49. The night of your departure.

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           « La nuit de ton départ. »

L'adrénaline.
Cette sensation brûlante, ce sentiment dans le sang, cette émotion dans le cœur.
Diable que les palpitations, la précipitation et cette impression irrépressible que les organes vont bondir du corps sont incroyables.

Les deux shakespeariens arpentaient les faux plafonds, traversant l'appartement au dessus des envahisseurs.
Chaque seconde réduisait considérablement leur chance de s'en sortir.

En seulement quelques minutes, ils atteignirent le toit du building.

Ils se retrouvèrent au milieu de l'immensité du bâtiment, dans la grandeur de cette nuit sans étoile.
Le vent soufflant bruyamment étouffait les nuisances de la ville, il n'y avait plus de klaxon, plus de musique.
Même leur respiration haletante semblait s'être figée.
Ils étaient seuls, terrés dans un profond mutisme.

« Tu es incroyable Athéna. »
Souffla le milliardaire en rompant le silence dans lequel ils s'étaient terrés.
Côtes à côtes, fixant cette ville qui semblait si lointaine désormais, ils ne pouvaient s'empêcher de l'admirer pour la dernière fois.

« Pourquoi dis-tu cela ? »
Le questionna t'elle en se tournant vers lui cherchant à capter son regard.

« Parce que c'est injuste, tu ne mérites pas de souffrir. »

« Il vaut mieux subir l'injustice que de la commette, disait Socrate. Je n'ai pas de poids sur la conscience tu sais, je suis bien, je suis libre. »

« J'aimerai avoir la conscience tranquille moi aussi. »
Il se passa un moment de calme, un de ces instants où les mots ne sont pas nécessaires, le silence était bien plus expressif que la parole.

« Je t'aime, je suis amoureux de toi, je suis fou de toi, j'arrive pas à te sortir de ma tête Athéna. »
Ajouta le jeune homme dans un élan de lyrisme. Cela claqua dans l'air, même la brise nocturne semblait devenue plus douce, plus légère, plus vivante à sa déclaration.

N'en tenant plus, ne pouvant se passer d'elle il posa ses lèvres sur les siennes, il goûta au goût de menthe et de baume à lèvre.
Tout son être s'enflammait, il sentit son cœur vibrer dans sa poitrine, son esprit trembler sous ce baiser.
Ses yeux clos, ses pensées se mélangeant, la brume nocturne les berçant.

Ce n'était plus de l'amour mais de la sorcellerie à ses yeux, seulement plus tard il comprendrait qu'il n'y avait rien d'ensorcelé.
L'amour n'est pas toujours l'amour.
L'amour peut prendre des formes diverses et variées.
La passion, la dévotion, la procuration...

Athéna se détacha délicatement de lui, lui fit face et ancra son regard de braise dans le sien de glace.
Délicatement, elle caressa sa joue pétrifiée.
«Être amoureux c'est la capacité à penser à l'autre avant de vouloir servir ses propres intérêts. Lorsque tu vois la personne dont tu es tombé amoureux tu dois ressentir mille et une sensations dans ton ventre, tu dois ressentir cette lueur lorsque son regard croise le tiens. Et lorsque la personne que tu aimes n'est pas à tes côtés tu dois ressentir un manque à cet endroit. »
Finit-elle en pointant la poitrine de l'homme meublé dans son mutisme.

« Mais surtout, être amoureux c'est mettre l'être aimé en sécurité. Ne jamais porter atteinte à sa vie, à sa santé mentale ou physique. »
Elle l'aimait, c'était indéniable.
Elle le détestait, c'était évident.
Il n'était pas méchant, elle le savait mais il ne se comportait pas comme un homme.
Il avait toujours les bons mots, les jolies phrases, les belles répliques, la gestuelle parfaite pour manipuler.
Mais elle n'était pas comme les autres, et tous les apparats n'étaient qu'une façade dont elle avait déjà cerné les caprices déguisés du milliardaire.
Il était toxique pour elle et elle était toxique pour lui.
Et la toxicité de leur relation ne pouvait que les détruire.

Il l'aimait, c'était indéniable.
Il lui avait fait du mal, c'était évident.
Et elle se retrouvait seule avec une tristesse dont il était le maître, une colère dont elle était elle même la victime.

Alors il sentit son cœur battre contre sa cage thoracique lui procurant une vive douleur.
La respiration complètement erratique, les lèvres gonflées il voulait goûter de nouveau à ses lèvres.
Elle était son obsession, sa tentation, son trouble.
Elle n'était pas très grande mais il ignorait comment cette attractivité qu'elle déclenchait chez les hommes était née.

« Je vais te sortir de là, je te le promets. »
Déclara t'il, cherchant à sauver sa dulcinée et surtout sa place dans son cœur.
Rayan essayait de trouver un endroit où fuir, comment s'échapper ?
Il arpentait le toit à la recherche d'une issue qu'il n'avait peut-être pas remarqué auparavant.
Dans sa quête de la liberté, il délaissa la jeune femme qui s'éloignait dangereusement de lui.

Athena s'approcha du bord et sembla pâlir à la vue de vide.

Elle avait cette sensation que ses pieds allaient se détacher du sol, que son corps tout entier frémissant avec le vent allait chuter, la chute de l'adrénaline et sa chute à elle.

Elle ne voulait pas de cette vie, elle n'était pas une aventurière, elle s'était persuadée qu'elle était capable de vivre cette vie complètement étriquée.
Elle ferma les yeux et pensa à sa famille assassinée, à cet amour toxique.

« Il n'y a pas d'amour heureux » Aragon.
Ce poème résumait si bien ce qu'elle ressentait.

Les paupières closes, elle prit une grande inspiration, s'approcha du vide et sentie le sol se dérober sous ses pieds.

Il avait suffit de quelques secondes, quelques instants d'inattention pour qu'il ne reste qu'une seule personne sur le toit.

Tout était terminé, son monde s'était écroulé.

STINKERWhere stories live. Discover now