Soeurs jumelles diaboliques #2

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Les sœurs Papin

Les sœurs Papin sont nées de l’union de Clémence Derré, épouse infidèle et peu maternelle, et de son mari Gustave Papin, homme faible et buveur. Le couple s'est marié en octobre 1901 et donne naissance en février 1902, quatre mois après son mariage, à Emilia, fille aînée du couple. Puis il donne naissance à Christine le 8 mars 1905 et Léa le 15 septembre 1911. Clémence quitte son mari après la découverte du viol d’Emilia par son père lorsque celle-ci est âgée de 10 ans. Le divorce est prononcé en 1913 sans que l’inceste soit dénoncé et Emilia part en maison de correction, placée par sa mère. Emilia, qui rentre dans les ordres, est alors traitée comme la fautive, probablement aussi parce qu’il existe un doute sur la paternité biologique de Gustave.

Ni Christine, ni Léa ne sont élevées par leur mère, qui les place et déplace à son gré tout au long de leur enfance et de leur adolescence, jusqu’à leur entrée chez les Lancelin. Quand elles ne sont pas placées chez des institutions religieuses, chacune de ces deux sœurs vit comme bonne avec une femme seule, avant de se retrouver ensemble. Christine et Léa changent assez souvent de maisons sur ordre de leur mère, qui considère toujours leurs gages insuffisants. Clémence place Christine chez les Lancelin à 22 ans, celle-ci ayant obtenu deux mois plus tard que sa sœur soit engagée pour l’assister. Les règles en vigueur dans la maison sont posées dès l’embauche : les domestiques n’ont de rapport qu’avec Madame Lancelin qui ne donne d’ordre (souvent par simples billets) qu’à Christine qui transmet à Léa. Les deux sœurs sont dépeintes comme des servantes modèles par leurs anciens employeurs ainsi que par Monsieur Lancelin et les voisins et amis, qui notent cependant presque tous une intolérance teintée de bizarrerie de la part de Christine vis-à-vis des observations que peuvent lui faire ses employeurs.

L'absence de motif un tant soit peu rationnel à ce crime apparaît également du fait qu’à plusieurs reprises lors du procès, les deux sœurs ont répété qu’elles n’avaient absolument rien à reprocher à leurs patronnes, possédant suffisamment d’économies pour chercher un autre travail si elles avaient voulu les quitter. Elles étaient bien nourries, bien logées et bien traitées chez les Lancelin. En six ans, elles n'avaient d’ailleurs demandé aucune autorisation de sortie. Lors du temps libre dont elles disposaient, les deux sœurs se retiraient dans leur chambre, et ne sortaient que pour se rendre à la messe, coquettes et élégantes le dimanche matin. Elles ne liaient jamais connaissance avec un garçon ou avec les domestiques des maisons voisines, ni avec les commerçants du quartier qui les trouvaient bizarres. Une affection exclusive liait Christine et Léa qui s’étaient juré qu’aucun homme ne les séparerait jamais.

Trois événements, traversant ces six ans de cohabitation Lancelin-Papin, peuvent également éclairer d’un jour nouveau le passage à l’acte :

En 1929, Madame Lancelin, touchée par l’application de ses bonnes à leur travail, avait dérogé à la règle de neutralité qu'elle avait posée au départ en intervenant directement auprès de leur mère, pour que Christine et Léa gardent désormais leurs gages dans leur intégralité. Dès lors, Madame Lancelin apparaissait sous un jour nouveau : elle n'était plus simplement une patronne, mais une femme qui se souciait du bien et du bonheur de ses employées. Léa et Christine ont reçu ce geste comme une marque d’affection, qui instaurait entre elles un lien d’un autre ordre que celui d’employeur à employé. Désormais, les deux sœurs appelaient Madame Lancelin « maman », dans le secret de leurs confidences.

Le deuxième événement a été la rupture ultérieure de Léa et Christine avec leur mère Clémence en 1929, rupture soudaine, définitive, sans motif apparent, sans dispute et sans parole. Clémence, interrogée sur l’événement, déclarait ne pas avoir su pour quel motif ses filles ne voulaient plus la voir. Léa et Christine, interrogées à leur tour, évoquaient les « observations » de Clémence, ce qui ne peut que souligner leur intolérance à la remarque. Désormais, Christine n’employa que l’expression impersonnelle « cette femme » pour parler de sa mère. Monsieur Lancelin et son beau-frère s’inquiétèrent fortement de cette rupture car elle avait rendu les deux sœurs sombres et taciturnes.

Dark Stories (Tome 3) <Terminé>Where stories live. Discover now