ce stade, donne-moi la marque de ton shampoing par pitié, fit-elle mine de me supplier en me saisissant le bras d'un air de chien battu.

- Suzan ! s'éleva la voix de Helia d'en bas.

RENAISSANCEWhere stories live. Discover now