Déchéance

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Alors que lumière du ciel commençait à illuminer l'or de la geôle, l'échappatoire fortifié d'acier n'avait toujours point bougé. Ce dernier attendait son heure sonner, sonner pour le moment de ma sentence. D'un instant à l'autre la porte s'ouvrira, et on m'emmènera à la Chambre de la Roulette -là où le seigneur me punira-.

J'avais vu juste. L'embrasure fredonna un air de percussion de clé, puis s'écarquilla sur deux geôliers. Ceux-ci semblaient n'avoir pas beaucoup de repos, leurs rides naissantes et la poche violette de leurs yeux en témoignaient. Leur livrée céruléen retombait négligemment sur les contours de leur silhouette comme épuisée de tant de travail.

Le plus âgé des deux gardes , embêté des dégâts que j'avais causé dans la cellule, enfonça son poing dans mon col, et m'asséna d'un violent coup de genou au ventre. Ensuite il me relâcha sur le sol de glace.

- Ne gâche pas la marchandise, Igor. Le seigneur la veut vivante et en bon état, s'écria le second officier voyant que je n'arrivais pas à me redresser.

Igor prit une grande inspiration, me souleva mollement, et me poussa au-dehors de la cellule.

La lumière blanche du couloir austère de la prison m'aveugla de plein fouet. La faible obscurité de ma forteresse ne m'avait plus habitué à autant de luminosité.

Malgré la côte fêlée -que m'avait fait le garde- qui me bloqua à plusieurs reprises la respiration, on me poussa pour me faire avancer. Je commençai à regretter le calme de ma cellule, jamais plus qu'en cet instant, la peur me tiraillait le ventre. Je me sentais comme pestiférée d'un monde qui m'avait bercé et qui me hâtait à présent dans la cruauté bestiale des hommes.

Le peu de nobles, venus s'entretenir avec d'autres prisonniers, que l'on croisait à cette heure s'écartèrent sur mon passage. Les deux officiers, raides et à l'air autoritaire, ainsi que l'ancienne privilégiée de Farouk, la manipulatrice qui avait cassé les règles du Pôle, dissuadèrent tous courtisans à s'interposer dans leur marche. On prit un ascenseur qui n'avait que pour seul escale, la chambre de la Roulette, l'issue de mon existence, là où les hommes remettaient leur vie au seigneur de marbre.

L'ascenseur était un élévateur aux grilles dorées, aux tapisseries antiques comme toute l'architecture de l'hôtel de police. Il n'y avait étrangement ni de groom ni de levier d'appel. Le monte-charge s'éleva tout seul. Les gardes profitèrent du temps de répit pour grignoter quelques gâteaux. Ils dégustèrent vivement les confiseries, sans prendre garde aux miettes qui s'accolèrent à leur uniforme. Moi, je n'avais pas le droit à cela, d'ailleurs depuis leur arrivée soudaine au gynécée, je n'avais pas avalé quoique soit. Pour cause, d'après les hommes qui m'accompagnaient, il fallait avoir le ventre vide pour la Mutilation. Bien, après tout je n'avais pas très faim. L'effroi de la punition me remplissait l'estomac.

Cette immense peur s'accentua lorsque les grilles de l'ascenseur s'ouvrirent sur un couloir sombre. On me poussa au-dedans, et je marchai au hasard dans le noir. Lorsque je trébuchai sur une dalle, les deux officiers rigolèrent puis me soulevèrent et m'obligèrent à continuer d'avancer. Soudain, nous arrivâmes devant une porte où s'échappaient quelques faisceaux pourpre de lumières. La porte s'ouvrit, et une immense foule joyeuse se mit à me pointer du doigt et à me huer. D'autres gardes sortirent de la salle, accompagnés d'une Mirage avec une croix rouge imprimée sur son visage, leur demandant grâce.

Allais-je finir comme elle ?

La colossale salle paraissait encore plus grande avec ses hautes tribunes de bois, emplis de courtisans en haut-de-forme. Les rideaux rouges de l'arrière de la pièce flamboyaient.

𝕸é𝖒𝖔𝖎𝖗𝖊𝖘 𝕯'𝖚𝖓𝖊 𝕮𝖍𝖗𝖔𝖓𝖎𝖖𝖚𝖊𝖚𝖘𝖊Where stories live. Discover now