L'Explosion

20. Robbie [8]

Mercredi 15 mars 2023

Quel con.

Pourquoi j'ai dit à Viviane que j'avais un truc de prévu hier soir et qu'on ne pouvait pas se voir ?

C'était absolument faux. Seule ma fierté débile m'a empêché d'accepter de la revoir hier.

Quand j'ai découvert son message sur mon téléphone, j'ai cru que mon cœur allait imploser dans ma poitrine.

J'étais persuadé qu'elle ne me contacterait plus jamais. Elle est bien mieux sans moi. Même si j'ai bien noté qu'elle avait l'air triste quand je l'ai plaquée il y a trois semaines, je pensais qu'elle aurait réfléchi depuis et aurait atteint cette conclusion.

Elle veut pourtant me revoir.

J'arrive pas à y croire.

J'ai vécu les semaines précédentes branché sur le mode « pilote automatique » et j'ai presque pas dormi de la nuit à l'idée de la revoir aujourd'hui. Chaque minute qui passe s'apparente à une torture. J'ai tourné en rond chez moi, me suis rendu dans deux agences d'intérim sans trop espérer, puis suis rentré pour continuer de tourner en rond dans mon vingt mètres carrés.

Maintenant que je m'approche de l'heure et du lieu du rendez-vous, j'ai envie de faire demi-tour. Je suis pas maso, j'ai pas envie de souffrir. Dans ses messages, elle insistait sur le fait qu'elle avait changé d'avis. Compte tenu de notre dernière discussion, cela devrait signifier qu'elle aimerait une relation plus sérieuse avec moi.

Ça semble complètement délirant.

Mes mains tremblent tandis que j'essaie de fermer mon blouson en cuir après m'être garé à l'entrée du Vieil Antibes. Je ne prête pas attention aux badauds qui déambulent dans les rues étroites et me concentre sur mon objectif.

Comme dans n'importe quelle comédie romantique, nous arrivons au même moment devant le bar, chacun en provenance de deux ruelles opposées. So cliché.

Cheveux lâchés, smoky eye, jupe longue imprimée et veste courte en laine.

Putain, qu'est-ce qu'elle est belle.

Mon cœur opère un saut périlleux dans ma poitrine lorsque je croise ses yeux marron pour la première fois depuis notre rupture. Un sourire timide accroché à ses jolies lèvres, elle s'arrête à quelques pas de moi, de toute évidence gênée sur la marche à suivre.

— Oh, euh, salut.

J'émets un rire tout à fait ridicule et me sens bien con, moi aussi. Elle se penche d'un centimètre ou deux vers moi et pose une main sur mon avant-bras.

— Tu vas bien ?

— Et merde, murmuré-je en secouant la tête de gauche à droite.

Je l'attire alors à moi par la taille et l'embrasse avec fièvre et désespoir. Si elle me repousse, je... Elle ne marque aucune hésitation, se rapproche encore de moi et glisse ses mains dans ma nuque.

Lorsque l'on se sépare à cause de ce stupide besoin vital, respirer, je laisse mes doigts dans ses cheveux et me recule à peine pour la regarder.

— Bonsoir, Viviane.

Elle glousse — délicieux bruit — et dépose un minuscule bisou au coin de mes lèvres.

— Salut, Rob.

Sa voix envoie des décharges électriques dans mon corps et me force à capturer sa bouche à nouveau. Je croyais savoir à quel point elle m'avait manqué, j'étais loin du compte.