5. Secrets

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Plusieurs jours s'étaient écoulés et je n'avais plus dormi depuis ce soir-là. La peur qu'il vienne me tuer dans mon sommeil ne m'avait pas quitter une seule seconde.

Je passais mes nuits à écouter les bruits de craquement du parquet sous son poids, afin de deviner s'il marchait dans ma direction. Chaque craquement, chaque souffle de vent, chaque bruit de pas accéléraient mon rythme cardiaque. C'était comme si j'étais constamment en état d'alerte.

Lui ne sortait jamais de la chambre, et il en était mieux ainsi. Je crois que ses blessures lui faisaient toujours mal, puisque je l'avais surpris quelques fois à grimacer de douleur lorsqu'il marchait.

Durant la journée, je surveillais sans cesse ses faits et gestes, bien qu'en ce moment rien ne fâcheux ne s'était reproduit, ce qui me faisait baisser ma garde et me laissait croire que tout ce cirque n'était que l'exception d'un soir.

Car à le voir les jours suivants, m'ignorant et faisant comme si je n'étais pas là dans le plus grand des calmes, c'était comme si ce qui s'était produit cette nuit-là n'avait été que le fruit de mon imagination. Comme si cela n'avait été qu'un mauvais cauchemar.

J'avais cerné le fait qu'il n'était pas bavard, plutôt introverti, et ce, même avec Helia. Il était froid, cela faisait partie de sa nature hostile, et tout se comprenait à travers son regard lorsqu'il voulait bien nous laisser lire ses émotions. Lorsqu'il enlevait cette muraille érigée autour de lui. Comme s'il le faisait volontairement pour nous laisser le cerner le temps de quelques instants, lui évitant de s'exprimer à travers les mots.

Je vis par la fenêtre de la cuisine qu'il neigeait à flot. Les flocons de neige tombaient doucement du ciel gris, enveloppant tout dans un calme silencieux. Les rues étaient désertes, la neige ayant recouvert les voitures et les trottoirs d'un épais tapis blanc. Les arbres étaient chargés, leurs branches courbées sous le poids de la glace.

Les sons étaient étouffés, le silence seulement interrompu par le bruit doux de la neige qui tombait. Les pas de chacun étaient feutrés, comme si tout le monde avait convenu de respecter ce calme fragile.

Le détraqué était installé sur le canapé, en train de regarder la télévision d'un air désintéressé. Le médecin était passé tout à l'heure pour changer ses bandages.

Je me dirigeai vers la cuisine pour trouver quelque chose à me mettre sous la dent.

Mes mains commencèrent à trembler alors que je tirais sur les portes des placards vides. Je parcourus chaque recoin de la cuisine, cherchant désespérément un signe de nourriture, mais tout ce que je trouvais étaient ces espaces vides et désolés. Je croyais pourtant qu'il me restait encore quelques choses.
Non, non, non... C'est pas possible.

Je regardai la date sur mon portable, et nous étions le 16 février. Je devais recevoir ma paye il y a déjà quelques jours de ça, fait chier.

J'avais pourtant fait la remarque à Carlos il y a quelques jours de cela, et il m'avait garantit que j'aurais mon dû cette semaine.

Je soufflai, me sentant complètement dépassée par la situation, submergée en cet instant par le désespoir et le découragement profond.

Je m'assis sur le rebord de la petite table, et pris ma tête entre mes deux mains. J'avais l'impression que le monde s'écroulait sur moi. Je n'étais jamais arrivée à tel point, au point de ne plus rien avoir à me mettre sous la dent. C'était la douche froide pour moi.

Ma tête, appuyée sur la paume de ma main droite, se tourna sur la gauche, là où mes yeux se posèrent sur Isaac. La cuisinette était en faite un recoin du salon, j'étais donc assise à seulement quelques mètres de lui.

RENAISSANCEWhere stories live. Discover now