32. Tulipes

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À côté de moi, le lit était vide, la place d'Isaac froide, signe qu'il s'était levé avant moi. Le son de l'eau s'écoulant dans la douche me parvint, discret, et me rassura alors bizarrement.

Je ne m'étais jamais réveillée à ses côtés, et je crois que cela n'arrivera jamais.

De ce que j'avais cerné de sa personnalité, il n'était vraisemblablement pas du genre à traîner dans le lit, et encore moins pour se lover. Non, il n'aimait pas ce genre de choses.

Il était matinal -ou insomniaque- pressé, et ne voulait pas s'attarder pas sur ce genre de choses futiles à ses yeux. Je le savais depuis le jour de notre rencontre.

Je fixai le plafond, tandis que les premières lueurs du jour se glissaient timidement à travers les rideaux. Les souvenirs de la veille défilaient dans mon esprit, images floues et sensations mêlées d'une soirée qui avait pris une tournure inattendue.

Je me souvenais encore de son corps chaud contre le mien, de son souffle au creux de mon cou, de ses mains sur mes hanches et de son regard animal. Mais je me souvenais aussi de la suite, et avec une décision muette, je repoussai les draps et décidai de me lever, ne voulant plus ressasser ces choses que je voulais si profondément oublier.

Je descendis les marches du duplex, et dans la cuisine baignée de la lumière matinale, je mis en marche la machine à café, remplissant l'air du parfum terreux.

Avec ma tasse fumante entre les mains, je m'assis sur la chaise haute de l'îlot central, devant cette énorme baie vitrée qui donnait sur New York. C'est dingue, ce panorama.

Aujourd'hui, le soleil s'est pointé comme pour dire que le printemps était de retour. Et franchement, ça faisait du bien. La lumière douce, les couleurs qui reprennent vie, c'est comme un nouveau départ. Il n'y avait plus ces couleurs grisâtres, bleutées ou verdâtre. Il y avait dans l'ambiance des tons jaunâtres et orangés.

Saisie par cette ambiance, je me levai et me dirigeai vers le frigo, remplit grâce à la cuisinière.

Je voulais essayer quelque chose.

Un petit sourire se dessina sur mes lèvres, satisfaction pure de voir qu'il y avait de la confiture, à la framboise ici, même si peu m'importait la saveur. Je saisis alors le pot, et me mis à chercher du pain dans les placards du bas. C'était bizarre, de les voir remplis, eux qui étaient si vides depuis mon arrivée.

Puis finalement, je parvins à trouver un paquet de pain en tranche, que j'eus du mal à ouvrir. Je déteste les personnes qui ferment les sachets de manière aussi serrés.

Victoire pour moi, j'en sortis deux tranches. Sans grille-pain et avec la flemme de les faire griller à la poêle, je me contentai de simplement tartiner le beurre puis la confiture. C'était comme redécouvrir un plaisir oublié, un geste simple et pourtant si signifiant pour moi.

La présence d'Isaac sur ma droite attira mon attention. Il descendait les marches, vêtu d'un marcel blanc et d'un survêtement gris. Cet homme est un mannequin.

Une cigarette pendait nonchalamment à ses lèvres, complétant l'image du gars qui semblait flotter au-dessus des tracas quotidiens, comme s'il était intouchable par les soucis du monde extérieur.

Cette vision de lui contrastait avec ce que j'avais pu voir cette nuit. Je suppose qu'il s'est rapidement remis de ses émotions. Ça lui ressemblait bien.

Ses cheveux encore humides laissaient couler quelques gouttes d'eau le long de son cou, indifférent à l'effet qu'il pouvait avoir.

Il regarda rapidement ce que je faisais, et même s'il ne laissait pas vraiment transparaître ses émotions et qu'il ne me dit rien, je le vis qu'il semblait être légèrement surpris, positivement je crois. Mais il ne me dit rien, peut-être pour ne pas me gêner ou m'arrêter dans mon élan.

RENAISSANCEWhere stories live. Discover now