36. No one is essential.

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     «Personne n'est indispensable.»

[Rayan]

Athéna était si gracieuse, elle émanait d'une beauté inégalable.

Ses cheveux bruns ondulés se mariaient à la perfection avec son regard sombre.
Ses yeux charbonneux et ténébreux apportaient un aspect rebelle à cette femme.

Rayan était subjugué par la prestance de cette Grecque au corps sculpté comme une Vénus, pourtant elle n'avait pas idée du charme qu'elle dégageait.

Ses lèvres, ses fossettes, son sourire ou encore son portrait contrarié dégageaient une innocence et une élégance sans pareil.

Il ne pouvait détacher son regard d'elle.
Le corps appuyé contre le mur, les mains dans les poches et sa capuche sur la tête lui donnaient une façade de criminelle.

Elle avait remplacé son allure de fille sage, calme et docile par un portrait d'incendiaire, d'hors la loi, d'audacieuse.

Petite de taille attirant les plus grands regards.

Il se la figurait une heure auparavant avec lui, dans son lit à observer le plafond comme si il y était affiché la science infuse.

Rayan était un tombeur et il en avait conscience mais il devait avouer que cette fille avait du cran, elle était presque différente.

Il aimait son naturel, elle ne jouait pas un rôle, elle n'était pas superficielle.

Il avait l'impression de la connaître, qu'il était capable de prévoir chaque réaction de cette femme cependant il en connaissait si peu sur elle.
Il n'avait pas idée de ce qu'elle avait traversé, de ce qu'elle avait vécue, de qui elle était.

Et Athéna était réservée sur sa vie privée, sur ses sentiments et ses larmes étaient d'une telle rareté qu'elle avait presque oublié qu'elles avaient déjà coulés.
Les contraires sont complémentaires pourtant il régnait une certaine resemblance entre ces deux protagonistes.

Rayan était loin d'être expressif, il était presque insensible.
Et de ce détachement était né une forme de froideur, de prudence.

La simplicité de la situation était presque devenue risible.
Deux âmes abîmées par l'imperturbabilité écoutant un vieux morceau de raï sous l'éclairage bleuté du restaurant.

Les écouteurs dans les oreilles, la nuit en compagnie, les véhicules berçant cet étrange ensemble.

Ils ne parlaient pas, il n'y avait rien à dire.
C'était de ces moments où le silence agissait comme un pansement, comme un remède.

Rayan avait l'image de ses lèvres posées sur celles de la demoiselle silencieuse qui s'enfermait dans son mutisme, profitant de l'instant avec sa musique.
Il voulait goûter à sa bouche encore une fois et l'enlacer tendrement.
Mais il éprouvait également un besoin de possession sur elle.

Il adorait l'observer quand elle avait le regard perdu, il ne savait pas à qui ni à quoi elle pensait mais elle dégageait quelque chose d'impossible à décrire, c'était magnifique.

«Dom Juan.»
Finit-elle par lâcher brisant le silence des ténèbres, fortifiant leur humeur taciturne.

Rayan ne comprenait pas pourquoi elle avait soufflé cela.
Dom Juan?

Il réfléchissait encore mais il ne parvenait pas à en extraire quelque chose.

Que cela voulait-il dire?

Dom Juan aux enfers, ça lui revenait subitement.
C'était un poème de Baudelaire il lui semblait.
Mais quel était le rapport, et qui était ce personnage?

Il ne parvenait pas à se souvenir des vers qui composaient le poème mais il était étonné par cette pensée de la jeune femme.

Sa curiosité éveillée, il se résolu à lui poser la question.
«Baudelaire?»
Formula Rayan, étonnement peu sur de lui.

Quelques secondes passèrent, chacun concentré dans ses pensées.
«Avant d'être un poème, c'était une pièce de théâtre de Molière.»
Ajouta la jeune femme en augmentant le volume de la musique qui changeait.

«Qui est Dom Juan?»
Questionna Rayan qui ne comprenait toujours pas où elle voulait en venir.

Athéna poussa un long soupir dans l'immensité de cette longue nuit.
«Obtenir toutes les femmes, c'était le rêve de Dom Juan. À ce jeu cruel, il a consacré sa vie.»
Elle était comme exaspérée par ses propres paroles.

«Un coureur de jupons..»
Rayan écoutait avec attention la jeune femme se fasciner pour le séducteur avec une sorte de dégoût dans la voix.
Le libertin aux liaisons dangereuses et son goût si prononcé pour les conquêtes.

Il s'identifiait presque à ce personnage, cet homme théâtrale qui aimait les femmes comme Athéna aimait la littérature.

«Un hypocrite.»
À ces mots, Rayan ne s'assimilait plus à cet homme et Athéna ressassait intérieurement les aventures périlleuses de la pièce de théâtre.

Il voulait poser d'autres questions mais des rires retentirent à quelques mètres.
Deux silhouettes faiblissantes s'avançaient.
Et lorsque celles ci furent assez près, ils purent observer les jeunes femmes du restaurants dans un état d'ivresse avancé.
Elles contournaient les voitures stationnées sur le parking devant l'enseigne en poussant des éclats de rires.
L'une d'elle tomba subitement et son amie la releva avec difficulté.

Rayan les trouvaient minables et Athéna était presque agacée qu'elles gâchent le moment mais elle reporta son attention devant elle, ignorant le reste autour d'elle.

Elle voulait se replonger dans ce monde où elle était si bien et lorsque le son des perturbatrices fût à peine audible, elle se sentait replonger dans ses songes.

Rayan n'avait pas cesser de se perdre dans ses pensées occupées par le récit de la jeune demoiselle.
Il se répétait dans sa tête les mots qu'elle avait employé pour en dessiner le portrait, pour en faire la description.

Molière était source d'inspiration cette nuit là.

Et Dom Juan n'était pas le seul séducteur...

•••

STINKERWhere stories live. Discover now