XXVIII

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Reagan m'avait totalement ignorée depuis notre fameuse discussion. D'un côté je m'en voulais, mais de l'autre je savais que je ne lui offrais que le malheur qu'il méritait. Il m'avait abandonnée et il avait fuit, il était lâche. Et bien sûr que je lui en voulais, mais hors de question qu'il fasse de moi ce qu'il voulait. À présent je savais lui résister tant je le détestais.

Je fixais l'horizon au loin. Le soleil se levait de l'autre côté de la mer. Une main se posa sur mon épaule et descendit le long de mon bras en une caresse lente et pleine de tendresse. Ça ne pouvait être que Noah. Et pourtant je ressentais une présence de bien plus  agréable que lui derrière moi. Je compris aussitôt et je me retournais pour vérifier mon hypothèse. Bien sûr que c'était Reagan ! Il n'y avait que lui pour me faire ressentir tant d'émotions en caressant mon corps du bout de ses doigts. Je frissonnais et je reculais pour me détacher de lui.

«-Qu'est ce que tu fiches ici ? Demandais-je sur un ton qui se voulait agressif.
-Je pars dans deux heures. Je voulais te dire au revoir.
-Au revoir Reagan.
-Non, attends. Je voudrais qu'on parle de nous.
-De quoi ? Il n'y a plus rien à dire à ce sujet. Tu le sais très bien. C'est fini depuis le jour où tu es parti.
-C'est impossible. Ça ne peut pas être fini.
-Ah bon, et pourquoi ?
-J'ai passé neuf mois à des kilomètres de toi, et pourtant tu étais celle qui occupait chacune de mes pensées. Je t'ai longuement, tendrement, réellement, aimée. Et malgré le temps qui s'est écoulé, je continue de le faire. Je t'aime, et je t'aimerais aussi longtemps que je vivrais.
-C'est bien ça le problème, tu es le seul à ressentir ça. Mentis je.
-Dis le et je partirais pour toujours.
-Dire quoi ?
-Que tu ne m'aimes plus.
-Tu es un lâche, un abruti qui m'a abandonnée parce qu'il avait trop peur d'affronter son propre père. C'est tout ce que tu es.
-Eden dis le.
-Je ne le dirais pas.
-Pourquoi ?
-Parce que je ne peux cesser de t'aimer si je ne t'ai jamais vraiment aimé.»

Son visage se crispa, et ses yeux virèrent au gris. Je ne l'avais plus vu comme ça depuis plus d'un an. Il était terrifiant. Mes ongles s'enfoncèrent dans la paume de ma main. Je regrettais déjà mes mots. Mon demi frère me faisait peur, j'avais l'impression qu'il voulait me démembrer.

«-Tu ne m'as jamais vraiment aimé ?
-Non.
-Tu en es sûre ?
-Comment aimer quelqu'un d'aussi minable que toi ?
-Pardon ?!
-Lorsque tu es arrivé chez moi, tu n'étais rien de plus qu'un ado accro à l'alcool, à la drogue, au sexe, aux courses de motos et à la violence. En bref t'étais qu'un abruti qui avait une sale addiction pour tout ce qui lui était interdit.
-Alors pourquoi tu es sortie avec moi ? Pourquoi tu m'as donnée ta première fois ? Pourquoi tu as trompé Noah avec moi ? Hein ?!
-Parce que tu me faisais pitié.»

Avant que je n'eu le temps de prendre conscience de ce que j'avais dit, Reagan m'envoya une bonne gifle. Cette fois je laissais paraitre mes émotions, j'étais trop effrayée pour me contrôler. Une larme coula sur ma joue brulante de haine. Il m'observa un instant et baissa les yeux. Il recula et déglutissait avec difficulté. Il regrettait ce geste.

«-Adieu. Prononça-t-il, d'une voix ferme et détachée.»

Je voulais lui courir après et l'embrasser. Mais il était allé trop loin. Il n'aurait jamais dû lever la main sur moi. Je rentrais chez moi en courant, les larmes qui coulaient à flot sur mon visage. Je m'enfermais dans ma chambre, assise par terre le dos contre la porte. Tous mes souvenirs avec Reagan me revinrent en tête. Je me rappelais de la première fois où nous avions parlé. Je me souvenais de quand il s'était confié à moi, et de quand je m'étais confiée à lui. Je me souvenais de notre premier baiser, et de tous ceux qui lui avaient succédé. Je me rappelais du temps où on dormait ensemble en cachette. Du jour où nous avions fait l'amour pour la première fois. Je me souvenais de tout, de tout ce que j'avais perdu avec lui.

Je me relevais et fouillais mon armoire à la recherche d'une boîte à chaussures assez spéciale. Je la dégageais de l'étagère du haut en me hissant sur la pointe des pieds. Je m'asseyais sur mon lit et j'ouvris la boîte. J'en sortis une enveloppe et des photos. Je faisait défiler chacune de ces photos sous mes yeux, nous étions tous les deux dans les bras l'un de l'autre, souriants et heureux comme un couple. Sur une des photos Reagan était endormi, je caressais son visage du bout de mon pouce et mes larmes se remirent à couler.

À cet instant précis je savais que je venais probablement de faire la plus grosse erreur de ma vie en rejetant la seule personne que j'avais réellement aimée. Je déchirais l'enveloppe pour récupérer son contenu. La gourmette de Reagan et le collier qu'il m'avait offert était toujours là. Je serrais le collier dans la paume de ma main, contre mon coeur. -Je te demande pardon Reagan. Murmurais je entre deux sanglots.-

Je rangeais la boîte en gardant le collier de Reagan dans ma main et je m'endormis en position foetale. Je me réveillais vers quinze heures dans l'après midi, quand la porte d'entrée claqua. Ma mère entra dans ma chambre, le visage pâle.

«-Eden, tu es là ! Fit elle d'une voix faible.
-Qu'est ce qui se passe ? Demandais-je sans comprendre.
-C'est Reagan...
-Quoi Reagan ?
-Il a eu un accident.»

À ces mots, je bondissais hors de mon lit et je me précipitais vers ma mère.
Un accident ?! Est ce qu'il allait bien ? Et si il était mort ? Ma respiration fut de plus en plus rude face à l'augmentation de mon degré d'angoisse. Je ne voulais pas perdre Reagan. Je ne pouvais pas le perdre. Surtout sachant que les dernières paroles que je lui avais adressées étaient horriblement méchantes, et injustifiées. Je m'en voulais tellement... C'était de ma faute.

Amour InterditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant