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Ce soir là, Reagan avait eu l'autorisation de sortir de l'hôpital et ma mère l'avait ramené à la maison. J'avais dû partir dormir chez mon père pour respecter le choix de Reagan.

«-Je vais me coucher Eden. Tu ferais mieux d'y aller toi aussi, ne traine pas sur ton téléphone.»

Je hochais la tête et je fis mine de me mettre au lit. Je cherchais toujours à comprendre comment c'était possible d'être incompatible avec mes propres parents au niveau sanguin, tout en ressemblant à ma mère. Puis une idée me traversa l'esprit. Ma mère avait eu une relation avant d'être avec mon père, Alex ! Et en plus Alex était blond aux yeux marrons clairs, tout comme moi. Il fallait que je sache à quelle date sa relation avec Alex avait réellement prit fin. J'étais née fin février 2000, prématurée d'un mois. J'avais donc était conçue en juin de l'année précédente. Par conséquent, si Alex était mon père biologique, ma mère et lui avaient dû rompre après juin 1999. Je repris mon téléphone, il était une heure du matin, alors il était déjà neuf heures en Australie et Alex était donc réveillé. Je sortis de ma chambre sur la pointe de pieds, mes chaussures à la main et m'asseyais à l'extérieur sur le rebord devant l'entrée de la maison pour appeler Alex.

«-Salut Eden ! Tu n'es pas couchée ? Demanda-t-il.
-Non, j'ai besoin de te parler.
-Oh ça à l'air sérieux, je t'écoute.»

Je me voyais mal lui expliquer que le garçon dont j'étais amoureuse était mon demi frère et donc que c'était ainsi que j'avais découvert que mon père n'était peut être pas mon père. Je me contentais donc d'aller droit au but.

«-Tu te souviens de la date à laquelle ma mère et toi aviez rompus ?
-Oula... La date exacte ?
-Non, le mois et l'année juste.
-Je dirais septembre 1999.»

À ces mots, je pris conscience que mon hypothèse paraissait de plus en plus plausible. Alex me ressemblait beaucoup plus que John, physiquement et mentalement.

«-Pourquoi cette question ? Demanda soudainement Alex.
-Alex, si je te demandais de faire quelque chose, même si ça te paraît fou, tu le ferais ?
-Tu es sûre que tout va bien ? S'inquiéta-t-il.
-Réponds s'il te plaît.
-Oui, je le ferais. Je te l'ai dit, je suis là pour toi si tu en as besoin.
-Il faut que tu rentres à Morgat.
-Pourquoi ?
-Je te dirais plus tard, je dois y aller. Mais c'est vraiment urgent.
-D'accord, je vais voir ce que je peux faire pour les billets d'avion.
-Merci, à plus tard.»

Je raccrochais sans attendre de réponse. Maintenant j'en étais sûre, John Martin m'avait élevée mais Alex Perrin était mon vrai père, et je comptais bien le prouver.

Je m'apprêtais à rentrer chez moi, mais mon téléphone vibra. Je manquais de lâcher mon portable à la vue de l'expéditeur de ce nouveau message : Reagan. Je déglutissais avec difficulté et j'ouvris le message.

"Tu dors ?"

Je vérifiais l'heure et la date d'envoi du message, il n'y avait aucune erreur.
"Non", m'empressais-je de répondre.

"Rendez vous à la jetée dans 15 minutes, banc 3. Il faut qu'on parle." Répondit il.

Je regardais la fenêtre de la chambre de mon père, la lumière était éteinte. Je rangeais mon téléphone dans la poche de mon pyjama et j'escaladais prudemment le portail de la propriété. Tant pis pour ma tenue je n'avais pas le temps. Je marchais en direction du lieu de rendez vous. J'étais totalement angoissée car j'ignorais ce dont Reagan voulait parler, mais je savais que je voulais le revoir. Je voulais lui annoncer la grande nouvelle, le secret que j'avais découvert.

Plus j'approchais du lieu de rendez vous, plus je m'imaginais ce qu'il pourrait avoir à me dire. Peut être qu'il était prêt à m'accorder une nouvelle chance... J'arrivais au banc 3, Reagan était assis sur le côté gauche du banc.

«-Salut. Dis-je timidement.
-Assieds toi. Ordonna-t-il sans même se retourner.»

Je m'exécutais sans un mot. Reagan avait l'air détaché, différent. Je tentais de briser le silence.

«-Moi aussi il faudra que je te parle d'un truc.»

Il ne répondit pas, comme si il n'avait rien entendu. Il fixait l'horizon droit devant lui.

«-Écoute Reagan, je suis vraiment désolée... Tu n'as pas idée de combien je m'en veux, je ne pensais pas ce que je disais...
-Je suis pas venu ici pour papoter avec toi Eden. Me coupa sèchement mon supposé demi frère.
-Alors pourquoi m'as tu demandé de venir te rejoindre ici, en pleine nuit ?»

Il me fit enfin face, son visage était fermé et il semblait m'en vouloir.

«-Tu l'as dit à ta mère. Grogna Reagan.
-De quoi ?
-Ce qu'il y a eu entre nous l'année dernière. C'était notre secret, ça n'aurait jamais dû sortir.
-Oui je lui ai dit, et alors ? C'est ma mère, pas la tienne.
-Et alors ? Tu me demandes ça sérieusement ? Hurla-t-il en se levant.
-Je... Je ne comprends pas.
-Bon sang Eden ! Pendant presque toute une putain d'année je t'ai dit, et redit, que je voulais être avec toi quitte à devoir subir ce qu'en pensait les gens. Et toi tu ne voulais pas parce que tu avais peur, mais il a fallu que t'attende que ce soit fini pour en parler à ta mère ?! Tu te fous de ma gueule là ?
-Non je... Bégayais-je. 
-Tu quoi ?!
-Je lui ai dit parce que je ne voulais pas que tu reviennes à Morgat ! Criais-je à mon tour.»

Je me levais et me positionnais face à lui, il ne me faisait pas peur.

«-Je ne voulais pas que tu te pointe ici, chez moi, après être parti comme un putain de lâche ! Parce que tu sais quoi ?! La vérité c'est que j'en ai jamais eu rien à foutre de toi, mais t'as été trop con pour le voir. La vérité, Reagan, c'est que j'aurais aimé que tu ne partes pas. J'aurais aimé que tu réponde à mon message. J'aurais aimé que tu demande de mes nouvelles à ma mère, de temps en temps au moins. La vérité c'est que j'étais si mal de t'avoir perdu, t'as pas idée... Alors si j'ai fait ça, si je lui ai raconté, c'est uniquement parce que je te détestais !»

Je repris mon souffle. Il fallait qu'il sache que je n'étais jamais passée à autre chose.

«-Et si je t'ai tant détesté, c'est parce qu'en réalité je t'aimais... Alors ouais, j'ai merdé. Mais toi aussi t'as merdé. T'es parti, alors que j'étais prête à tout pour être avec toi... Même à dire toute la vérité à mes parents. Repris-je calmement.»

Il me dévisageait avec un regard que j'avais presque oublié depuis son départ, un regard qui m'avait manqué.

Amour InterditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant