Chapitre 2 : Aaron

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La chaleur est saisissante à la sortie de l'avion. Je mets mon casque sur les oreilles. Je n'ai pas vraiment envie d'écouter de la musique, me cela me permet d'ignorer les journalistes et la foule à la descente de l'avion. Je peux prétendre que je ne les entends pas, que je suis enfermé dans ma bulle, certainement déjà en train de me concentrer sur les prochaines épreuves.

Les flashs crépitent, je suis conscient que je suis le centre de leur attention. Ce sont mes troisièmes Jeux Olympiques. J'ai déjà 16 médailles à mon actif, dont 12 en or, et je compte bien en ramener quelques-unes de plus à la maison. À Pékin et Londres, j'étais déjà le chouchou des médias. Mais je sens que ce qui va se passer ici n'aura aucune commune mesure avec ce que j'ai connu auparavant.

J'avance d'un pas décidé à travers la foule, talonné de près par Tom mon coéquipier et ami.

—Vise sur la droite mon pote, l'Angleterre vient de nous envoyer ses meilleurs atouts, m'indique-t-il en désignant une grande blonde, elle aussi assaillie par les photographes.

Je grommelle quelque chose dans ma barbe et me concentre sur mon itinéraire. Je connais la blonde évidemment. Il s'agit d'Emily Sanders, reine du 100 mètres et des tabloïds. Nous nous sommes déjà rencontrés il y a 4 ans, si on peut dire cela comme ça.

— On devrait peut-être les inviter à la soirée des Italiens de ce soir, qu'est ce que tu en penses ?

— Fais ce que tu veux, réponds-je en faisant un signe de la main lui montrant que sa réponse m'est bien égale.

C'est tout à fait Tom. Nous sommes au Brésil depuis moins d'une demi-heure qu'il a déjà des plans pour les soirées du village Olympique. Je reconnais que nous nous sommes bien amusés à Londres, mais contrairement à certains athlètes je n'oublie pas que l'objectif premier de ces jeux est de ramener des médailles. La fête c'est accessoire, et on aura tout le temps de la faire une fois les victoires remportées.

Attention, je ne suis pas non plus un saint. Je sais prendre du bon temps quand il le faut, et croyez-moi je m'ennuie rarement seul chez moi. Seulement j'aime être discret, ce qui n'est pas toujours évident lorsque l'on a constamment une horde de paparazzi accrochés à ses basques. Et surtout j'aime dissocier le sport du reste.

Arrivés au village Olympique nous découvrons nos quartiers pour les prochaines semaines. Je partage un appartement avec Tom et deux autres gars de l'équipe de natation. Il est spacieux, bien que sommairement meublé. De toute façon, nous n'allons pas y passer beaucoup de temps. Je déballe mes effets personnels dans la chambre que Tom m'a attribué (il a gardé la plus grande pour lui bien évidemment), lorsque mon téléphone sonne. C'est mon attaché de presse.

— Aaron mon chéri, comment vas-tu ? Tu es bien arrivé à Rio ?

Elle se fiche complètement de savoir comment je vais, et déjà sa voix mielleuse et son accent de pimbêche new-yorkaise me tape sur le système. Sans parler du fait qu'elle m'appelle chéri, ce que je déteste.

— Tu n'as pas oublié que tu as rendez-vous dans une heure avec les journalistes d'ESPN pour une interview ?

— Non je n'ai pas oublié.

— Bien, alors pense à parler un maximum de l'importance de ces jeux dans ta carrière. N'oublie pas de mentionner que tu es très fier d'être le porte-drapeau des États-Unis, que c'est un immense honneur.

Cette fille me prend vraiment pour une buse. Je ne prends pas la peine de lui répondre que je n'aurais pas accepté si cela n'avait pas été un honneur. Je la laisse déblatérer son ramassis de bêtises, grognant de temps en temps un "mouais" ou un "humhum" histoire de lui faire croire que je l'écoute.

— Aaron, si tu arrivais à lâcher quelques informations sur ta vie privée ce serait top.

— On en a déjà parlé et c'est non. De toute façon il n'y a rien à raconter.

— Tu sais comme moi qu'avec ce qu'il s'est passé lors des derniers championnats du monde, un peu de pub ne te ferait pas de mal. Il faut redorer ton blason de ce côté-là.

— J'ai dit non Karen. Les gens n'en ont rien à faire de ce que je fais en dehors des bassins, et si ça les intéresse tant pis pour eux. Et j'en ai marre de devoir me justifier pour quelque chose que je n'ai pas fait.

— C'est toi qui vois, mais si tu changes d'avis tu sais que je peux tout orchestrer en quelques coups de fil.

— Je m'en doute. Je dois te laisser il faut que je me prépare pour l'interview.

— Bien je t'appelle après la diffusion.

Je raccroche avant même qu'elle ait le temps de rajouter autre chose. Cette conversation m'a irrité et maintenant je suis de mauvaise humeur.


Sur la ligne : une romance olympiqueWhere stories live. Discover now