15. Garder à l'oeil

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Le bruit incessant de la pluie battante sur les vitres résonnait dans la chambre et me réveilla. La lumière terne et grise de ce mois de février se frayait difficilement un chemin à travers les nuages sombres.

J'ouvris les yeux, et vis que les gouttes d'eau glissaient le long des vitres, créant un rideau translucide qui brouillait légèrement le paysage urbain en contrebas. Les nuages bas semblaient flirter avec les étages supérieurs, enveloppant les sommets des immeubles dans une brume légère.

Je me sentais engourdie, à la fois physiquement et mentalement. J'avais l'impression d'être coincée dans une bulle de morosité, captivée par l'atmosphère maussade qui régnait à l'extérieur.

La pluie semblait envelopper la ville dans une couverture de tristesse, comme ci le ciel pleurait avec moi.

Je me levai lentement, posant mes pieds sur le sol en marbre froid. Mes pas étaient lents et hésitants, comme si je portais le poids du monde sur mes épaules. Je me dirigeai ensuite vers la salle de bain, où les miroirs polis reflétaient mon visage fatigué et sans éclat.

Les carreaux de marbre, les luminaires scintillants et les robinets dorés qui m'entouraient me rendaient mal à l'aise, comme si je ne pouvais toucher à rien, de peur d'abîmer.

Hier soir, mon nouveau patron m'avait appelé pour me mettre de service cet après-midi exceptionnellement.

Dans la cuisine, je me permis d'utiliser la machine à café, qui me préparera mon seul repas de la journée. La faim ne venait plus à moi depuis plusieurs semaines déjà. Chaque fois que je m'asseyais pour manger, une sensation de lourdeur et d'indifférence s'emparait de moi, éteignant toute envie de nourriture. Mon assiette était devenue un symbole de frustration et de déconnexion.

Le bourdonnement de la machine à café rompait le silence de l'appartement, un son étrangement réconfortant dans la monotonie de cette matinée.

Je m'assis sur le rebord de la grande table, et me mis à siroter ma boisson chaude en admirant la vue morne.

Des bruits de pas se firent entendre en haut. Il est réveillé. Mon pire cauchemar.

Je me levai alors pour laver ma tasse, et déguerpir au plus vite.

Je le vis descendre les escaliers qui semblaient s'incliner devant lui au même moment, alors qu'il descendait avec une grâce animale. Son torse nu, attira mon regard malgré-moi. Chaque muscle se contractait et se relâchait avec fluidité, faisant mouvoir ses tatouages, et créant ce spectacle envoûtant qui s'offrait à moi. Ses cheveux ébouriffés encadraient son visage encore endormi.

Il marcha nonchalamment jusqu'à la machine à café, puis s'adossa contre le plan de travail en passant ses mains sur son visage.

- Tu finis à quelle heure aujourd'hui ? me demanda-t-il en brisant finalement le silence.

- À 20h, pourquoi ? répondis-je sans comprendre l'intérêt de sa question.

- Tu vas m'accompagner à une soirée, alors t'éviteras de trop tarder.

Les gestes de ma vaisselle furent abandonnés, oubliés sur l'évier alors que je me figeai. Les bruits de l'eau qui tombait se fondirent dans le silence de la pièce alors que mon esprit tentait de rationaliser ce qu'il venait de dire.

- Et pourquoi ça ? demandai-je dans l'incompréhension totale.

- Parce que tu vas au moins pouvoir me servir à quelque chose, dit-il en s'installant à la table, sa tasse de café en main.

Me yeux suivirent ses gestes, et je continuai de froncer mes sourcils avec incompréhension en quête de plus d'explications.

Son ton était tranchant, un mélange d'amusement froid et de calcul, me réduisant à un simple pion dans son jeu dangereux.

RENAISSANCEWhere stories live. Discover now